"Qu'on nous laisse vivre notre vie comme avant", jetés dehors, des résidents permanents d'un camping se retrouvent SDF

À Bouvaincourt-sur-Bresle, dans la Baie de Somme, des locataires d'un camping sont menacés d'expulsion pendant trois mois, pour cause de travaux. Certains sont partis, "par peur de représailles", d'autres résistent.

Agnès Tirard dit qu'un état dépressif la gagne. Elle symbolise la lutte d'une poignée d'habitants opposée à un maire déterminé à les expulser pendant trois mois. Trois mois ? C'est la durée nécessaire pour restaurer le site où ils vivent. S'ils partent, quid de leur habitation ? Des mobile homes dans un cadre paisible aux portes de la baie de Somme représentent un coin de tranquillité, un endroit où ils comptaient "finir leur jour"

Il y a un an, le maire de Bouvaincourt-sur-Bresle, Yves Menmard, a informé ces habitants permanents du Camping les-Grands-Près que le site allait changer de statut — d'un Parc Résidentiel de Loisirs à un Camping Grand Confort Caravane. De janvier à avril 2024, ces locataires permanents devront plier bagage, à la recherche d'un domicile temporaire, et en supportant deux loyers. Impossible pour la plupart d'entre eux : "On a que ça, c'est notre habitation principale, on se demande tous les jours ce qu'on va devenir, s'inquiète Agnès Tirard. "On n'a rien acheté avant [un autre logement, ndlr) car on savait qu'on allait finir notre vie ici. On va être comme des SDF", rapporte une autre habitante.

On a que ça, c'est notre habitation principale, on se demande tous les jours ce qu'on va devenir

Agnès Tirard

Locataire du camping de Bouvaincourt-sur-Bresle

Yves Menmard agite le spectre d'envoyer huissier et forces de l'ordre, après le Nouvel an. Contacté par la rédaction de France 3 Picardie, le maire de la commune a refusé notre demande d'interview filmée. 

"Le cadre était sympa"

Phillippe Depoilly, lui, se dit arrivé aux Grands-Prés par hasard. "Le cadre est sympa, c'est à deux kilomètres de mon travail". Il a acquis son mobile-home il y a un an et demi, à quelques mois de la décision controversée : "Je suis dégoûté (...) Si j'avais su, je n'aurais pas acheté," dit-il conscient que le maire avait à l'époque envisagé la demande d'expulsion à venir. D'autant qu'un habitant nous a assuré "que ça faisait depuis plus de deux ans" que la menace planait. 

Si Philippe a décidé de rester, aux côtés d'Agnès et d'autres résistants, certains, "par peur de représailles", sont partis. Dès le 31 décembre, Doriane L'Intermy et son mari Bernard, laisseront leur logement vacant. Le maire a laissé planer la menace de couper eau et électricité, ce qui contraint Marie-Hélène Pisios de vivre chez sa fille, à Amiens. Problème, elle travaille en intérim à Gamaches, à une heure d'Amiens en voiture. Chaque jour, elle avalera les 68 kilomètres qui séparent Amiens de son lieu de travail, contre dix kilomètres depuis le camping. "Je ferai la route, je suis obligée".

Pour certains, le Camping des Grands-Près représente 25 ans de leur vie. Un quart de siècle qui, désormais, se fragilise. Agnès Triard implore : "qu'il (en parlant du maire, ndlr) nous laisse tranquilles, qu'il nous laisse vivre notre vie, comme avant".

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