Lauréat du concours Talents des cités, Ali Haydar Sari s'est fait remarquer grâce à une petite prouesse de technologie : une solution écologique qui permet de rendre des lampes d'éclairages publics autonomes, écologiques et intelligentes. Le premier prototype est en cours de fabrication.
Ali Haydar Sari a peut-être créé une solution écologique et économique que les villes s'arracheront dans les années à venir. Grâce à un "module" de remplacement des lampes d'éclairages publics, il vient de remporter le prix 2022 du concours Talents des cités dans la catégorie Emergence, dont France Télévisions est partenaire.
Arrivé en France en 2001 de Turquie à l'âge de 6 ans, le jeune homme y a fait ses études avant d'intégrer un "master en sécurité internationale spécialité environnement" à Sciences Po Paris.
Mais une fois dans ce Master, il se pose des questions sur son avenir. "Je me suis intéressé aux questions environnementales et aussi à l'entreprenariat", explique-t-il. Il réalise des stages dans l'humanitaire, la recherche.
"J'avais commencé à travailler pendant le master en analyses de risques et quand il y a eu le Covid, je me suis dit que le meilleur moyen de vraiment apprendre l'entreprenariat, c'est avec mes deux frères, Adnan et Kenan et j'ai eu une proposition de leur part", souligne Ali Haydar Sari. L'un travaille dans le bâtiment et l'autre est commercial.
Le point de départ : l'absence d'éclairage public à Nogent-sur-Oise pendant l'été 2021
Mais tout commence réellement pour lui durant l'été 2021 : "la mairie de Nogent-sur-Oise a décidé de complètement couper l'éclairage public". Pendant plus de deux mois, "on n'avait pas du tout d'éclairage public sur la commune et j'ai commencé à m'intéresser au sujet".
Il participe ensuite à un salon écologique organisé par la commune "où ils expliquaient leur démarche". Il y rencontre aussi le chargé de transition écologique. "Il a mis en avant des arguments écologiques mais également des arguments économiques parce que l'éclairage public coûte cher à la commune". Ali Haydar Sari se rend alors dans d'autres communes à proximité et se rend compte qu'elles s'intéressent aussi à ce sujet.
La commune de Saint-Leu d'Esserent avait décidé de passer aux leds intelligents. Je trouvais la démarche intéressante. Le led intelligent réduit la puissance quand il n'y a pas de passage et met la puissance maximale quand il y a du passage
Ali Haydar Sari, lauréat 2022 des Talents des cités
Il réfléchit alors, fait des recherches auprès de l'Ademe et des associations, tout en s'appuyant sur des études menées par la Région. "J'ai essayé de comprendre les enjeux et c'est là que j'ai commencé à développer la solution que propose Sofrelis", son propre projet entrepreneurial, indique-t-il.
"Des modules pour optimiser l'éclairage public existant"
Ali Haydar Sari trouve une solution : "proposer des modules pour optimiser l'éclairage public existant". Ceux-ci associent "des panneaux voltaïques, des mini-batteries, un éclairage de leds intelligent et tout ça, dans un système dans la verticale et à 360°".
Ces modules sont évolutifs, c'est-à-dire qu'ils permettent non seulement de rendre le candélabre existant entièrement autonome "donc écologique et intelligent", mais également "de se lancer dans une vision à long terme de villes connectées pour pouvoir plus tard ajouter des modules cette fois-ci connectés".
Il peut y avoir plusieurs systèmes. On peut programmer la puissance de l’éclairage, les créneaux horaires ou encore adapter la lumière en fonction du passage.
Ali Haydar Sari, lauréat 2022 des Talents des cités
Parmi les exemples qu'il cite, "on peut avoir des modules qui vont pouvoir réinjecter le surplus d'électricité dans le réseau public qui existe déjà". Mais aussi "des modules signalétiques" pour informer les automobilistes de leur vitesse, "ou encore les modules pour préciser aux habitants la qualité de l'air sur une zone donnée". En somme, c'est un module qui peut s'adapter (presque) à l'infini.
L'une des différences avec les systèmes autonomes qui existent déjà sur le marché, "c'est que c'est un système dans la verticale qui permet de transformer le candélabre existant, de profiter de sa surface pour la rendre utilisable et générer de l'électricité".
"J'ai appris tout seul par passion"
Ali Haydar Sari est un passionné et cette innovation n'est que le fruit d'un long chemin parcouru. "J'ai appris énormément de choses tout seul : informatique, logiciels... Le serveur qui est ici par exemple, c'est moi qui l'ai installé. Tout le système de câblage, c'est moi, je gère tout seul, détaille-t-il. J'ai appris tout seul par passion".
Alors, voir que tout ce travail finit par payer, le motive davantage. Ce prix Talents des cités, "c'est d'abord une reconnaissance du projet, ça m'ouvre des portes pour le futur, ça me permet d'apporter une réputation au projet" et d'aller voir d'autres communes et structures comme le ministère chargé de la ville.
Ce prix permet d’être plus solide, plus résilient pour la suite. Pour un entrepreneur, la résilience, c’est des hauts et des bas. Ce genre de prix, quand il y a des bas, ça permet de ne pas lâcher l’affaire.
Ali Haydar Sari
En pleine phase de structuration du projet "sur tous les plans"
Actuellement, Ali Haydar Sari fait partie du village by CA Paris, le centre d'innovation, d'accélération et d'incubation du Crédit Agricole, opérateur de French Tech Tremplin. Ce programme du gouvernement permet "d'aider les entrepreneurs pour préparer la phase d'incubation, de garantir l'égalité des chances et de la diversité dans le monde de l'entreprenariat".
Il est en ce moment au stade "de préparation de la phase incubation". En d'autres termes, c'est "la phase de structuration du projet sur tous les plans, à 360°" et le but consiste à préparer le dossier d'incubation pour avoir "une structuration solide". Il peut compter sur l'aide de personnes dont "la pertinence" lui permet d'avancer et de voir plus loin.
Le programme du village by CA Paris dure deux mois et accompagne 12 lauréats de French Tech Tremplin dans le lancement de leur projet, "notamment sur l'étude de marché, le développement de leur solution et sur la préparation de la commercialisation", ajoute Audrey Vandersteen, responsable de l'accompagnement start-up au village by CA Paris.
On leur apprend également à aller à la rencontre de leur marché, leurs potentiels utilisateurs "pour être sûrs qu'ils débutent leur projet sur des bases solides" et qu'ils répondent réellement à "un problème vraiment partagé sur le marché".
Le projet d’Ali est clairement très prometteur. On le voit bien, il a déjà une belle attractivité dès le lancement. Il a déjà des collectivités qui répondent positivement à des potentiels tests sur leur territoire. Nous, on y croit beaucoup et on a envie de l’accompagner sur tous ces sujets-là pour qu’il puisse avoir ces bases solides qui lui permettront de se développer rapidement et efficacement.
Audrey Vandersteen, responsable de l’accompagnement start-up au village by CA Paris
Le prix Talents des cités "nous convainc encore plus sur le fait que d'autres personnes y croient et on va d'autant plus l'accompagner en profondeur pour qu'il puisse se développer au plus vite", se réjouit-elle.
Pendant ce temps, Ali Haydar Sari, qui prépare le projet sur papier, travaille également sur le prototype. Et grâce au village by CA Paris et au jury de Talents des cités, "on sait très vite de quoi on parle. C'est quelque chose qu'on ne pourrait pas faire tout seul dans son bureau", conclut-il.