Pendant plus de 20 ans, il a oeuvré au développement et au rayonnement de sa ville de Loos-en-Gohelle. Jean-François Caron, "écolo au pays des gueules noires", a passé la main ce 2 avril après trois mandats. Il a notamment été l'artisan de l'inscription du bassin minier au patrimoine de l'Unesco.
Ce dimanche 2 avril est une journée chargée d'émotions pour Jean-François Caron. Le maire écologiste de Loos-en-Gohelle a passé la main après 22 ans de services, confiant les rênes de sa mairie à son premier adjoint, Geoffrey Mathon.
Cet "écolo au pays des gueules noires", maire de sa ville natale depuis 2001, a profondément transformé le paysage de sa commune et marqué l'Histoire de la politique locale.
"Quelques phrases" pour dire au revoir
La salle était comble ce 2 avril, pour l'au revoir des Loossois à leur maire historique.
"Je voulais juste vous dire quelques phrases. Aujourd'hui, c'est la journée de Geoffrey, ce n'est pas la mienne, donc je vais faire court" a-t-il entamé très ému. Il a exprimé sa totale confiance envers celui qui reprend son siège, compagnon de route depuis une vingtaine d'années. Après lui avoir fait cadeau d'une statuette qui lui avait été offerte en 2001 par le personnel de la mairie, Jean-François Caron a pudiquement rendu le micro.
Les premiers mots du discours de Geoffrey Mathon eux, ont aussi été pour Jean-François Caron et son "investissement sans faille". Le nouveau maire a demandé à ses administrés de l'applaudir encore, sonnant le début d'une nouvelle ovation.
"La première chose que je ressens, pour être franc, ce sont des tonnes qui s'enlèvent de mes épaules. La responsabilité de maire, ça veut dire être présent pour tout et c'est lourd sur le temps long. La deuxième chose, c'est la fierté. D'abord pour cette passation réussie, qu'on prépare depuis des années puisqu'on s'est présentés en duo mais aussi de tout ce qui a été fait à Loos-en-Gohelle" a confié l'élu sur le plateau de France 3, le soir même de la passation de pouvoir.
Loos-en-Gohelle, laboratoire écologique
Avec lui aux manettes, Loos-en-Gohelle a montré qu'en plus d'avoir un riche passé, elle pouvait s'offrir un bel avenir. De cette commune minière, Jean-François Caron et son équipe ont fait un laboratoire de la transition énergétique en multipliant les initiatives concrètes, accessibles et participatives.
Rénovations énergétiques avant l'heure, éco-constructions, récupération de l'eau, aménagement d'une ceinture verte autour de la commune... Jean-François Caron a créé un cercle vertueux et, sans le savoir, aménagé un créneau touristique.
Des scientifiques, des militants, des élus ou de simples curieux viennent chaque année dans la commune admirer la façade sud du toit de l’église Saint-Vaast, couverte de panneaux photovoltaïques.
"On a prouvé que c'était possible de faire une écologie du quotidien, qui diminue les charges des habitants, qui améliore la planète et qui apaise. Aujourd'hui, on présente l'écologie sous un jour vindicatif mais j'ai montré qu'en travaillant avec les gens, on construit des réponses adaptées" plaide Jean-François Caron sur le plateau de France 3.
Il a aussi montré qu'un tel projet pouvait emporter l'adhésion, réélu successivement depuis 2001 avec des scores allant jusqu'à 82% des suffrages, voire 100% quand il s'est présenté sans adversaire.
"On m'a proposé d'être ministre, mais si c'est pour être marginal et rester un alibi, ça ne m'intéresse pas. Donc, je n'ai pas voulu y aller. Changer les choses avec les habitants, c'est ça mon Everest à moi. On a montré qu'on peut créer l'adhésion populaire, c'est ça, aller haut, pour moi."
"Incontestablement, c'est ma plus grande fierté."
Son énergie et son dévouement n'ont pas profité qu'à sa commune de Loos-en-Gohelle. Il a été l'artisan de l'inscription du bassin minier au Patrimoine mondiale de l'Unesco, en 2012. Une oeuvre de préservation du patrimoine entreprise par son père, Marcel Caron, ancien maire PS de la ville. Jean-François Caron avait très tôt repris ce combat, en créant en 1989 l'association La chaîne des terrils.
A Saint-Pétersbourg (Russie), où l'Unesco accepte la candidature du bassin minier, le discours de Jean-François Caron marque les esprits. "Merci pour tous les mineurs et leurs familles. Cette inscription, ce n’est pas un détail de notre histoire, c’est notre histoire. Chez nous, les paysages ne sont pas faits de granit rose, de mers limpides ou de sommets aux neiges éternelles. Chez nous, l’homme a creusé, a extrait, a construit des montagnes."
"Incontestablement, c'est ma plus grande fierté. Que les mineurs soient à l'égal des rois au niveau du patrimoine mondial, c'est l'oeuvre de ma vie" estime encore aujourd'hui l'ancien maire de Loos-en-Gohelle.
"On veut montrer qu'on peut faire système"
Jean-François Caron dit au revoir à la mairie du Pas-de-Calais mais pas à ses ambitions pour l'avenir des territoires et de la planète. Son énergie va désormais se concentrer sur ses fonctions à direction de la Fabrique des Transitions.
Cette alliance est composée de divers acteurs - collectivités territoriales, entreprises, associations - qui veulent mutualiser leurs expériences pour mettre en place des solutions à grande échelle.
Alimentation, nouveaux modèles économiques, ingénierie, transition écologique et sociale... Les chantiers sont nombreux et il ne fait aucun doute que la longue expérience de Jean-François Caron sera appréciée.
"C'est un changement d'échelle par rapport à ce qui s'est fait à Loos-en-Gohelle, avec d'autres communes de France. On veut montrer qu'on peut faire système, il faut accélérer face à la dégradation de notre planète", appelle le militant écologiste.