Pour la 6ème année consécutive, le Palais des Beaux-Arts de Lille propose une expérience sensorielle inédite, permettant aux visiteurs d’écouter la musique des œuvres grâce à un casque. Aux baguettes, Alexandre Bloch, directeur musical de l’Orchestre National de Lille.
Endormi pendant 80 jours et 80 nuits pendant toute la période de confinement, le Palais des Beaux-Arts de Lille a timidement rouvert ses portes au public le 3 juin dernier. Les quelques visiteurs ont alors évolué au milieu des tableaux et autres sculptures, dans un silence de plomb, propre aux musées. Un silence qui n’a que trop duré puisque la nouvelle exposition proposée par le PBA veut titiller tous les sens des visiteurs, à commencer par l’ouïe.Au-delà de la petite musique intérieure des œuvres propre à chaque visiteur, les hauts plafonds du Palais font résonner depuis ce mercredi 15 juillet des airs de musique, bien vivants cette fois-ci. Lorsqu’on emprunte l’escalier du hall d’entrée pour accéder aux peintures du premier, des notes de piano surgissent. Il ne s’agit pas d’une bande-son enregistrée mais bien d’un pianiste visiteur qui joue quelques notes de de la bande originale d’Amélie Poulain de Yann Thiersen, accolé à un tableau de Jérôme Bosch, nommé Le concert dans l’œuf.
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— Ville de Lille (@lillefrance) July 15, 2020
Coup d’envoi de l’Open Museum Music au @PBALille ! Ou quand la musique s’invite au musée... #OMMusicLille pic.twitter.com/U4Avbb8lSY
Heavy métal médiéval dans les oreilles devant un tableau du 16ème siècle
Là est tout l’objectif de l’exposition Open Museum : conjuguer les disciplines entre elles pour offrir une expérience de visite différente. Lorsque le maestro du jour quitte le piano, une musique d’ambiance prend le relais. Saltarello de Dead Can Dance, un groupe anglo-australien qui puise son inspiration d’une danse italienne du 13ème siècle, suivie d’une chanson de heavy métal médiéval –rien que ça- du groupe In Extremo. Des musiques minutieusement choisies pour accompagner le tableau de Bosch qui représente une coquille d’œuf dans laquelle une chorale chante aux côté d’un âne qui joue du luth et d’un singe as de la flûte. Bref, une fantaisie médiévale illustrée grâce aux musiques de deux groupes farfelus aux mêmes inspirations. Vous suivez ?De Debussy à Clara Luciani
Lorsqu’on avance un peu plus dans l’aile du musée, une seconde salle est ornée de tapis orientaux qui donnent envie de s’y installer. C’est le but. À côté de chaque assise se trouve une prise jack pour que le visiteur y branche ses propres écouteurs –covid oblige, le musée ne prête pas de casque audio- et profite ainsi des tableaux qui l’entourent, en musique. On passe alors des Pink Floyd à Robert Schuman, de Sébastien Tellier à Clara Luciani, ou encore de Pete Doherty à Claude Debussy. Un panel de chansons hétéroclites sélectionnées par Alexandre Bloch, directeur musical de l’Orchestre National de Lille et Régis Cotentin, chargé de la programmation contemporaine au PBA.Expérience inédite
L’expérience, bien que particulière et déstabilisante au premier abord, est inattendue et réussie. Les tableaux racontent ainsi une part de leur mystère grâce à la musique et l’interprétation de chacun. Une expérience qui prend tout son sens dans la galerie des sculptures située au rez-de-chaussée. Sous les voutes majestueuses de la pièce, la voix à capella de Nina Simone sur le titre Images résonne et donne l’impression que les statues sont en train de l’écouter. Une sensation partagée avec les autres visiteurs du musée et l’agent de surveillance, qui doit terminer sa journée en connaissant les paroles par cœur.L’expérience touche à sa fin et une œuvre donne tout son sens à l’intérêt de faire entrer la musique dans un musée. Hermaphrodite de François Milhomme est une sculpture de marbre, inspirée de la mythologie grecque qui voulait que le jeune homme du même nom, réputé pour être très beau, repoussa les avances d’une nymphe qui implora les dieux de l’unir à jamais avec lui. Son souhait fut exaucé puisque leurs deux corps furent unis en un seul, mi-homme mi-femme. Devant cette sculpture, le musée propose alors d’écouter Half Ladies, un titre de la chanteuse Christine & The Queens qui questionne le genre et l’acceptation de l’autre se demandant si elle est "une petite fille ou un petit garçon", en résonnance avec l’histoire de l’œuvre et permettant ainsi d’appréhender la sculpture sous un angle inédit.