ARCHIVE. "J'étais stressé" : Il y a 25 ans, le premier PACS de l'histoire a été signé... à Lille

Le 15 novembre 1999 la loi sur le PACS a été promulguée en France. Trois jours plus tard, le premier pacs a été conclu entre Dominique Adamski et Francis Dekens à Lille. Les caméras de France 3 Nord Pas-de-Calais les ont suivis à plusieurs étapes de leur vie de couple : mariage, impôts, anniversaire... plongeons-nous dans les archives.

Le Pacte civil de solidarité, ou PACS, fête ce 15 novembre 2024 ses 25 ans. Avec le mariage, il incarne l'une des deux formes d'union civile qui existent aujourd'hui en France.

Et pourtant, pendant des mois, ce projet de loi va déchaîner les passions parce qu'il est ouvert à tous les couples non mariés : hétérosexuels ou homosexuels. Finalement, défendue par le gouvernement Jospin, la loi sur le PACS sera adoptée le 15 novembre 1999. 

Les personnes pacsées se trouvent alors dans un cadre juridique précis, imposant des obligations réciproques au couple, à la différence du simple concubinage. Le PACS se veut aussi plus souple que le mariage, notamment en matière de séparation ou de succession des biens. Les premiers à en bénéficier seront Dominique Adamski et Francis Dekens le 18 novembre 1999, à Lille. Nous les avons suivis à plusieurs étapes clés de leur vie de couple avec les caméras de France 3 Nord Pas-de-Calais.

18 novembre 1999 : Dominique Adamski et Francis Dekens forment le premier couple pacsé de France

Il y a 25 ans, c'est au tribunal de Lille que Dominique et Francis ont officialisé leur union. "Pour moi, on est vraiment passé du statut de personnes isolées, au statut de couple", se rappelle Dominique, document de PACS à la main. "C'est une chose qu'on revendiquait depuis très longtemps, même bien avant le PACS. C'est un droit dont on se sentait privé."

En 2019, pour célébrer les 20 ans de leur union, nous les avions rencontrés, dans leur salon. Ils se rappelaient leur PACS comme si c'était la veille. Un mélange de stress de s'unir avec l'être aimé, mais aussi de pression d'être le premier couple de France à se pacser dans une société où l'union de personnes de même sexe suscite encore beaucoup de débats.

"Je tremblais comme une feuille", revit Francis, avant d'en rire. "J'étais stressé, je n'aurais pas pu tenir un gobelet de café." Son conjoint, Dominique rebondit sur ces propos et justifie ce stress quelque peu paralysant : "c'est un moment très fort parce que c'était l'aboutissement des années de combat. Pour nous, c'était vraiment une finalité."

En se pacsant, les deux hommes deviennent officiellement partenaires dans la vie, mais aussi aux yeux de l'administration. Impôts, mutuelle, banque... tout se fait désormais à deux. 

2000 : un an d'union, les premières difficultés

12 mois après la signature de leur PACS au tribunal de Lille, les caméras de France 3 se sont de nouveau posées chez Dominique et Francis. Pour leurs noces de coton, ils ont accepté de revenir sur leur première année de couple, et sur l'impact de cette union sur leur quotidien.

"On peut faire valoir nos droits en tant que couple", se réjouit Dominique. "Pouvoir faire une déclaration d'impôts commune, et donc de se sentir plus protégé l'un par rapport à l'autre, c'est fondamental." Mais ces impôts, justement, vont leur donner un peu de fil à retordre. Ils doivent finalement attendre trois ans pour pouvoir faire une déclaration commune de leurs revenus.

"Pour moi, c'est infondé, ça ne justifie pas la réalité des faits", s'agaçait Francis à l'époque. "Quand on est ensemble depuis 20 ans et qu'on doit encore attendre 3 ans pour faire sa déclaration, je me dis non, ça pousse un peu loin le bouchon."

En 2000, un an après l'entrée en vigueur du PACS, trois couples se pacsent en moyenne chaque jour au tribunal de Lille. Joëlle Dremaux, greffière en chef de l'époque relayait qu'il y avait "des gens très stressés et qui tremblent, d'autres très émus qui prennent ça comme un mariage et qui viennent avec des témoins." Visiblement, peu nombreux sont ceux qui font machine arrière, car si la greffière relate quatre cas de dé-PACS en 2000, c'est parce que ces quatre couples ont décidé de se marier.

2003 : "On essaiera d'obtenir le mariage, c'est notre but"

Plus de trois ans après leur union, Francis et Dominique militaient toujours plus pour leurs droits. "Maintenant, l'étape prochaine, c'est le droit au mariage", assurait ce dernier devant une caméra de France Télévisions, en 2003.

Une idée plutôt précurseure lorsque l'on sait que le mariage pour tous sera adopté en France en 2013. Un projet porté par Christiane Taubira à l'époque.

Établis dans le Nord, Dominique et Francis, ne peuvent s'empêcher de s'intéresser à ce qu'il se passe outre-Quiévrain. Le 30 janvier 2003, une proposition de loi, votée par le Parlement belge à une très large majorité, autorise le mariage entre personnes du même sexe, même pour les ressortissants étrangers résidant sur le territoire. Après les Pays-Bas, la Belgique devient ainsi le deuxième pays européen à autoriser le mariage homosexuel.

Maintenant, l'étape prochaine, c'est le droit au mariage.

Dominique Adamski

Séduit par cette nouvelle législation, le couple envisage donc de s'installer dans le plat pays. "On se rapprochera de la Belgique, et on essaiera de tirer parti de la situation. On essaiera d'obtenir le mariage, c'est notre but, c'est notre projet."

2006 : Ils se sont dits "oui", en Belgique

Ils en ont rêvé, ils l'ont fait. "Ils étaient les premiers pacsés de France, les voilà futurs jeunes mariés", commentait la journaliste de France Télévisions en 2006, qui les a suivis le jour de leur mariage en Belgique.

À Mouscron, commune belge limitrophe, Dominique et Francis ont acheté un pied-à-terre, et peuvent désormais se marier en leur qualité de ressortissant étranger vivant en Belgique.

À quelques heures de son union avec Dominique, et déjà vêtu de son costume de mariage, Francis souligne : "La première qualité du mariage en Belgique, c'est sa banalité. Finalement, on se fond dans la population comme des gens ordinaires ".

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Après 25 ans de vie commune, ils se sont dits "oui" devant l'échevine de Mouscron, et leur famille. "On se marie par amour, et de manière à protéger le conjoint. Ce qu'on n'a pas avec le gouvernement français, on l'a avec l'État belge", réagissait Dominique devant un parterre de journaliste, quelques minutes après s'être marié à la mairie de Mouscron.

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Ce 18 novembre 2024, le couple célébrera ses 25 ans de PACS. Si Dominique et Francis ont passé une grande partie de leur vie dans le Nord de la France, ils sont aujourd'hui établis dans l'Hérault.

Ce PACS en 1999 et sa grande médiatisation leur permettront de vivre leur amour au grand jour, dans une société peu éveillée aux droits LGBT. 25 années d'amour et de militantisme, qui leur permettront d'être reconnus en leur qualité de couple face à la loi, et de se marier en Belgique en 2006. Une union qui sera reconnue en France 7 ans plus tard avec l'adoption du mariage pour tous.