"C'est une bouffée d'oxygène importante" : papotage, ateliers yoga, aide administrative, ce tiers-lieu est dédié aux aidants

Depuis le 1ᵉʳ octobre 2024, le tiers-lieu "Autrement" à Amiens, offre aux aidants un refuge dans lequel venir partager son histoire et ses doutes autour d'un café, prendre du temps pour soi le temps d'un atelier de yoga et être aidé dans ses démarches administratives. Un lieu convivial et nécessaire pour des personnes qui consacrent une grande partie de leur vie à aider un proche.

Le local ressemble en tout point à un appartement. Une grande table accueillante dans la salle à manger, une bibliothèque chargée de livres, des plantes et de la décoration, un salon confortable, une cuisine où mijote un plat savoureux… C'est ainsi que le tiers-lieu "Autrement" a été pensé. Comme un refuge convivial et informel dans lequel les aidants peuvent venir partager leur quotidien autour d'un repas ou décompresser le temps d'une après-midi.

"Pouvoir s'exprimer sans jugement"

Depuis le 1^er octobre, dans le quartier St-Leu d'Amiens, il accueille tous les aidants et les aidantes qui souhaitent venir y passer un peu de temps. "On s'aperçoit que les aidants ont parfois juste besoin de se poser dans un endroit ailleurs qu'avec l'aidé, de dire que ça ne va pas, d'échanger. On est tout seul quand on est aidant. On se pose plein de questions", observe Marie-Christine Bonnentien, aidante et bénévole au tiers-lieu "Autrement".

Ça m'a permis de m'apercevoir que oui, j'avais le droit d'être en colère, oui, j'avais le droit de ne pas savoir, oui, j'avais le droit de demander de l'aide.

Marie-Christine Bonnentien, aidante et bénévole au tiers-lieu "Autrement"

Après s'être occupée de ses beaux-parents et de son père, Marie-Christine aide désormais sa mère vieillissante. "Les papotages que l'on fait avec les aidants, ça m'a permis de m'apercevoir que oui, j'avais le droit d'être en colère, oui, j'avais le droit de ne pas savoir, oui, j'avais le droit de demander de l'aide", confie-t-elle. "Ce lieu permet de pouvoir s'exprimer sans jugement et sans formalisme", résume Marie-Christine.

Des ateliers pour prendre du temps pour soi

Dans ce tiers-lieu, ouvert de 12h à 18h, les aidants et les aidantes peuvent partager un café, travailler ou bien se détendre à travers des ateliers variés et gratuits. En ce mercredi 9 octobre, Corinne Sara sort d'un atelier yoga au cours duquel elle a notamment pu faire quelques exercices de respiration au son du chant d'un bol tibétain. Pendant quatre ans, Corinne s’est occupée de ses deux parents atteints d'Alzheimer. L'an dernier, son père est décédé et sa mère a été placée en unité spécialisée.

Cette après-midi-là, Corinne prend donc un peu de temps pour elle. "Ça fait 10 mois qu'elle est placée… Je commence à essayer de reprendre des activités : la marche, l'aquagym, le yoga, la gym douce pour essayer aussi de faire bouger mon corps", souligne-t-elle. Les ateliers agissent comme "un booster d'énergie" pour Marie-Christine. "Quand on repart, on est content, on a fait autre chose qu'aider nos aidés. C'est une bouffée d'oxygène importante", appuie-t-elle.

Une aide administrative "en dehors des bureaux"

Pour certaines personnes, être aidant est un engagement à plein temps, 24h/24, qui épuise aussi bien moralement que physiquement. Outre les sessions "papotage" et les ateliers, le tiers-lieu propose aussi une aide administrative, une partie qui peut s'avérer un casse-tête pour beaucoup d'aidants.

"On a cette volonté d'accueil inconditionnel, mais on est aussi un pôle qui peut donner de l’aide administrative directe, des conseils et de l'orientation vers l'ensemble du territoire. L'objectif, c'était qu'on soit en dehors des bureaux, de quelque chose d'institutionnel, que ce soit simple", pointe Juliette Barnoud, à l'initiative du projet "Autrement" et chargée de développement à l'Union départementale des associations familiales (USAF) de la Somme.

Le tiers-lieu a été co-construit avec plusieurs partenaires, notamment l'UDAF, la maison départementale des personnes handicapées, l'assurance maladie, le Département et les associations d'aidants. Il se veut complémentaire des 24 plateformes d'accompagnement et de répit qui existent dans la région.

En France, le gouvernement estime que les aidants représentent entre 8 et 11 millions de Français, dont 310 000 aident un proche de 60 ans et plus dans les Hauts-de-France, selon l'Agence régionale de santé. La majorité (57 %) sont des femmes.

Avec Rachel Desmis / FTV