La maire du village de Molain dans l'Aisne a attiré l'attention du public sur le carrelage de l'église. Il porte des croix gammées que la transmission orale attribue à un architecte nazi pendant la Deuxième Guerre mondiale. Entre svastika et croix gammées, ce n'est pas si évident.
La maire de Molain, Marie-Christine Caron, se sent un peu dépassée. Quand elle a évoqué dans le bulletin municipal les symboles du carrelage de l'église de son village, elle souhaitait relayer l'histoire locale. Elle craint maintenant que des néonazis ne s'intéressent à son église, ouverte une fois par an à l'occasion du 15 août.
À Molain, le bruit court que Charles Joray, l'architecte molinois chargé de la restauration de l'église dans les années 1930, épousait les thèses hitlériennes. Il aurait ainsi voulu rendre hommage au nazisme en représentant intentionnellement des croix gammées sur le sol.
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Or à bien y regarder, les croix suspectes ne sont pas toutes identiques : certaines sont tournées vers la droite, sur le modèle hitlérien, mais d'autres sont ouvertes sur leur gauche. Elles ressemblent donc à des svastikas, un symbole largement antérieur au nazisme. On le retrouve d'ailleurs dans plusieurs églises construites à partir du XVIIIe siècle, nous a fait remarquer Jean-Charles Cappronnier, conservateur du patrimoine et spécialistedes églises de l'Aisne après la Première Guerre mondiale.
Avant que le nazisme ne s'en empare, la svastika circulait déjà dans de nombreuses cultures : tantôt signe de force, tantôt référence à un dieu, utilisée à la fois par les chrétiens et les bouddhistes.
En 1920, Adolf Hitler tourne la croix vers la droite et l'incline de 45° pour en faire l'étendard du parti nazi. La domination et l'horreur du Troisième Reich imposera donc dans les esprits occidentaux la croix gammée comme emblème du fascisme, gommant toutes ses autres significations culturelles et historiques.