La broderie a été confectionnée sous le règne de Louis XIV par les Ursulines d'Amiens pour servir à l'ornement de leur chapelle. Elle est restée dans leur couvent jusqu'en 1904. Un retour aux sources qui mettra en lumière un savoir-faire local méconnu.
Pour la première fois, le musée de Picardie lance une campagne de financement participatif pour l'acquisition d'une broderie, unique en son genre. Confectionné au XVIIe siècle sous le règne de Louis XIV, cet objet a été brodé par les soeurs Ursulines elles-mêmes pour l'ornementation de leur couvent, situé alors rue des Jacobins à Amiens, à la place de l'actuelle gendarmerie. Il y restera jusqu'en 1904, date à laquelle les Ursulines ont dû quitter la France, suite aux lois qui ont conduit à la suppression de nombreuses congrégations religieuses.
"C'est un objet qui théoriquement n'aurait jamais dû quitter la ville, déclare François Séguin, conservateur du patrimoine. Il est naturel de le voir revenir ici sauf qu'au lieu d'être dans un couvent, il sera exposé à tout le monde et deviendra le patrimoine commun de tous les Amiénois. Il a vraiment sa légitimité à revenir ici après une parenthèse de 120 ans."
Un chef-d'oeuvre technique de la broderie
Au XVIIe siècle, les Ursulines d'Amiens avaient porté l'art de la broderie à un degré exceptionnel de qualité. Elles diffusaient leur production à travers toute la France et jusqu'au Nouveau Monde.
Très liée à l'histoire de la ville, cette pièce monumentale est "un chef-d'oeuvre technique de la broderie" affirme le conservateur "tant par ses dimensions, puisque l'objet mesure près de trois mètres de large sur un mètre de haut, que par les techniques mises en oeuvre."
L'objet est ce qu'on appelle "un devant d'autel", antependium en latin. Il est brodé de laine et de soie ainsi que de fils d'or et d'argent, enrichi de perles et de cabochons précieux. Il servait à orner le bas de l'autel majeur de la chapelle des Ursulines.
Cinq groupes de figures le compose. Au centre, apparaît une vierge à l'enfant, avec un petit Saint-Jean-Baptiste. De part et d'autre, aux extrémités, se trouvent à gauche le martyr de Sainte-Ursule, comme son nom l'indique, la patronne des Ursulines et à droite l'Extase de Saint-Augustin, celui qui a écrit la règle monastique suivie par les religieuses. Entre toutes les scènes, deux autres représentations terminent le chef-d'oeuvre, celle de la Charité et celle de la Foi.
Obligées de quitter la France en 1904, les Ursulines se sont réfugiées en Belgique, emportant avec elle la broderie d'Amiens. "Elles se sont installées dans un petit village à quelques kilomètres de Valenciennes et là, on voit qu'elle s'en sépare assez vite puisqu'en 1910, l'objet est déjà dans des mains privées d'un collectionneur qui le prête à l'exposition universelle de Bruxelles."
Appel aux dons
De collection en collection, la broderie est aujourd'hui de retour. Pour acheter ce chef-d'oeuvre, le musée de Picardie doit rassembler 250 000 euros. Amiens Métropole est prêt à en financer une partie ainsi que la Région et le ministère de la Culture.
Pour boucler le budget, le musée lance une opération de financement participatif via la plateforme kisskissbankbank. Elle espère récolter 15 000 euros. Le lien est actif à partir du 6 février jusqu'au 17 mars. Ce mécénat est ouvert à tous, avec possibilité de défiscalisation de 66%.