La maire de Noyon (Oise), Sandrine Dauchelle, est sous le feu des critiques de la part de nombreux élus pour la gestion de ses finances et ses dépenses qui plongent sa commune dans un déficit important. Celle-ci se défend notamment en expliquant avoir repris une mairie et une communauté de communes dans "une situation financière catastrophique".
Sandrine Dauchelle, maire et présidente de la communauté de communes de Noyon (Oise), fait face au mécontentement de nombreux élus et d'habitants. Ils lui reprochent une mauvaise gestion de ses finances, des dépenses, qui plonge la commune dans un important déficit.
Parmi les points les plus contestés, on retrouve une baisse des subventions aux associations de 100 000 €. Celles-ci sont mobilisées depuis plusieurs mois et certains la narguent même sur les réseaux sociaux pour exprimer leur ras-le-bol.
"C'est un bateau sans chef"
Lorsqu'on lui demande quelle est la situation dans la communauté de communes de Noyon (CCPN), Thibault Delavenne, maire (SE) de Guiscard et conseiller départemental, ne mâche pas ses mots : "c'est un bateau sans chef". La maire n'a plus de délégations depuis le 8 novembre dernier. Plusieurs élus viennent de déposer une lettre demandant la modification du bureau communautaire pour exercer la gouvernance à terme, "parce que c'est très compliqué".
De nombreux élus lui reprochent également de ne pas les écouter : "le nombre de fois où nous l'avons interpellée par rapport à des questions bien précises, elle n'y répond jamais ou elle fait tout le contraire". Il se dit néanmoins "heureux" puisque la chambre régionale des comptes "vient enfin de prendre la main". Ils attendent "avec impatience le résultat de la réalité financière" du Pays Noyonnais qui doit être révélé vendredi 13 décembre lors d'un conseil communautaire. Thibault Delavenne voudrait notamment en savoir plus sur la situation dans laquelle se trouve la communauté de communes, "parce que quand vous voyez 1,7 million d'euros de dépenses supplémentaires sur le service du personnel pour 2024, ça choque".
Tout le monde s’en va et tout le monde a peur de la terreur de la gestion de la communauté de communes. Vous ne pouvez pas imaginer le nombre de personnes qui travaillent à la CCPN qui ont peur du nouveau directeur général des services qui vient d’arriver.
Thibault Delavenne, maire (SE) de Guiscard et conseiller départemental de l'Oise
Au-delà de la gestion du budget, l'élu pointe aussi du doigt "une détresse des ressources humaines au niveau de la CCPN. Il n'y a plus personne dans le bateau, les DGS ont été virés du jour au lendemain". Aussi, six vice-présidents du conseil communautaire ont démissionné collectivement au mois d'octobre dernier. Finalement, son but à lui et aux 38 maires qui l'accompagnent (sur les 41 de la communauté de communes) est de lui faire comprendre "que ce serait bien qu'elle s'en aille, mais elle n'a pas compris et ne veut pas comprendre".
La prochaine étape ? Lui retirer ses indemnités et de recomposer le bureau communautaire "pour prendre la main sur elle".
"Les finances de la ville étaient saines jusqu'en 2020"
Ancien maire de Noyon et conseiller municipal d'opposition (Renaissance), Patrick Deguise souligne que la situation dans la commune de 13 000 habitants est inédite. "Madame la maire s'est inventé un parcours universitaire et un parcours professionnel, elle continue de mentir aux Noyonnais sur l'état des finances qui est aujourd'hui catastrophique". Selon lui, contrairement à ce que l'édile écrit dans son bilan, "les finances de la ville étaient saines jusqu'en 2020, au moment où on lui a remis les clés".
