Polémique sur le burkini : beaucoup de bruit pour... aucune contravention

Deux communes du Pas-de-Calais ont pris un arrêté pour interdire le burkini sur leurs plages. Mais aucune contravention n'a été dressée pour le moment. Sur la trentaine de communes en France qui sanctionnent désormais le port de ce maillot, seules Nice et Cannes ont annoncé des verbalisations.

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La polémique sur le burkini, ce maillot qui recouvre en grande partie le corps, n'en finit pas d'enfler depuis le 13 août. C'est à cette date qu'une violente rixe a éclaté à Sisco en Corse entre des vacanciers de Bastia d'origine maghrébine et des habitants du village. Des témoins affirment que des femmes se baignaient en burkini dans la crique "privatisée" par les personnes d'origine maghrébine. 

Le maire socialiste de Sisco a pris le 16 août un arrêté pour interdire le port du burkini sur ses plages. Le procureur de Bastia a indiqué quelques jours plus tard qu'il n'y avait pas de burkini à Sisco ce jour-là, simplement une altercation violente suite à la "privatisation" de la plage (voir encadré ci-dessous).

Mais cela n'a pas empêché une trentaine de villes de prononcer des interdictions du burkini. Ce jeudi, le Conseil d'État étudie la légalité d'un de ces arrêtés, pris le 3 août à Villeneuve-Loubet (Alpes-Maritimes), avant la polémique de Sisco. De son côté, la presse étrangère parle du débat sur le burkini comme d'une "idiotie" et d'un "acte de fanatisme insensé".

L'interdiction du burkini, un "fanatisme insensé" et une "idiotie" pour la presse anglo-saxonne

Après ceux de Cannes et Villeneuve-Loubet, sur la Côte d'Azur, ou celui de Sisco, en Corse, le maire du Touquet, dans le Pas-de-Calais, compte à son tour prendre un arrêté interdisant le burkini sur les plages de sa commune. Faut-il bannir cette tenue de bain qui couvre le corps et la tête des femmes musulmanes du littoral hexagonal ?

 


Quelles sont les villes qui ont pris des arrêtés anti-burkini ?

Plus de 30 communes littorales françaises ont pris des arrêtés dits "anti-burkini". Ce sont majoritairement des communes situées dans le sud-est de la France et en Corse. Mais deux maires du Pas-de-Calais, à Oye-Plage et au Touquet, ont aussi décidé de prendre un arrêté. 

Le député-maire LR du Touquet Daniel Fasquelle a annoncé sa décision le mardi 16 août, tout en précisant qu'il n'avait jamais vu de burkini sur les plages de sa ville. Il précise toutefois que le parc aquatique de la ville a rapporté une dizaine de cas de personnes portant un burkini. Mais l'arrêté pris par le maire ne concerne que la plage, précise La Voix du Nord. Chaque contrevenant risque une amende de 38 euros.

"Chacun a droit à avoir ses convictions, mais de là à les exposer sous quelque forme que ce soit, y compris de manière vestimentaire très identifiée, là ça commence à être génant", se justifie le maire socialiste de Oye-Plage, Olivier Majewicz.

Yann Fossurier, Sébastien Gurak

De son côté la maire de Calais, Natacha Bouchart, s'était donné quelques jours de réflexion pour décider ou non de prendre un arrêté similaire. Elle a finalement indiqué que ce ne sera pas le cas dans sa commune.

Des villes de la région réfléchissent tout de même à une interdiction dans les piscines municipales. Le maire LR de La Madeleine, Sébastien Leprêtre, a annoncé vouloir faire modifier le règlement de la piscine pour exclure le maillot polémique, comme l'indique La Voix du Nord.

Des contraventions ont-elles été dressées ?

La rédaction de franceinfo a interrogé chacune des mairies ayant pris des arrêtés. Seules deux communes, Cannes et Nice, ont dressé des PV. Dans le Pas-de-Calais, aucune verbalisation n'est à noter, que ce soit au Touquet ou à Oye-Plage. Commentaire de la mairie de cette dernière commune : "Aucune remontée, aucune remarque, aucun burkini." 

La carte des villes ayant pris un arrêté interdisant le burkini :

Les points sont colorés selon la sensibilité politique des maires ayant pris des arrêtés "anti-burkini". La légende de la carte est accessible dans le volet latéral.

D'où vient la polémique sur le burkini ?
Tout est parti d'une altercation à Sisco (Corse) entre des vacanciers d'origine maghrébine venus de Bastia, et des habitants du village de Sisco. Le ton monte et une violente rixe éclate dans la soirée du samedi 13 août. Cinq personnes sont blessées, plusieurs véhicules incendiés. Le ministre de l'intérieur, Bernard Cazeneuve, appelle au calme dans un communiqué envoyé dans la nuit du 13 au 14 août.

Une jeune fille mineure, témoin des affrontements, s'est exprimée au lendemain de la rixe, dimanche 14 août. Elle a indiqué qu'elle avait éclaté alors que plusieurs femmes qui se baignaient en burkini étaient prises en photo par des touristes. Des insultes ont été proférées par un groupe de jeunes gens d'origine maghrébine, selon la jeune témoin.

Le mardi 16 août, le maire socialiste de Sisco, Ange-Pierre Vivoni, prend un arrêté interdisant le burkini. L'arrêté s'inspire de mesures prises précédemment à Cannes ou à Villeneuve-Loubet le 28 juillet et le 3 août. Il interdit "l'accès aux plages et à la baignade [...] à toute personne n'ayant pas une tenue correcte, respectueuse des bonnes moeurs et de la laïcité."

Mais le procureur de la République de Bastia, Nicolas Bessone, explique trois jours plus tard, jeudi 18 août, que les femmes ne portaient pas de burkini. Il explique qu'"à l'évidence, à l'origine des incidents se trouvent des membres de la famille maghrébine. Ils ont voulu, dans une logique de caïdat, s'approprier la plage et la privatiser." Le procureur de Bastia ajoute que cette situation a débouché sur une altercation avec les habitants du village, mais sans être liée au burkini.
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