Deux élus locaux de l'opposition ont boycotté l'hommage aux "victimes des attentats terroristes en Israël" en préambule du conseil municipal, mardi 10 octobre. L'un d'eux s'est vertement opposé au maire. Ce dernier a porté plainte.
La scène, filmée, se déroule au début du conseil municipal de Marly, commune de 11.000 habitants dans le Nord, mardi 10 octobre. Le maire Jean-Noël Verfaillie (DVD) demande aux élus d'observer une minute de silence "pour toutes les victimes des attentats terroristes qui ont eu lieu en Israël et pour nos compatriotes décédés ces dernières heures".
L'ensemble des conseillers se lèvent autour de la table, sauf deux : Karim Berbache et Serge Lekadir, élus de l'opposition. Le premier rompt le silence, mais la vidéo ne permet pas de capter ses propos. Présente sur place, la conseillère d'opposition Valérie Capelle (PS) raconte : "Il a tout de suite dit : "non non je ne suis pas d'accord". Le maire de compléter : "il a déclaré que cette minute n'était pas légitime."
Deux minutes d'échanges tendus
À l'issue de cette minute de silence le ton monte. Serge Lekadir, s'adressant au maire, demande également un hommage "pour les deux camps". "Il faut avoir aussi une pensée pour l’autre peuple, les Palestiniens, qui subissent la politique d’extrême droite du gouvernement d’Israël." Avant de se lever, accompagné par Karim Berbache, Virginie Melki et quelques secondes plus tard par Marie-Thérèse Hourez, tous les quatre membres du groupe "Unis pour Marly".
L'édile réagit aussitôt : "je ne vous dirai pas que je suis surpris d'avoir des islamo-gauchistes dans mon conseil municipal, mais dans le cadre d'actes terroristes on ne peut pas avoir ce genre de position, ce n'est pas un débat." L'hommage est abrégé, les élus se rassoient, sauf Karim Berbache.
"Je n'ai pas aimé la comparaison avec le Bataclan"
Il cherche à s'expliquer sur son boycott, demande "de la nuance [...] sur un sujet sensible depuis des années". Et d'ajouter : "je n'ai pas aimé la comparaison que vous avez faite avec le Bataclan". Plus tôt, Jean-Noël Verfaillie évoquait des "scènes de barbarie qui ont pu rappeler ce que nous avons vécu en France au Bataclan."
M.Berbache se fait rabrouer par l'édile, qui, à plusieurs reprises lui intime l'ordre de "se taire". "Vous voulez que je vous sorte ? C'est moi qui ai la police du conseil municipal", lance-t-il. La qualité sonore de la vidéo ne permet pas de saisir toute la teneur de cet échange tendu qui va durer près de deux minutes.
L'indignation générale au-delà de Marly
Cette scène va rapidement traverser les murs du petit conseil municipal de Marly. En effet, Jean-Noël Verfaillie en fait l'écho sur son compte X (anciennement Twitter). Ses messages provoquent l'émoi de nombreuses figures politiques, qui apporteront leur soutien. C'est le cas de Xavier Bertrand, président de la Région Hauts-de-France, qui qualifie "d'indigne" le comportement de Karim Berbache. Mais aussi des sénateurs Marc-Philippe Daubresse ou encore Franck Dhersin.
Au sein même du conseil municipal, les élus socialistes de l'opposition ont envoyé un courrier au maire pour "apporter leur soutien face au comportement irrespectueux des deux conseillers municipaux". "On se désolidarise pleinement, assure Valérie Capelle, que nous avons contacté. C'est un manque de respect, il y a des règles dans cette assemblée."
Un signalement au parquet
"Je pense que ça n'arrive quasiment jamais ce genre de chose, d'interrompre une minute de silence, réagit Jean-Noël Verfaillie, deux jours plus tard. C'est choquant, d'autant plus que c'était relativement consensuel. On pleure des victimes."
Ce dernier a fait un signalement au parquet, dans le cadre de l'article 40 du code pénal. Il a également rapporté la scène au préfet du Nord, Georges-François Leclerc, ainsi qu'au ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin.
"Des regrets" sur la forme pour Karim Berbache
Interrogé par France Bleu Nord, Karim Berbache assure : "bien-sûr que j'ai des regrets." Et d'ajouter : "l'intelligence aurait voulu qu'on fasse la minute de silence pour les victimes et qu'on demande une autre minute de silence pour les victimes palestiniennes. Ça aurait évité la confusion. La dénonciation du Hamas est pour moi sans détour. Ce sont des crimes atroces." Toujours selon nos confrères, il a écrit une lettre au préfet pour expliquer son geste.