Jean, 11 ans, est parti en colonie de vacances à Camaret-sur-Mer (Finistère), du 23 au 29 août 2024. À son retour en Picardie, Cécile Lemaire, sa mère, a constaté plusieurs bleus sur son corps. Elle indique avoir déposé plainte pour violences aggravées.
Jeudi 29 août 2024, Cécile Lemaire s’apprête à retrouver son fils Jean, 11 ans, parti en colonie de vacances durant six jours. Mais leurs retrouvailles virent rapidement au drame : "Mon fils descend du bus, saute dans les bras de sa sœur, mais avec des lunettes de soleil. Ça me parait bizarre et quand il se met de profil, je vois qu’il a un coquard."
Alors que le jeune garçon répond qu’il est "tombé", Cécile Lemaire assure avoir eu un "instinct de maman".
Je retire son pull, je regarde ses bras et je me rends compte qu’il a des bleus de partout. Il en a aussi dans le dos, sur le ventre. Je soulève son jogging et je constate la même chose sur ses jambes.
Cécile LemaireMère de Jean, 11 ans
La Picarde, qui habite Oissy, un village situé à une vingtaine de minutes d’Amiens, explique avoir immédiatement interrogé un animateur. "Il me répond 'Je ne sais pas' […] Il me renvoie vers le directeur."
Un séjour qui aurait été rythmé par des "claques"
Auprès de ses cousins, Jean aurait donné plus de détails sur son séjour : "Il raconte que dès le premier matin, il s’est fait réveiller par des claques sur sa tête. Sur les temps de pause, il se faisait taper à coups de claquettes ou, sinon, à coups de poings."
Au fil du temps, le petit garçon se confie finalement auprès de ses parents, aujourd’hui divorcés. "Le troisième jour, ils l’ont forcé à se mettre à quatre pattes et ils ont essayé de lui baisser son pantalon. Il m’a dit que ses deux années de boxe lui ont permis d’esquiver, de se débattre et partir. Il est allé se cacher dans un buisson", explique sa mère, avouant qu’elle n’a parfois pas su "quoi répondre" face à de telles allégations.
"Il m’a aussi dit qu’il n’était pas allé manger ce soir-là. ‘Comme ça, quand ils sont rentrés dans la chambre, j’ai fait semblant de dormir et ils m’ont laissé tranquille", aurait-il rapporté à sa mère, aujourd’hui surprise que personne n’ait constaté son absence lors du repas. Autre confidence : Jean aurait avoué ne pas s’être "beaucoup douché" car d’autres enfants l’attendaient pour le frapper.
Pour le coquard, il m’a expliqué qu’il y avait eu une chamaillerie pendant la boom. Un garçon est tombé sur lui, lui-même serait tombé sur le genou d’un autre enfant. Jean est allé voir les animateurs pour avoir une poche de glaces et ils lui ont répondu "tu vas pas nous embêter avec ça, c’est rien".
Cécile LemaireMère de Jean, 11 ans
Dans l'attente de réponses
Aujourd’hui, Cécile Lemaire dit ressentir "énormément de colère" et "pas mal d’incompréhensions". "Comment c’est possible qu’il y ait autant de violences, sur toute une semaine, sans que personne réagisse ?", s'interroge-t-elle. "Donnez-moi des explications ou des excuses !"
La Picarde raconte avoir également éprouvé des remords. La colonie était prévue sans téléphone, mais des photos et informations du séjour étaient partagées quotidiennement sur une application : "On s’en est voulu sur le moment car on s’est dit, si on avait fait plus attention aux photos, on aurait vu et on aurait pu appeler. Mais on n’a pas pensé à zoomer…"
Pour tenter d’avoir des réponses et alerter, la mère de famille a publié un message sur Facebook.
Cécile Lemaire affirme avoir déposé plainte en gendarmerie. "Je n’en veux pas aux enfants, je me dis que ça reste des enfants. J’en veux aux animateurs. Il n’y a eu strictement rien de fait."
Une enquête ouverte
Dès le lendemain de ce post, la communauté de communes Somme Sud-Ouest, qui proposait ce séjour, l’a contactée. "Nous sommes profondément choqués de ce témoignage et prenons cette situation avec le plus grand sérieux", assure l’institution par communiqué, ce lundi 2 septembre, précisant qu'une "enquête interne a été ouverte afin de faire toute la lumière sur cet incident."
Du côté de l'association organisatrice Éducation Jeunesse Aisne (EJ'N), Jérôme Vasseur, directeur, explique que des "vérifications" sont en cours : "Si l'enfant a annoncé des problèmes de violences à des adultes et qu'ils n'ont eux-mêmes pas réagi, c'est un problème. On le saura et il y aura des sanctions."
Les animateurs sont très étonnés de voir la dimension que cela a pris et d'apprendre que Jean aurait pu recevoir tous ces coups.
Jérôme VasseurDirecteur de l’association Education Jeunesse Aisne (EJ'N)
Quant aux blessures sur le reste du corps, le directeur indique qu'il y a "des activités lors desquelles les enfants peuvent se blesser" : "Les hématomes sont concentrés sur les bras et le dos, donc quand on porte un t-shirt, on ne les voit pas forcément."
Jean, lui, a fait sa rentrée en sixième, ce lundi 2 septembre. "Il a fait sa rentrée avec un coquard. Il a peur qu’on lui pose des questions, de passer pour un bagarreur, d’avoir mauvaise réputation dès le premier jour…" Demain, mardi 3 septembre, il s'absentera du collège afin de faire constater ces blessures par un médecin légiste.
Avec Grégoire Alcalay / FTV