Ce 4 février, le CHU et le parquet de Lille ont signé une convention visant à mieux protéger et accompagner les victimes de violences conjugales. Avec l'accord de la patiente, les médecins pourront directement faire un signalement auprès de la justice.
A Lille, on fait un pas de plus vers les victimes de violences conjugales. Le Centre Hospitalier et le Parquet ont signé, ce 4 février, "une convention permettant aux médecins de l’Unité Médico-Judiciaire (UMJ) du CHU de signaler directement des faits de violences conjugales" auprès de la justice.
Jusqu'à présent, expliquent-ils dans un communiqué conjoint, les femmes reçues pour violences conjugales aux urgences ou par l'UMJ de l'hôpital devaient ensuite poursuivre en se rendant, sans accompagnement, dans un commissariat ou une gendarmerie, afin de déposer une éventuelle plainte. "Dans les faits, beaucoup de femmes ne donnaient pas suite, entraînant un risque accru de réitération des violences."
La plainte, un processus difficile pour les victimes de violences
Surveillance du conjoint violent, mécanisme d'emprise, peur des répercussions sur d'autres membres dans la famille, crainte d'un mauvais accueil au commissariat... Nombreux sont en effet les obstacles qui se dressent sur la route d'une victime de violences qui cherche une issue. Et la menace est bien réelle : la rupture est le premier déclencheur du passage à l'acte dans le cas des homicides conjugaux.
Pour Delphine Beauvais, directrice du pôle violences faites aux femmes de l'association Solfa, à Lille, ce travail de partenariat est une vraie bonne nouvelle. "Les femmes que l'on peut recevoir, si on peut les orienter vers l'UMJ, notamment dans le cadre d'un certificat d'ITT, ça nous permettrait de pouvoir leur apporter cet élément supplémentaire pour sécuriser la plainte. Celle-ci sera beaucoup plus encadrée, le policier pourra prendre le temps et il saura pourquoi madame se présente. Cela évitera peut être aussi des durées d'attente qui sont parfois très longues, qui créent une appréhension."
Sauf dans les cas - déjà prévus par la loi - de danger imminent, le dispositif est centré sur le consentement et le souhait de la victime d'engager cette démarche. "Avec ce nouveau dispositif, les patientes seront adressées systématiquement à l’UMJ et pourront compléter une fiche de consentement à signalement, qui sera immédiatement transmise à la justice. Pour les patientes opposées au signalement, un compte-rendu d’examen leur sera remis et elles seront informées de la possibilité de recontacter l’unité après réflexion", détaillent les deux administrations.
Le "travail en réseau", indispensable pour mieux protéger les femmes
Les deux administrations espèrent créer des conditions adéquates pour permettre aux femmes de briser le cycle de la violence. "L'hôpital peut être potentiellement plus rassurant qu'une gendarmerie, il peut être intéressant pour les femmes de venir déposer une première parole au niveau du CHU. On le voit au quotidien, le travail en réseau facilite toujours le recueil de la parole et l'appréhension de la situation. On est sur une vraie progression, c'est important de le souligner", approuve Delphine Bauvais.
Plusieurs centres hospitaliers en France ont signé des conventions similaires. A Arras, l'hôpital, la gendarmerie, le procureur, l'union nationale des taxis et d'autres partenaires encore se sont entendus le 13 janvier 2022 sur un mécanisme de dépôt de plainte directement à l'hôpital. Elles pourront être accueillies à la fois par le personnel médical et par les forces de l'ordre, dans une salle privée dédiée au recueil de cette parole.