Témoignage. Laurence, 52 ans, fonctionnaire nordiste, mère "dévastée" d'une fille partie en Syrie

Publié le Mis à jour le Écrit par AFP

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Depuis octobre, Laurence n'a plus aucune nouvelle de sa fille de 29 ans partie depuis trois ans rejoindre le groupe jihadiste État islamique (EI) en Syrie. "Dévastée", elle se démène pour qu'elle soit jugée en France, "le pays où elle a été endoctrinée". Elle donne rendez-vous dans une petite gare d'une cité portuaire du nord de la France où elle a élevé seule sa fille unique partie pour la Syrie avec son mari et ses trois enfants de 8, 5 et 3 ans.

"Elle s'est convertie à l'adolescence lors d'une amourette avec un jeune musulman dans un centre de loisirs", se souvient sa mère. Après leur rupture, elle continue à s'intéresser à l'islam, passe "des heures sur internet, enfermée dans sa chambre". "Elle s'est fait embobiner comme ça, des
gens l'ont vite attirée dans un courant radical
", déplore Laurence.

Après son bac L, des études de droit abandonnées et un premier enfant, elle lui présente Anthony, de plus de dix ans son aîné. "Un converti aussi" qu'elle a rencontré "sur un site internet dédié aux rencontres entre musulmans". Il habitait Perpignan, travaillait dans le bâtiment et semblait "charmant", relate l'agent administratif.

En 2012, elle s'installe avec cet homme, avec qui elle aura deux enfants. "Du jour au lendemain, elle a porté le voile et une année plus tard, elle portait le niqab, j'étais démolie." Entre la mère et la fille, les liens se distendent : "Brillante à l'école, elle s'est mise à croire à des inepties. J'essayais de la raisonner, mais je n'y arrivais plus", poursuit la mère. "Elle était déprimée, négligée, vivait sous la coupe de son mari violent", dépeint-elle, mouchoir à portée de main pour essuyer ses yeux humides.

Puis, "le pire est arrivé", au printemps 2015, après deux semaines sans nouvelle, ce message de sa fille : "Je suis dans l'obligation d'être en Syrie, je ne pouvais pas te le dire, tu aurais appelé la police". "J'étais dévastée." Les autorités lui conseillent "de ne pas se fâcher", de "garder les liens affectifs", mais, se sachant sur écoute, les échanges sont superficiels : "On parle chiffon, cuisine, on s'envoie des photos".

"Condamner sans juger"


"Elle a toujours eu des propos rassurants, me disait que ça allait bien, qu'ils mangeaient bien, m'envoyait des photos au bord de l'eau... du pipeau", objecte Laurence qui suit de près la guerre en Syrie. "Son mari y est mort", rapporte la nordiste, qui se remet d'une grave maladie.

Depuis la perte en octobre de Raqa par l'EI, qui en avait fait son fief, elle n'a plus aucune nouvelle. "Je lui avais demandé de se rendre, d'agiter un drapeau blanc. Elle m'a dit +j'ai compris maman+", relate la quinquagénaire, guettant le moindre message.

Désormais, elle se démène pour que sa fille et ses petits-enfants soient rapatriés en France, en multipliant les courriers : au gouvernement, à l'ONU, aux ambassades ou encore au pape. En vain. Et ignorant où elle se trouve, elle ne peut déposer plainte contre les autorités françaises pour "détention arbitraire", comme l'ont fait d'autres familles dans sa situation dénonçant le souhait de Paris de faire juger ses ressortissants sur place.

Selon le gouvernement, environ 1 700 Français sont partis rejoindre les zones jihadistes irako-syriennes à partir de 2014 et d'après une source proche du dossier, 300 jihadistes français, dont 12 femmes, y ont été tués. Leur retour, qui pose question pour la sécurité nationale, est un sujet sensible pour Paris.

"Ma fille a été embrigadée en France, les autorités se dédouanent trop facilement", pense Laurence. "En l'abandonnant, on la condamne sans la juger. Il ne peut y avoir de procès collectif par vengeance après les attentats", dénonce-t-elle, répétant que sa fille n'a "jamais combattu"

Elle fait défiler les photos sur son téléphone, s'inquiète de la "maigreur du petit", puis fixe une vieille photo de sa fille : "Elle était belle, rigolote, elle voulait devenir infirmière", se souvient-elle. Puis se questionne: "Comment en est-on arrivé là ?".


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