Saint-Valentin : "Les gens s'emmerdent, ils veulent jouer", quand les sex-toys remplacent les traditionnels cadeaux

Fleurs, chocolats ou bijoux : les classiques cadeaux de la Saint-Valentin peuvent-ils laisser leur place à des jouets coquins ? Deux boutiques amiénoises proposent des accessoires érotiques pour rallumer la flamme ou simplement s'essayer à de nouvelles pratiques le 14 février.

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À Amiens, les sex-shops n'ont pas effectué de grands changements pour la Saint-Valentin, désormais les clients viennent régulièrement. Une petite table regroupe des articles habituels autour d'un cœur rouge pour Kokin Shop. Sybarite Sex shop n'a rien fait de spécial pour l'occasion. 

Pourtant, la clientèle se renouvelle et se diversifie : plus jeune, elle suit les tendances. "Il y a plus de ventes pendant la Saint-Valentin, mais il y a plusieurs périodes comme ça. Maintenant, quand une influenceuse conseille tel ou tel vibromasseur, les gens viennent le chercher", raconte Freddy, le gérant d'un magasin. La Saint-Valentin, n'est plus l'exception de l'année.

De manière générale, l'utilisation de jouets érotiques se démocratise. Il est davantage envisagé pour faire plaisir ou se faire plaisir. Selon une étude de Statista, plus de 50 % des Français avaient déjà utilisé un sex-toy en 2020 contre 7 % en 2001.

Rallumer la flamme

Pour les couples ensemble depuis plusieurs années, le sex-shop est le moyen d'amener un peu de piquant dans une relation qui s'essouffle parfois. "On a des hommes désespérés qui ne savent plus comment faire plaisir à leurs femmes. Les gens s'emmerdent, ils veulent jouer. Ce qui tue le couple, c'est la monotonie", explique Freddy, le patron de Kokin Shop.

Pour découvrir de nouvelles pratiques le jour J, les partenaires cherchent aussi des recommandations. "Il y a une grande différence entre fantasme et réalité. On vend beaucoup de BDSM, mais les gens n'y connaissent rien. On n'est pas là que pour vendre, on est aussi là pour les conseiller", ajoute-t-il.

Convaincu, Matthieu, 32 ans, se rend régulièrement dans un sex-shop pour faire plaisir à sa femme. Pour la Saint-Valentin, il a acheté un godemichet à paillettes qui s'illumine : "Les fleurs, elles périment, au moins, là ce n'est pas le cas. Et puis, il vaut mieux ça plutôt qu'elle me trompe."

Les meilleures ventes du moment

Pour la Saint-Valentin, les meilleures ventes se concentrent principalement sur les cadeaux les plus "grand public". "Ce sont des achats débutants : les jeux de couples, des nuisettes, du BDSM mais soft hein. Bander les yeux de quelqu'un, c'est déjà de la soumission. Les vrais dominants n'utilisent pas ça", décrit Freddy.

En effet, un coffret rouge en forme de cœur commandé spécialement pour la Saint-Valentin est posé sur une table. Il contient une bougie de massage, un lubrifiant et de la lingerie. Il fait contraste avec des articles plus explicites que contient la boutique.

Les clients se préparent aussi pour une Saint-Valentin en solo

Les célibataires se réservent aussi le droit de s'offrir un cadeau pour la journée des amoureux. Bien que dans ces magasins les hommes soient les principaux clients, de plus en plus de femmes s'y rendent. "Il y a beaucoup de jeunes filles qui viennent seules. Elles cherchent à découvrir leurs corps. La masturbation féminine, c'est encore un grand tabou. Certaines ne peuvent pas parler à leurs amies qui trouvent ça sale, ni à leur médecin de famille qu'elles connaissent depuis petites et encore moins à leurs familles. Chez nous, elles découvrent que c'est normal de se masturber", regrette Freddy.

Des ventes limitées malgré tout

Pour Nadine, vendeuse dans un magasin du centre-ville, c'est aussi la situation économique qui ne permet pas une hausse des ventes suffisante à cette période. "On voit tout de même qu'il y a un souci économique. On faisait des ventes formidables il y a quelques années pendant la Saint-Valentin. Ce n'est plus du tout la priorité."

Les boutiques de jouets pour adultes souffrent de la concurrence d'internet, où les sex-toys sont parfois beaucoup moins chers. En effet, les ventes ne cessent d'augmenter et c'est en ligne que se font la majorité des achats. En 2017, la moitié des ventes de sex-toys se faisait sur le net contre un cinquième en sex-shops.

Des boutiques qui souffrent de leur réputation

Le magasin de Freddy et Tina est bien caché, au fond d'un chemin, dans un entrepôt loin de la route principale. L'endroit est très chaleureux. "On est là parce qu'en centre-ville les gens n'oseraient pas entrer", explique Freddy. Certains habitués y entrent sans complexe, à l'inverse des badauds qui semblent intimidés. "Nos meilleures ventes se font après 18h quand il fait nuit. Les gens n'ont pas une image positive des sex-shops et ils ont peur d'y croiser leurs voisins ou leur patron", explique Tina.

Pour Sabrina, 31 ans, "les gens s'imaginent qu'il n'y a que des pervers dans les sex-shops. Mais, il faut oser ! Mon compagnon n'ose même pas rentrer avec moi."

Bien qu'une étude de l'Ifop ait démontré que les jeunes faisaient moins l'amour qu'avant, eux, se rendent au magasin sans réserve : "Parfois, ils nous demandent des articles que l'on n’a même pas. Ils sont très renseignés." C'est un phénomène que constate aussi Nadine dans sa boutique du centre-ville : "les jeunes rentrent ici comme s'ils allaient acheter une bouteille de lait. Moi, j'ai découvert les sex-shops à 45 ans. Si j'étais venu avant, je n'aurais pas divorcé."

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