Tueur en série ou crimes isolés, l'affaire des disparues de la gare de Perpignan n'a pas livré tous ses secrets. L'arrestation de Jacques Rançon, qui a reconnu le meurtre de Moktaria Chaïb, l'une des 3 jeunes filles disparues, est cependant une grande victoire pour les enquêteurs.
Le suspect, arrêté jeudi 16 octobre à Perpignan, a reconnu le viol et le meurtre de Moktaria Chaïb le 20 décembre 2014. Mais il nie catégoriquement toute implication dans la mort de Marie-Hélène Gonzales et dans la disparition de Tatiana Andujar.
Mohamed Chaïb, frère de l'une des victimes, a remercié hier les enquêteurs pour leur ténacité. Des policiers qui n'ont jamais abandonné et espéré que les progrès scientifiques leur permettent de faire progresser l'enquête. C'est finalement ce qu'il s'est passé : de nouvelles traces ADN ont pu être isolées et ce sont elles qui ont permis de confondre Jacques Rançon.
Gilles Soulié, patron du SRPJ de Montpellier, suit l'affaire depuis le début. C'est lui qui a obtenu les aveux du suspect. Il le raconte avec émotion à nos collègues de France 2.
Gilles Soulié a raconté à nos confrères de France 2 comment il avait vécu l'arrestation du meurtrier présumé de Moktaria Chaïb
Depuis presque 20 ans, l'affaire des disparues de Perpignan défraie la chronique judiciaire.
L'affaire commence avec la disparition de Tatiana Andujar, 17 ans, dans les environs de la gare de Perpignan en 1995. Elle n'a jamais été retrouvée.
Puis en 1997, Moktaria Chaïb, 19 ans, est retrouvé morte dans un terrain vague, violée et mutilée, après avoir disparue dans le quartier de la gare.
Enfin, en 1998, Marie-Hélène Gonzales disparaît dans la même zone et est retrouvée morte, son corps ayant subi des mutilations identiques à celles de Moktaria Chaïb.
Le juge d’instruction a d'ores et déjà annoncé qu'il allait mener d’autres interrogatoires pour savoir si le suspect du meurtre de Mokthtaria Chaïb est impliqué dans la disparition de Tatiana Andujar et le meurtre de Marie-Hélène Gonzales.
Jacques Rançon était cependant en prison au moment des faits concernant Tatiana Andujar. La question d’une potentielle autorisation de sortie est mise en avant, sans réponses, pour le moment.
En ce qui concerne le cas de Marie-Hélène Gonzalez, son corps a certes subi les mêmes mutilations que celui de Moktaria Chaïb. Mais les policiers avaient retrouvé deux autres traces d’ADN sur place.
Le procureur de la République est donc resté prudent. Selon lui, il reste encore de nombreux points à vérifier.
Retour sur les fausses pistes, rebondissements et zones d'ombre de ce dossier (avec AFP) :
Le "faux chirurgien péruvien"
En 1997, la précision quasi chirurgicale de la mutilation de la 1ère victime avait fait penser à l'oeuvre d'un médecin ou d'un boucher.
C'est la 1ère des nombreuses fausses pistes d'une enquête chaotique: en janvier 1998, Andres Palomino Barrios est arrêté. Surnommé "le faux chirurgien péruvien", il avait pratiqué la médecine sans diplôme dans 18 hôpitaux. Après six mois d'incarcération, il a été innocenté.
Pendant qu'il était derrière les barreaux, un autre meurtre secoue la ville: le 26 juin 1998, le corps de Marie-Hélène Gonzales, 22 ans, est découvert nu, décapité et amputé de ses mains et de ses parties génitales.
Le "tueur en série"
Suivant toujours la piste du tueur en série, les enquêteurs pensent avoir trouvé le coupable quand Esteban Reig est interpellé à Lyon, le 25 mai 2000, pour le meurtre d'un homme égorgé, décapité et amputé des parties génitales qui ont été suspendues au-dessus de son frigo.
L'Espagnol se trouvait à Perpignan en 1997 mais il n'avouera jamais le meurtre d'une "disparue" et se suicidera en prison en 2002.
Le "violeur"
Entre-temps, en février 2001, une autre jeune femme, Fatima Idrahou, est retrouvée morte et violée. On l'ajoute un temps à la liste des disparues, toutes 3 brunes. Un gérant de bar, Marc Delpech, est finalement arrêté et condamné le 18 juin 2004 à 30 ans de réclusion mais pour ce seul meurtre, sans qu'aucun lien ne puisse être établi avec les autres "disparues".
Près de vingt ans après la première disparition de Perpignan, "l'enquête continue", reconnaît Gilles Soulié, directeur de la SRPJ de Montpellier.