En décembre, la Cour de Cassation avait confirmé l'abandon des poursuites contre d'anciens responsables du "Comité permanent amiante"
Le combat contre un "naufrage judiciaire annoncé" continue: des victimes de la contamination à l'amiante et notamment celles de Normed Dunkerque, lancent une nouvelle action pour obtenir un procès des responsables nationaux du scandale sanitaire qu'elles réclament depuis la première plainte, il y a 23 ans.
L'association des victimes de l'amiante et des autres polluants (AVA) va déposer d'ici à "fin février" une citation directe collective devant le tribunal correctionnel de Paris, une première dans ce long feuilleton judiciaire.
"Catastrophe sanitaire"
Son but : obtenir d'ici à "un an, un an et demi" un procès pénal des responsables nationaux de cette "catastrophe sanitaire" qui fait "3.000 victimes par an", ont annoncé mardi ses avocats Antoine Vey et Eric Dupond-Moretti lors d'une conférence de presse.Cette procédure rapide permet de saisir directement le tribunal sans passer par une instruction pénale. A charge pour les plaignants de collecter et de présenter les éléments de preuve à l'audience. "Des éléments sur lesquels la justice aurait dû s'arrêter et elle ne l'a pas fait", a indiqué Eric Dupond-Moretti regrettant une forme d'"inertie judiciaire".
La citation directe visera les protagonistes qui ont "anesthésié" les services de l'Etat dans les années 1980 et 1990 "pour faire reculer au maximum l'interdiction de l'amiante", finalement intervenue en France en 1997 alors que son caractère cancérogène était connu depuis les années 1970, selon les avocats.
Dans leur viseur : d'anciens membres du comité permanent amiante (CPA) décrit dans un rapport sénatorial de 2005 comme un "lobby remarquablement efficace" de l'amiante et le promoteur de "l'usage contrôlé" du minéral.
Un "lobby" dans le collimateur
Dissous en 1995, il comptait dans ses rangs des industriels, des décideurs publics, des scientifiques et des membres d'organisations professionnelles. Huit anciens membres du CPA ont été mis en examen avant de voir leurs poursuites annulées par deux fois. Et en décembre, la Cour de cassation a confirmé définitivement l'abandon des poursuites, ouvrant la voie à un non-lieu pour ces protagonistes.Avec ce nouveau front judiciaire, les victimes espèrent organiser "un débat public et contradictoire sur ces éléments de preuve qui établissent selon nous un certain nombre de responsabilités pénales ayant rendu possible le scandale de l'amiante", a expliqué Antoine Vey.
"Il est inadmissible qu'une catastrophe sanitaire qui fait entre 100.000 et 200.000 victimes à la fin ne débouche pas sur un procès pénal", a commenté Michel Parigot, président du Comité anti-amiante Jussieu, du nom du campus universitaire d'où était partie la première plainte en 1996.