La cour d'assises pour mineurs de l'Oise a prononcé une peine de 18 ans de réclusion criminelle, dans la nuit du vendredi 9 au samedi 10 juin, à l'encontre du jeune homme accusé de l'assassinat de la jeune Shaïna à Creil en 2019. Une peine inférieure aux réquisitions du parquet qui avait demandé la levée de l'excuse de minorité.
Le verdict est tombé tard dans la nuit de vendredi 9 à samedi 10 juin. Le jeune homme, accusé de l'assassinat de Shaïna en 2019, a été condamné par la cour d'assises pour mineurs de Beauvais à une peine de 18 années de réclusion criminelle.
Jugé depuis le 5 juin à Beauvais, l'ex-petit ami de l'adolescente encourait jusqu'à 20 ans, protégé par l'excuse de minorité, car âgé de 17 ans au moment des faits. Au terme de 5 jours de débats, la cour n'a finalement pas suivi les réquisitions du parquet qui avait demandé de lever cette excuse.
Depuis le début du procès, victime selon sa défense d'une "erreur judiciaire", il niait toute responsabilité dans ce drame. À l'énoncé du verdict, il a lancé aux jurés : "Vous avez tort ! Je suis innocent !". Pour son avocate Élise Arfi, "il a explosé, il a été très choqué, ce qu'on peut comprendre à l'annonce d'une peine de 18 ans pour un jeune homme qui vient d'avoir 20 ans".
"La justice n'a pas été à la hauteur"
Pour la famille de la victime, la peine prononcée n'est pas assez lourde. "18 ans ! C'est ça la justice en France !", a réagi le frère de Shaïna, Yasin, en larmes. À l'issue d'échanges tendus avec l'accusé, il a fait un malaise. L'audience a été suspendue et il a été conduit à l'hôpital par les pompiers.
"Je suis très déçue de la justice. La justice n'a pas été à la hauteur des actes qu'il a commis, estime le père de l'adolescente Shakil Hansye, sous le choc à la sortie de l'audience. Poignarder, faire tomber Shaïna, vider l'essence et allumer le feu... il méritait un peu plus. Je suis dévasté."
Shaïna Hansye a été tuée de plusieurs coups de couteau le 25 octobre 2019 à Creil. Son corps avait été retrouvé deux jours après, brûlé à l'essence dans un cabanon de jardin. Pour la violence des faits et le motif - vraisemblablement l'interruption de la grossesse de l'adolescente - le parquet avait demandé à la cour d'écarter l'excuse de minorité de l'accusé et avait requis 30 ans de réclusion criminelle.
Cette décision judiciaire aurait été exceptionnelle en France. Une cour d'assises n'a écarté cette excuse que deux fois depuis sa création en 1945, pour les affaires Patrick Dils et Agnès Marin. Néanmoins pour Me Negar Haeri, avocate de la famille, elle aurait été justifiée dans cette affaire. "La justice l'a traité comme un enfant alors que c'est un crime d'adulte, assure-t-elle. C'est entre huit et quatorze coups de couteau, on en a compté au minimum huit au moment de l'autopsie, c'est le versement de l'essence sur son visage qui respirait encore, et c'est la mise à feu du corps. Il y a à chaque coup de couteau une réitération de la volonté de tuer. Il me semble que c'est un crime grave, un crime d'adulte."
"La justice se fout des violences faites aux femmes"
Et d'ajouter : "Ils n'ont pas voulu écarter l'excuse de minorité, très bien, le plafond était donc de 20 ans. Dans ce cas-là, il aurait fallu le condamner au maximum légal, c'est-à-dire 20 ans. Ces deux ans retirés sont perçus par mes clients comme une offense, je pense à juste titre, étant donné la gravité des faits et le comportement de l'accusé qui est depuis le début dans la contestation en dépit de toutes les charges, de toutes les preuves, et étant donné sa personnalité violente."
Elle analyse ce verdict comme une preuve du désintérêt de la justice sur ce type d'affaires. "La justice se fout des violences faites aux femmes, je pense que c'est ça que ça veut dire, se désole-t-elle. J'ai un sentiment plutôt amer. (...) On ne peut pas rendre une décision de culpabilité dans une affaire aussi grave, et laisser le frère de la victime se faire escorter par les pompiers à l'hôpital parce qu'il a fait un malaise, parce qu'il considère à juste titre qu'il y a un problème." Avec les trois ans et demi de détention provisoire qu'il a déjà effectués, et les potentielles remises de peine dont il pourrait bénéficier, l'accusé "sort dans huit ans", estime-t-elle.
L'accusé comme le parquet ont dix jours pour interjeter appel, ce qui impliquerait la tenue d'un nouveau procès. Une éventualité que la famille de Shaïna se dit prête à affronter.