Ce n'est pas la première fois que des jardins familiaux du Beauvaisis (Oise) font face à des cambriolages. Des biens assez chers, comme des motoculteurs, des pompes et des perceuses, ont été volés à Notre-Dame-du-Thil. Pour les jardiniers, les équipes bénévoles et la municipalité, ces actes "désolants" doivent s'arrêter, d'autant plus qu'ils pénalisent des familles parfois précaires.
"Cinq motoculteurs, cinq Rotofil, six pompes, une perceuse, une tronçonneuse, un Kärcher et un petit peu d'outillage", énumère Jacqueline Lesueur, trésorière et secrétaire des Jardins familiaux de Notre-Dame-du-Thil, à Beauvais. Le bilan du cambriolage qui a eu lieu dans la nuit du vendredi 5 au samedi 6 avril risque d'être d'autant plus important qu'une trentaine de cabanes ont été ouvertes et que les comptes ne sont pas terminés.
Des plaintes ont été déposées par les jardiniers de Notre-Dame-du-Thil, annonce Mamadou Ly, adjoint au maire de Beauvais chargé de la vie urbaine et de la proximité. "Au niveau de la municipalité, on apporte surtout une aide technique et des subventions pour le fonctionnement des jardins". Les dégâts sont estimés à 8 000 € pour la ville, "ne serait-ce que pour réparer les cabanes endommagées", déplore l'élu.
Des familles démunies, monoparentales et des retraités
Ces jardins urbains sont très prisés, notamment par des familles en situation de précarité. "Les jardiniers font une économie qui va de 400 à 1 000 € de frais alimentaires par an, donc ce n'est pas négligeable", explique Mamadou Ly. Cela concerne principalement "des familles qui sont démunies, des retraités, des familles monoparentales, des femmes seules qui viennent pour cultiver leur jardin et diminuer leurs charges alimentaires."
Aux Champs Dolents aussi, le local des jardiniers a subi les assauts d'un pied de biche. Les dommages sont bien visibles. "On voit nettement le pied de biche qui a été mis là, à plusieurs endroits", montre Brigitte Lauff, présidente des Jardins familiaux des Champs Dolents. Elle raconte que le premier jardinier venu, avant de se rendre au travail, a vu la porte du local grand ouverte. "Il a dit : non, Brigitte n'est pas là à 6h30 du matin. Il a appelé la police qui est venue".
Son bureau n'a pas été cambriolé et pour ça, Brigitte Lauff a une explication : "quand on rentre, les voitures sur les graviers, on les entend. S'ils étaient à l'intérieur, ils n'ont pas eu le temps de prendre et de sortir avec tout le matériel". Elle se réjouit que rien n'ait été pris, ni l'argent sur la table, ni la photocopieuse : "ils ont juste tout retourné". Christian Marechal, habitant et jardinier, suppose que si les cabanes n'ont pas été volées, "c'est peut-être qu'ils sont venus voir pour revenir après".
"Ce qui nous fait mal au cœur, c'est qu'on fait quand même du bénévolat, on est là pour tous nos jardiniers", regrette la présidente, ce qui l'amène à penser qu'il ne s'agit pas de l'œuvre d'un jardinier. "S'attaquer à des gens qui ont besoin de leur jardin pour se nourrir, c'est malheureux. Je ne sais pas à quoi ils pensent, je sais que la vie est dure, mais à ce point-là..."
Une enquête en cours
Mamadou Ly souligne que ces jardins familiaux sont moteurs et vecteurs de solidarité. "On pénalise des personnes qui n'ont rien demandé, qui ont juste demandé à cultiver, à passer le temps, à faire du jardinage" et qui tentent d'aider leur famille. En effet, après les récoltes, quand il y a du surplus, les jardiniers mettent des bacs à l'extérieur pour permettre à la population de se servir. "Même la population qui n'a pas de lien de parenté avec eux peut éventuellement bénéficier de ces récoltes-là, je trouve que c'est dommage de les handicaper à ce point-là".
Pour le moment, l'enquête est en cours. L'élu s'est déplacé avec le maire de la ville, Frank Pia, "ainsi que le responsable de la sécurité de la police municipale" pour effectuer des vérifications : "on fait tout notre possible pour arrêter ce fléau-là".
Plus de dix motoculteurs ont été volés (à Notre-Dame-du-Thil). Ça représente beaucoup pour les jardiniers et surtout pour les jardiniers retraités qui n’ont pas assez d’argent pour se permettre d’acheter à chaque fois, sachant que les assurances prennent énormément de temps pour rembourser.
Mamadou Ly, adjoint au maire de Beauvais chargé de la vie urbaine et de la proximité
Ensemble, ils réfléchissent aux modalités qui peuvent être mises en place pour éviter que ce genre d'événements ne vienne à se reproduire à l'avenir. "On va demander à la police nationale et municipale de nous aider aussi à faire des rondes au niveau de la ville. Le maire reste attentif par rapport à ce fléau parce qu'il attache beaucoup d'importance à la culture urbaine".
La municipalité continue d'ailleurs le développement des jardins familiaux, "et on ne veut pas que ça devienne un lieu où certains individus viennent piller les biens de ces jardiniers-là, sachant que ce sont des biens qui sont extrêmement chers", comme les motoculteurs, insiste Mamadou Ly.
La Ville a déjà contacté un serrurier et un devis a été fait pour les réparations. "Donc on attend pour l'instant", indique Jacqueline Lesueur. Certains ont déjà remis un verrou en attendant. "C'est vrai que c'est désolant parce qu'on a les sangliers, les inondations... On n'a rien pour nous cette année !"
Avec Laurent Penichou / FTV