"Ce sont des produits de terroir, il ne faut pas les perdre" : vers une labellisation pour les salicornes sauvages de la baie de Somme

Les ramasseurs de salicorne sauvage de la baie de Somme subissent la concurrence de la salicorne de culture venue de l'ouest de la France ou de l'étranger. Une idée pour valoriser ce produit est en train de germer : la création d'une indication géographique protégée (IGP).

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C'est la plante emblématique de la baie de Somme. Consommée cuite ou crue, en condiment ou en accompagnement, elle apporte de l'originalité aux plats et des bienfaits au corps. Mais si on la trouve assez aisément à la carte des restaurants de la côte, ou en conserve dans les bonnes épiceries de la Somme, la salicorne sauvage peine à s'imposer sur l'ensemble du territoire français.

Des salicornes sauvages, cueillies à la main

"Les pêcheurs nous disent que la production baisse d'année en année, et que par rapport à il y a dix ans, on récolte 100 tonnes de moins, donc à peu près un tiers de moins, parce que la salicorne sauvage est concurrencée par de la salicorne de culture, explique Marie-Sophie Lesne, vice-présidente de la Région Hauts-de-France en charge de la pêche. Mais celle qui est cultivée ou importée n'a pas le même goût ni le même patrimoine génétique, donc il faut qu'on sauvegarde la production emblématique des Hauts-de-France."

Car en baie de Somme, la salicorne n'est pas cultivée, mais ramassée à la main par 144 professionnels passionnés. "Il ne faut pas laisser partir ça, parce que ces productions, ce sont des petits joyaux, des petits bijoux", estime Marie-Sophie Lesne.

Tout est excessivement naturel. On fait un labour de surface, mais on ne sème pas.

Reinette Michon, présidente de l'association des ramasseurs de salicornes et végétaux marins

Reinette Michon, par exemple, ramasse la salicorne depuis qu'elle a neuf ans. Aujourd'hui, elle est présidente de l'association des ramasseurs de salicornes et végétaux marins. 

"Ce sont des produits de terroir, il ne faut pas les perdre ! (...) Tout est excessivement naturel, explique-t-elle fièrement. On fait un labour de surface, mais on ne sème pas, on ne fait rien d'autre, c'est juste pour favoriser la pousse de la plante au printemps !" Une méthode de production à l'opposé de la culture de masse. "[Les cultivateurs] peuvent en produire deux mois avant nous et deux mois après nous", précise-t-elle.

Une volonté commune de labellisation

Surtout, elle regrette qu'aucune indication ne permette au consommateur de faire la différence entre ce produit sauvage, et la salicorne cultivée dans l'ouest de la France ou à l'étranger, notamment en Israël et au Mexique. "Celui qui connait la salicorne de la baie de Somme ne s'y trompe pas, car ça n'a pas du tout le même goût", assure-t-elle. Mais celui ou celle qui n'a jamais goûté et qui veut découvrir cette plante ne peut pas se rendre compte de la différence. "Le consommateur est floué, et notre métier est bafoué", conclut-elle.

Une IGP (indication géographique protégée) amènerait de la valeur ajoutée et de la protection, pour mettre en valeur le fait que cette salicorne est produite de manière ancestrale, avec des méthodes et un savoir-faire particuliers

Marie-Sophie Lesne , vice-présidente de Région en charge de la pêche

C'est pourquoi elle est favorable à une labellisation, tout comme la vice-présidente de Région, qui a rencontré les ramasseurs de salicornes à la mi-juillet. "Une IGP (indication géographique protégée) amènerait de la valeur ajoutée et de la protection, pour mettre en valeur le fait que cette salicorne est produite de manière ancestrale, avec des méthodes et un savoir-faire particuliers, et un goût particulier", estime l'élue. 

Pour qu'une IGP soit mise en place, il faut déposer un dossier à l'Institut national de l'origine et de la qualité (INAO). Une démarche qui peut prendre plusieurs années, comme on l'a vu pour le haricot de Soissons : l'IGP a été validée trois ans après le dépôt du dossier. C'est pour cette raison que le Conseil régional souhaite travailler avec les professionnels, "pour les accompagner dans une démarche qui peut être assez lourde quand une filière est petite ou pas assez structurée".

Opérations marketing pour valoriser la salicorne sauvage

Un projet soutenu également par le Comité régional des pêches maritimes et des élevages marins (CRPMEM) des Hauts-de-France, qui lance en parallèle une campagne de communication pour valoriser ce produit. "On ne veut pas faire de la publicité stricto sensu, l'idée est d'apporter une connaissance, et donner envie au consommateur de manger ce produit-là parce qu'on lui a fait des promesses sur la saveur, parce qu'il est solidaire d'un mode de cueillette, et solidaire d'un terroir", précise Hervé Juriewicz, responsable de la communication au CRPMEM.

Je vais proposer au président de Région qu'on mette en valeur la salicorne au prochain Salon de l'agriculture.

Marie-Sophie Lesne, vice-présidente de Région en charge de la pêche

Car en attendant qu'un label soit obtenu, le marketing pourrait bien être une arme de qualité pour faire face à la concurrence. "La région Hauts-de-France tient une place importante au Salon de l'agriculture. Je vais proposer au président de Région qu'on mette en valeur la salicorne au prochain salon, qu'on demande aux chefs qui cuisinent devant le public de mettre à l'honneur la salicorne, afin qu'il y ait aussi au niveau gastronomique un petit retour en grâce de ce produit qui est très goûteux", indique Marie-Sophie Lesne.

Avec Sophie Picard / FTV

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