Onze prénoms surplombés d'une inscription "mur de la honte". Selon la direction de Sciences Po Lille, aucun doute : les élèves visés ont pour point commun de s'être opposés au blocage de l'IEP dans le cadre des manifestations contre la réforme des retraites. Des plaintes vont être déposées.
Onze prénoms inscrits au feutre noir sur la palissade de travaux installée face à l’entrée de Sciences Po surplombés d’une inscription qui laisse peu de place au doute : mur de la honte.
Une dégradation commise dans la nuit du dimanche 2 au lundi 3 avril 2023 que peu de passants peuvent observer à l’œil nu mais que la direction a décidé de ne pas laisser passer. "Écrire « mur de la honte » avec les prénoms d’élèves, d’abord ça ne peut être fait que par quelqu’un de cette école, avance Pierre Mathiot, donc ça c’est un problème. Et je suis désolé de dire cela, mais on ne fait pas ça".
Tensions entre étudiants autour des blocages
Avec l’équipe à la tête de l’Institut d’Etudes Politiques, il a rédigé un texte sans équivoque à l’attention des étudiants. Première information : 9 des 11 prénoms tagués sur le mur faisaient partie de la liste S’engager aux dernières élections étudiantes, une liste de centre-droit.
Ces 11 étudiants "ont en commun d’avoir émis dans la période récente des critiques publiques, ou sur des listes de diffusion, sur la manière dont le mouvement social était conduit dans notre école, contre le recours aux blocages surtout".
Il y a eu quelques tensions entre étudiants lié au mouvement et à la manière dont le mouvement se déroule. Une partie très minoritaire des étudiants souhaite bloquer l’école assez régulièrement tandis qu’une autre partie assez majoritaire, qui s’oppose à la réforme des retraites et à ce qui se passe depuis deux mois et demi, considère qu’il y a d’autres manières d’agir plutôt que de bloquer.
Pierre Mathiot, directeur de Sciences Po Lille
Car depuis le début des manifestations contre la réforme des retraites il y a maintenant deux mois et demi, l’IEP de Lille comme de nombreuses facultés ont été bloquées par certains étudiants. Des blocages qui n’ont plus lieu ces dernières semaines, assure le directeur, car "une majorité s’est clairement exprimée contre".
Respect de la nuance et du pluralisme
Selon Pierre Mathiot, la direction se devait de réagir face à ces tags. "C’est un message pour dire halte au feu, on est dans un mouvement social, il faut raison garder et surtout il faut respecter fondamentalement les principes qui structurent le fonctionnement de notre école. C’est-à-dire l’art de la nuance, accepter le pluralisme et accepter qu’il y ait des opinions dissonantes sans pour autant renvoyer ceux qui n’expriment pas les mêmes opinions que soi à un état de fasciste, d’identitaire. Avant d’ajouter. C’est totalement délirant d’en arriver à cela".
Les étudiants visés par ces tags se disent choqués et ont annoncé à la direction de Sciences Po Lille leur souhait de porter plainte. "On va se porter solidaires de cette plainte parce que quelque part, c’est aussi l’école qui est mise en cause par cette action", conclut Pierre Mathiot.