Contrainte par ses bailleurs, l'association craint de devoir supprimer des repas ou des services d'aide à la personne.
Le 14 mars, dans une semaine, ce sera le fin de la campagne hivernale des Restos du coeur. La fin, aussi, du centre de distribution d'Amiens Sud-Est, installé dans l'Eglise de la Rue de Cagny : l'évêché a mis fin au bail. Comme si ça ne suffisait pas, la mairie d'Amiens a décidé dans le même temps de réclamer un loyer à l'association pour son nouveau siège départemental, Rue Edmond-Rostand.
310 familles déplacées
Voilà bien deux ans que les Restos savent qu'ils devront quitter la rue de Cagny. Des travaux de mise aux normes sont nécessaires et l'évêché a décidé de récupérer son local. Or l'ultimatum touche à sa fin et l'association n'a pas trouvé de solution de repli. Dès la prochaine campagne, les 750 bénéficiaires (310 familles) devront donc se rendre dans les autres centres, notamment rue Vascosan."Certains trouvent que c'est un peu loin, confie une bénévole. Mais ils disent qu'ils iront quand même, parce que quand on est dans le besoin..." Il faudra marcher avec les sacs ou trouver de quoi se payer le bus. Quant aux automobilistes : le stationnement est payant dans le quartier.
Le responsable départemental de l'association s'inquiète aussi. Vascosan passerait de 1200 à 1950 bénéficiaires. "Les locaux sont très petits, on ne peut pas stocker des marchandises pour autant de personnes", affirme Serge Navarro, qui devra faire des choix : les services à la personne, qui sont rendus dans un bureau de 20 m², pourraient en faire les frais.
Contactée, la mairie dit avoir proposé un grand local, quartier Salamandre, où l'association aurait pu regrouper la distribution et ses locaux administratifs, mais les Restos "ne voulaient pas s'installer dans ce quartier".
Un loyer pour le nouveau siège départemental
Dès lors, pour gagner de la place rue Vascosan et optimiser l'organisation des Restos d'Amiens, la mairie et l'association se sont mis d'accord pour déménager le siège départemental de l'association dans un logement administratif (T3), situé rue Edmond-Rostand. Les services d'aide à la personne, également rendus rue Vascosan, seraient déménagés dans ce nouveau siège.Problème : "On en discute depuis octobre, j'étais d'accord, c'était un prêt. Mais tout d'un coup, on me dit que ce n'est plus gratuit", révèle Serge Navarro. La ville voudrait désormais faire payer à l'association un loyer annuel de 5600 euros, plus 800 euros de charges. "5600 euros, c’est 500 repas que je peux pas acheter ou bien des activités que je ne peux pas continuer", affirme Serge Navarro.
La mairie confirme : "Depuis le début du mandat, nous avons institué la règle de la gratuité des locaux mutualisés. Rue Vascosan, c'est le cas, d'autres associations occupent le local certains jours. Là, ils sont tout seuls dans cet appartement, ce n'est pas mutualisé. Et puis c'est un local départemental, qui gère tous les Restos de la Somme..."
"Nous sommes une association loi 1901, rappelle Serge Navarro. Nous aidons les gens et quand même la municipalité ! Nous avons toujours eu d'excellentes relations avec la mairie. Je ne comprends pas, ça me choque."
L'eau a failli devenir payante
La mairie a également envisagé de mettre fin à la gratuité de l'eau dans le centre de Vascosan (qui n'a pas de compteur) : elle réclamait 2640 euros par an à l'association. "C'est ubuesque, se désole Serge Navarro. On a deux éviers, on tire de l’eau pour offrir du café... On ne prend pas de bain !"
Correction aujourd'hui de la mairie : "Payer l'eau, c'est dans la convention-type, mais nous n'allons pas le faire pour cette association, ils ne la paieront pas, c'est le geste que l'on peut faire."