Les professions libérales se féminisent beaucoup et l’Urssaf note des écarts de rémunérations entre les femmes et les hommes, tous métiers confondus. Pourquoi une telle différence et comment adapter ces métiers à une vie de famille ? On vous explique.
Selon l’Union nationale des professions libérales, les femmes représentent 50,3% de l’effectif total de ces métiers, contre 48,5% il y a quatre ans.
Les secteurs de la famille et de la santé sont les plus féminisés, avec en moyenne 60,4% de femmes, suivis du droit (55,6%) et du Technique et cadre de vie (44,1%) (cela peut être traducteurs, experts-comptables, créateurs de logiciels...)
Écart de revenus de 50 % dans le droit
Malgré cette féminisation des professions libérales, des écarts de revenus importants entre femmes et hommes subsistent. Par exemple, selon les chiffres de l’Urssaf, l’écart de revenus s’élève à près de 40 % dans les professions les plus rémunératrices. Il atteint en moyenne 46 % dans la santé et 50 % dans le droit, tout au long de la carrière.
Claire Gricourt, avocate au barreau d'Amiens, tente de trouver des réponses à cette différence sur l'ensemble de la carrière." Sur le long terme, on a une carrière qui est plus hachurée que les hommes car on doit s'arrêter pour les grossesses et quand les enfants sont malades. C'est la maman qu’on appelle en premier. Quand j'étais étudiante, un professeur m'a dit que je ne pourrais pas assurer ma carrière d'avocate en droit pénal, car j'aurais ma famille à gérer en priorité. Il faut savoir que les procès finissent souvent tard le soir."
Est-ce que ces écarts de salaire sont à compétences égales ? Selon Marie-Francoise Manière, secrétaire générale de l’UNAPL, "la réponse est non mais cela n'enlève pas l'importance de régler le problème d’égalité des chances dans les professions libérales comme partout ailleurs dans la société. Il y a moins de femmes en avocat en droit pénal que dans le droit des affaires familiales car c'est encore considéré comme un monde d'hommes. Ce n'est pas normal, d’autant plus que ce secteur est mieux rémunéré !"
Les raisons de ces inégalités homme/femme
1- Les femmes investissent le statut de professions libérales avec de nouveaux métiers (sophrologue…) qui sont moins rémunérateurs que les métiers traditionnels (médecin, notaire, architecte).
2- Elles ont tendance à moins demander d’honoraires que les hommes.
3- Elles sont moins souvent associées avec des hommes au sein d'un cabinet et elles héritent moins de l’entreprise familiale.
4- Certaines attendent d’avoir eu leurs enfants pour se mettre à leur compte et donc leur carrière est plus courte que celles de leurs homologues.
5- Le sexisme peut être un frein même dans les métiers rémunérateurs comme architecte. Comme l’explique Marie-Françoise Manière, " si vous avez un maître d’ouvrage qui vous fait moins confiance parce que vous êtes une femme, il préférera peut-être travailler avec un homme."
6- Les arrêts dans la carrière comme un congé maternité sont un frein à l’évolution des femmes.
7- Les indemnités journalières du congé maternité sont faibles, 61 euros brut par jour. Audren Linque, infirmière libérale dans la Somme, a décidé de ne pas avoir de troisième enfant à cause de ces indemnités journalières trop faibles : " Cela paye à peine les charges et on ne se dégage pas de salaire à côté. Je me suis dit qu'une grossesse dans ces conditions serait trop compliquée car je ne pourrais pas me permettre financièrement de prendre deux mois et demi de congé maternité."
8- Les horaires peuvent être peu conciliables avec une vie de famille. Comme l’explique Marie-Françoise Manière, "tant qu’il n’y aura pas une égalité des tâches à la maison et un congé paternité obligatoire, on n’arrivera pas à une égalité des revenus."
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Des avancées grâce au combat de l'UNAPL
Il faut savoir que c’est le syndicat, l’UNAPL, qui a porté et obtenu la création d’un congé maternité uniformisé pour les femmes professionnelles libérales en 2017 et la création d’un régime d’indemnités journalières en 2021, quand elles sont malades et en congé maternité. L’UNAPL souhaite aussi voir s’ouvrir une réflexion de fond sur la garde d’enfants, afin d’améliorer l’offre (meilleure amplitude horaire, tarifs des modes d’accueil non dissuasifs, etc.) et diversifier les modes de garde des enfants, en vue d’une véritable égalité professionnelle pour les femmes libérales.