Racisme systémique : apprendre à le cerner avec le député LFI Carlos Martens Bilongo : "c'est un fait de société"

A l'occasion de la sortie de son livre "Noir Français", Carlos Martens Bilongo s'est rendu à Amiens pour discuter au cours d'un café-débat sur le racisme systémique. Plusieurs témoignages lui ont permis de prendre l'ampleur de ce fait de société.

Les décorations et guirlandes lumineuses ornent un chalet du marché de Noël d'Amiens. À première vue, l'ambiance peut paraître festive, mais le ton est plus sérieux à l'intérieur. Car le thème de la soirée est le racisme systémique, ou comment les inégalités raciales sont ancrées dans chaque couche de la société.

Cette notion, l'invité d'honneur de ce débat la connaît bien. Il s'agit du député insoumis Carlos Martens Bilongo. Il y a un peu plus de d'un an, le 3 novembre 2022, l'élu du Val-d'Oise a été sommé de "retourner en Afrique" par un député du Rassemblement national au sein même de l'Assemblée nationale, symbole de démocratie et d'égalité.

Un "ensemble de la structure sociétale"

Cet évènement marque toujours les esprits des Amiénoises et des Amiénois. C'est le cas de Fanny, qui souligne qu'aujourd'hui "en tant qu'immigrés, on a un sentiment de racisme en France face à l'accès à l'emploi, au logement", par exemple.

Selon la définition d'Amnesty International, le racisme systémique désigne "l'ensemble de la structure sociétale composée d’institutions, de lois et de politiques qui maintiennent un système d’inégalités qui privilégie et opprime différents groupes dans la société selon la "race" qui leur est attribuée".

En effet, la ville picarde n'est pas épargnée par ces discriminations. Zahia Hamdane, conseillère régionale LFI des Hauts-de-France observe que "dans les quartiers" de la région, "les jeunes le vivent quand on voit leur rapport avec la police, quand on voit leur rapport avec l'autorité, c'est parce qu'ils sont dans une certaine précarité qui fait que ces sujets-là ressortent de façon un peu plus prégnante".

Comprendre pour mieux combattre

Dans l'assistance, beaucoup sont ceux qui veulent combattre activement ces inégalités. "D'un certain côté, moi je n'en suis pas victime, on est une grande majorité de Français à ne pas le voir puisqu'on n’en est pas victime", explique Eric Cagnache, un participant. Ce café-débat a permis "de mettre en lumière quelque chose dont les gens n'ont pas forcément conscience".

Comprendre pour mieux combattre, c'est le mantra de Carlos Martens Bilongo. "C'est très important parce que des personnes le vivent chaque jour, dans différentes situations de la vie de tous les jours, et quand on ne met pas des mots sur des maux, c'est très difficile", admet le député.

Il constate qu'il y a une forme de fatalisme dans la façon d'appréhender le racisme : "on accepte, on le subit, on laisse faire. Mais tout un système peut être exposé dès lors qu'on comprend qu'il y a un verrou".

Ce n'est pas d’aujourd’hui, ce n’est pas d’hier, c’est depuis ma naissance. D’autres personnes l’ont vécu avant moi. On le voit encore en France. Il y a des gens qui subissent encore des ratonnades. Après le match France-Maroc, à Montpellier, des gens se sont fait taper, agresser. Il faut le combattre à chaque fois.

Carlos Martens Bilongo, député LFI

Dépasser la colère

Pour la promotion de son livre "Noir Français", sorti aux éditions Philippe Rey, Carlos Martens Bilongo a eu l'occasion de visiter de nombreux quartiers populaires de Saint-Etienne, de Lyon ou encore de région parisienne. Il s'est également rendu dans des zones rurales en Dordogne. Il observe que dans chaque espace géographique, des spécificités existent. Il voudrait d'ailleurs faire converger les quartiers et les zones rurales : "il faut une convergence entre la ruralité et les quartiers populaires parce qu’on vit les mêmes choses. Il faut renverser la table. Et c’est possible".

Il note que le racisme mène parfois à "un repli sur soi" avec "une colère intérieure, une colère qui s'exprime. Parfois, il va y avoir une séquence nationale" où des personnes "vont aller dans la rue", révoltées, "mais finalement, ces personnes-là ne vont pas faire corps avec la société". Lui veut que tout le monde fasse corps, car s'ils ne le font pas, "ça profitera à certaines personnes".

C’est vraiment important d’en discuter, de débattre de ce sujet-là parce que c’est un fait de société. On voit ce qui se passe aujourd’hui avec la montée de l’extrême-droite. Quand un pays va mal, on cherche des coupables. Et le coupable, c’est celui qui ne nous ressemble pas.

Carlos Martens Bilongo, député LFI

Le député note que la stigmatisation et le repli sur soi mènent à une absence de participation à la démocratie du pays. Il regrette qu'il n'y ait "jamais eu de vraie politique volontariste pour dire aux gens : allez aux urnes". Pour lui, les libéraux ne sont pas "dérangés" d'avoir trois blocs, dont un abstentionniste.

Au final, ces discussions permettent de sortir du fameux "diviser pour mieux régner", de trouver des solutions à une période où les actes racistes enregistrés par la police et la gendarmerie perdurent, selon les chiffres du Ministère de l'Intérieur.

Avec Noemie Furling / FTV

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