Cyclone Chido à Mayotte. La communauté comorienne entre inquiétude et solidarité : "on n'a plus sommeil, on a plus faim, on ne fait que penser à eux"

Alors que le cyclone Chido a ravagé Mayotte samedi 14 décembre 2024, les Comoriens vivant en France, parfois sans nouvelles de leurs proches, s'inquiètent. L'association comorienne d'Amiens organise une cagnotte afin d'aider les sinistrés.

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Rahamia Issimail, trésorière de l'Association comorienne d'Amiens, reçoit chez elle sa voisine et sa sœur pour se soutenir mutuellement. Toutes les deux ont leurs maris et leurs enfants qui sont restés à Mayotte. "Depuis vendredi, aucune nouvelle, donc je ne dors pas de la nuit. Je ne fais que tourner en rond. Ma sœur a laissé un enfant de cinq ans avec son père. On n'a plus sommeil, on a plus faim, on ne fait que penser à eux. Surtout que depuis hier, on a appris 14 morts. Et ce n'est que les chiffres pour l'instant."

Toutes les trois comoriennes, elles connaissent bien Mayotte, qui fait géographiquement partie de l'archipel : "Je suis l'avancée des dégâts dans les médias et c'est vraiment catastrophique. Même si je ne suis pas de là-bas, ce sont des humains... Et puis, on s'inquiète parce que c'est juste à côté de chez nous donc ça peut arriver chez nous."

Des politiques publiques mises en cause 

Mayotte attire particulièrement l'immigration du reste des îles comoriennes parce qu'elle a un statut particulier. Elle a été reconnue comme un département d'outre-mer depuis 2009 à la suite d'un référendum. De nombreux clandestins espèrent trouver une vie meilleure en s'y installant.

Pourtant, les conditions de vie n'y sont pas forcément meilleures que dans le reste de l'archipel. Quatre logements sur dix sont construits en tôle. "On voit la tôle s'envoler et du coup, c'est plus dangereux. On ne sait pas combien de personnes pouvaient vivre dans ces endroits-là. C'est compliqué."

Pour elle, l'État a sa part de responsabilité : "De mon point de vue, la France a abandonné Mayotte. Cet été, j'y suis allée et ce ne sont pas les mêmes conditions de vie qu'en France et même pas pareil qu'à la Réunion. Pourtant, c'est un département français. On peut être en colère pour ça. Il faut qu'ils gèrent ces problèmes-là avant d'envoyer des militaires pour virer les migrants", s'insurge Rahamia. 

Des infrastructures insuffisantes pour secourir les gens 

À côté d'elle, Mariama Athoumani, ne lâche pas la télévision des yeux. Ses enfants vivent là-bas et elle n'a pas de nouvelles d'eux depuis vendredi 13 décembre. Elle craint qu'ils ne trouvent pas d'endroit où s'abriter : "J'ai seulement eu des nouvelles de l'un de mes enfants et il ne savait pas pour les autres parce que leurs téléphones ne fonctionnent plus. Dans leur quartier, il n'y a plus personne. Il y avait des familles de sept enfants qui ne vivent que dans deux pièces."

Mayotte est le département le plus densément peuplé du pays en dehors de l'Île-de-France. Et c'est autant de personnes qu'il faut reloger alors que les édifices en briques se font rares : "La vie y est tellement chère que ça va être compliqué de racheter des tôles de bois pour reconstruire les maisons. Les parpaings sont quasiment au même prix que la tôle tellement c'est cher."

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Trouver des solutions depuis l'hexagone 

Pour se rassurer, elle essaie d'imaginer où ils pourraient se réfugier : "Peut-être qu'ils vont dormir dans des écoles, mais il n'y en a pas beaucoup et il y a beaucoup de monde qui a besoin d'être mis à l'abri. Et puis, là, on est en vacances, mais quand l'école va rouvrir, ce sera trop compliqué. Il n'y a pas d'hébergement d'urgence là-bas et les hôpitaux, c'est très compliqué. Ils ont été touchés par le cyclone Chido. Même pour déblayer, ce sera compliqué. Certains habitent loin de tout et qui n'ont plus que des routes barrées, explique-t-elle au bord des larmes. Je me sens très très mal. Je ne sais pas s'il y en a en qui sont morts ou pas. J'entends 14 morts, puis 30 morts et je ne sais pas si c'est vrai ou pas."

Depuis vendredi dernier, les trois femmes n'ont plus ni sommeil ni faim. Leur seule préoccupation est de retrouver leurs proches, mais aussi de pouvoir les aider. L'association comorienne d'Amiens a mis en place une cagnotte pour venir en aide aux sinistrés. Leur objectif : récolter 10 000 euros. 70% de la somme servira à reconstruire des habitations et 30% permettront d'acheter de la nourriture, des vêtements et de l'eau potable.

Avec Delphine Dubourg / FTV

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