2022 avait déjà été une année compliquée à cause de la sécheresse. 2023 a marqué les esprits avec les pluies intenses tombées dans la région. Pourtant, le bilan n'est pas si noir pour les producteurs de pomme de terre des Hauts-de-France. Explications.
La pluie à l'automne et début janvier. Et maintenant le gel. Les conditions sont rudes pour ceux qui doivent composer avec la météo. Comme Nicolas Loingeville, agriculteur à Sercus, près d'Hazebrouck : "avec les inondations, on a perdu 5% de la récolte. Avec le gel, on va perdre encore 5%, ça fait quand même 10% en tout."
La situation est la même pour tous dans la région, confirme le président de la section pomme de terre de la FDSEA du Nord, le principal syndicat agricole : "toutes les années sont différentes mais celle-là, elle est particulièrement capricieuse et compliquée : fort sec, fort humide, sec humide, etc."
On a pris le changement climatique de plein fouet cette année.
Antoine Peenaert, producteur de pommes de terre dans le Pas-de-Calais
Or, quand il fait trop sec, les professionnels ne peuvent pas arracher, explique Antoine Peenaert, également producteur dans le Calaisis, et quand les champs sont gorgés d'eau, ils ne peuvent pas non plus y accéder : "si la pomme de terre baigne dans l'eau, elle périt en 48h". Idem pour le gel, le tubercule n'aime pas passer au congélateur! La double peine : "le gel est descendu jusqu'à 6 cm sous terre alors que le bas de la butte, lui, a été abîmé par l’humidité".
Les conditions météorologiques difficiles, voire extrêmes, tendent à devenir la norme.
Francisco Moya, président du Comité national interprofessionnel de la pomme de terreAFP
Plants
Maintenant que la récolte est passée, reste à établir les pertes exactes. Ensuite, il faut passer à la prochaine saison. La crainte des agriculteurs réside désormais dans la disponibilité en plants : y aura-t-il assez de volume pour planter le tubercule dans les prochaines semaines ? Rien n'est moins sûr. La semence ne s'annonce pas bonne, l'offre est moins bonne à cause des conditions climatiques.
"La filière est en souffrance, explique Antoine Peenaert, on commence à être dans une impasse technique : on nous supprime des molécules et on n’a pas de solutions contre des ravageurs, les insectes aériens ou au sol. Donc c'est de plus en plus compliqué de faire des plants de pommes de terre en France."
Bonne récolte
Pourtant, les chiffres pour l'année 2023 ne sont pas mauvais. Malgré les pertes, la récolte est en hausse dans la région, première de France en termes de production : +21,6% en Picardie et +13,2% dans le Nord-Pas-de-Calais. "C'est vrai que ça a été moins catastrophique que 2022, année torride, reconnaît Nicolas Loingeville, l'agriculteur de Sercus. La sécheresse estivale avait conduit à de lourdes pertes, plus encore qu'à cause des inondations.
"Là, rassure le président de la section FDSEA qui a perdu 10% de sa production, il n'y a pas de quoi impacter le marché, les prix sont déjà hauts, ça va peut-être monter ponctuellement sur certaines variétés mais leur tarif ne va pas doubler."
Les coûts de production restent en effet très élevés et c'est là le principal enjeu pour les producteurs : le prix des engrais, de l’électricité, du gasoil : "cultiver la pomme de terre, s'alarme Nicolas Loingeville, nous coûte vraiment beaucoup plus cher qu'il y a quelques années."