Arrêt définitif des accouchements à la maternité de Péronne faute de personnel : "Ça nous fait peur pour la suite"

Les accouchements, suspendus depuis juin 2023 au centre hospitalier de Péronne (Somme), ne reprendront pas, confirme la direction de l'hôpital jeudi 11 janvier. Une nouvelle à laquelle les syndicats s'attendaient, mais qu'ils digèrent mal. À la place, un centre périnatal de proximité devrait voir le jour prochainement.

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L'arrêt définitif des accouchements au centre hospitalier de Péronne dans la Somme a été confirmée par Sabrina Stramandino, directrice déléguée de l'hôpital, dans un mail transmis à France 3 Hauts-de-France jeudi 11 janvier, corroborant une information du Courrier Picard.

Il n'est donc plus possible d'accoucher à Péronne, mais la maternité reste ouverte, assurant le suivi pré et post-natal des femmes enceintes.

Les accouchements suspendus depuis juin 2023

"Depuis juin dernier, le centre hospitalier de Péronne a été contraint de suspendre les accouchements faute de ressources médicales suffisantes pour assurer la continuité et la sécurité des soins", rappelle Sabrina Stramandino. À Noël 2022, les accouchements avaient déjà été suspendus pendant 15 jours, faute de pédiatres. 

"Malgré tous les efforts fournis par la direction et la communauté médicale, aucune solution satisfaisante n'a pu être trouvée, avec des plannings d’anesthésie incomplets et des effectifs de gynécologues, pédiatres et sages-femmes trop fragiles", poursuit la directrice déléguée. 

"On a alerté l'ARS et fait plusieurs manifestations"

Les syndicats ont appris la nouvelle dans les journaux. S'il n'a pas été surpris, Jérémy Fromentin, aide-soignant, ambulancier et secrétaire de la CGT au centre hospitalier de Péronne, aurait "aimé l'apprendre de vive voix". "Ça nous fait peur pour la suite. Le laboratoire a fermé il y a deux-trois ans, maintenant, c'est la maternité. On se demande qui sera le suivant", s'inquiète-t-il. 

Le syndicaliste reproche notamment à l'ARS d'avoir mené "une politique de l'autruche" sur la question de la maternité de Péronne. "On a alerté l'ARS d'Amiens plusieurs fois. [...] Mais son soutien n'a pas été à la hauteur, il n'y a pas eu assez d'effort financier pour recruter des médecins", pointe-t-il.  "Si on veut vraiment recruter, on peut trouver des leviers pour payer plus cher les médecins, pour que l'hôpital de Péronne soit plus attractif.

L'ARS, de son côté, assure avoir alloué des "soutiens financiers importants" au centre hospitalier qu'elle complétera le cas échéant "pour accompagner les projets sanitaires et médico-sociaux". Parmi ces soutiens financiers, l'ARS mentionne notamment les 2,5 millions d'euros d'aides exceptionnelles accordés à l'établissement.

"Oui, il y a eu du soutien pour du matériel, pour des travaux, pour le projet d'établissement, mais il n'y a pas eu de soutien au niveau médical pour la maternité", réagit Jérémy Fromentin. La CGT estime quant à elle avoir été réactive sur le dossier. "On a fait plusieurs manifestations, dont celle au mois de juin 2023 qui a rassemblé entre 700 et 800 personnes. Et à chaque instance, tous les mois, on relançait le sujet".

Un projet de centre périnatal de proximité

Le nouveau projet d'établissement, qui va voir le jour pour la période 2023-2028, prévoit notamment la création d'un centre périnatal de proximité (CPP), ce qui acte donc l'arrêt définitif des accouchements. Le projet va faire l'objet d'une concertation avec les instances du centre hospitalier "pour une mise en œuvre début 2024", précise la direction dans son mail. 

Ce CPP "proposerait de nouveaux services pour accompagner les mamans sur place lors de la préconception, pendant toute la grossesse et après l'accouchement, jusqu'aux 2 ans de l'enfant".

"Un moindre mal" pour Jérémy Fromentin, qui se veut prudent. "Reste à voir ce que ça va devenir. Pour les consultations post-natales, il faut avoir du personnel, mais comment l'attirer ? Est-ce que l'ARS va donner des financements ? Pour l'instant, c'est un projet", observe-t-il.  

Des accouchements "à domicile ou dans le camion des pompiers"

En attendant, "sans savoir le devenir de leur travail, des personnels [de la maternité de Péronne] sont déjà partis, des sages-femmes et des pédiatres ont demandé leur mutation", expose Jérémy Fromentin.

Depuis le mois de juin, l'arrêt des accouchements à Péronne entraîne des "prises en charge beaucoup plus longues" des femmes sur le point d'accoucher, constate-t-il.

On le ressent au niveau du SMUR de l'hôpital, on le faisait rarement avant, mais on fait de plus en plus de sortie SMUR pour des accouchements à domicile, dans le camion des pompiers, ou sur le parking des hôpitaux.

Jérémy Fromentin, secrétaire de la CGT au centre hospitalier de Péronne

"Ça entraine beaucoup de risques et de stress pour les femmes enceintes et leur bébé", souligne-t-il.

Un accouchement à 40 minutes de voiture

Émilie devait accoucher à la maternité de Péronne en juillet. "Malheureusement, je n'ai pas eu cette chance. On m'a rapatrié sur Saint-Quentin à partir de mi-juin. Tous mes suivis ont été exécutés sur Péronne, mais l'accouchement s'est fait sur Saint-Quentin", explique-t-elle

Une déception pour la jeune femme, "habituée aux sages-femmes" de Péronne et qui s'inquiétait alors pour la distance entre son domicile et la maternité de Saint-Quentin. "Ça faisait un peu loin pour mon conjoint et ma famille. Même le jour de l'accouchement, c'était un petit peu l'angoisse de me dire que j'avais 40 minutes de voiture si j'accouchais à la maison ou si je devais appeler les pompiers."

Finalement, son accouchement "s'est très bien passé". Le travail ayant duré six heures, Émilie a eu le temps d'arriver à la maternité. "On a eu un très bon accueil. Les personnels nous ont mis en confiance parce qu'on ne connaissait pas les médecins sur place". La jeune femme a ensuite effectué son suivi post-natal à Péronne, mais faute de pédiatre, a été obligée de consulter ailleurs pour sa fille.  

Pour les femmes enceintes des alentours de Péronne, le centre hospitalier le plus proche pour accoucher est désormais celui de Saint-Quentin, situé à environ 30 minutes de trajet en voiture. Celui de Cambrai est à 40 minutes, et ceux d'Amiens et d'Arras sont à 50 minutes.


Avec Dominique Patinec / FTV

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