Au niveau de la municipalité, très concrètement, on reproche à Sandrine Dauchelle des dépenses excessives sur la communication et les cadeaux. "La preuve en est, c'est que cette ville, c'est en gros 20 millions d'euros de recettes. Vous ne dépensez pas les 20 millions parce qu'il faut quand même garder une réserve pour rembourser l'annuité d'emprunt". Mais selon lui, depuis 2021, Sandrine Dauchelle dépense l'intégralité des recettes de fonctionnement : "quand vous avez une annuité d'emprunt à 2,8 millions d'euros, vous multipliez par 4 et vous arrivez à 12 millions de déficit qu'on constate aujourd'hui".
Patrick Deguise assure d'ailleurs ne pas instrumentaliser la situation pour se positionner pour les élections municipales de 2026. "Il y aura un gros travail, une préparation à faire et si quelque part, je peux être utile, je pourrai sacrifier quelques années de ma vie pour aider cette ville à repartir sur de bons rails, nous en déciderons au moment voulu".
Madame Dauchelle, ce qu'on lui reproche, c'est plutôt que de fédérer les agents, elle les a méprisés, elle en a fait partir, tenez-vous bien, 82 depuis son arrivée.
Patrick Deguise, ancien maire de Noyon et conseiller municipal d'opposition (Renaissance)
"On a repris une gestion qui n'est pas mirobolante"
Philippe Basset, maire (SE) de Varesnes et vice-président de la communauté de communes du Pays Noyonnais, reste l'un des rares soutiens de Sandrine Dauchelle. "C'est une présidente qui a été élue démocratiquement depuis quatre ans et demi et elle tient à le rester parce qu'on travaille". Il s'est dit surpris de la démission de six autres vice-présidents, "alors qu'ils avaient signé un courrier comme quoi on travaillait bien main dans la main, il y a trois mois de ça".
Mais alors, pourquoi reproche-t-on tant à la maire ? "Vous savez, dans les écuries, les chevaux, quand il n'y a plus d'avoine, ils se battent, et là, c'est qui se passe". Il rappelle que "financièrement parlant", la nouvelle équipe avait repris une gestion de l'intercommunalité qui "n'était pas mirobolante". Le maire de Varesnes affirme qu'il la soutiendra jusqu'au bout, "parce que c'est la démocratie".
Non, le budget 2024 n’a pas été retoqué. En fait, quand le budget de l’intercommunalité n’a pas été voté par l'ensemble des élus, il y a eu un contrôle du budget de la ville, et 98% n’a pas été retoqué.
Sandrine Duchelle, maire de Noyon
Interrogée sur le plateau d'ICI 12/13 Picardie ce lundi 9 décembre, Sandrine Dauchelle déplore "beaucoup de rumeurs et de fake news qui tournent autour de Noyon, et c'est juste inadmissible". Elle se défend en expliquant avoir "repris" la municipalité et la communauté de communes en 2020 dans "une situation financière catastrophique, avec un endettement record de 29 millions d'euros". Elle assure avoir "remis un peu d'ordre" à un moment où les Noyonnais voulaient du changement.
L'élue ajoute ne pas avoir autant dépensé que ce que ses opposants avancent. Au contraire, d'après ses dires, elle aurait mis fin à des dépenses extravagantes. "On disait toujours : la folie des grandeurs de Deguise. C'est terminé avec moi, c'est pour ça que ça ne plaît pas à certains".
"En trois ans, je ne peux pas faire des miracles, donc évidemment, on maintient du service public, on fait quelques investissements et on essaie de redorer l'image de Noyon". Néanmoins, tout ça ne peut pas être fait "en un claquement de doigts, surtout quand on arrive et qu'on subit la crise de la Covid et de l'énergie, et qu'on passe de factures de 860 000 à 2,2 millions d'euros". Pour elle, tous ces paramètres sont à prendre en compte. "Au fil du temps, on a désendetté la ville de 5 millions d'euros, on va continuer, mais tout ça doit aussi être le fait d'efforts et là, avec ma nouvelle administration, on remet tout sur les rails, mais on ne peut pas faire des miracles en trois ans", conclut-elle.
Avec Vincent Le Goff / FTV