Après une audience de plus de six heures, le tribunal correctionnel d'Argentan a donné raison mardi à deux organisations écologistes qui accusaient GDE d'avoir entreposé sur place des morceaux de pneus, GDE s'est dit "stupéfait"
L'information fait l'effet d'une bombe, ce matin. La justice a ordonné la nuit dernière la fermeture définitive de la décharge du groupe Guy Dauphin Environnement située à proximité du Haras du Pin, dans l'Orne
Il ne s'agit pas d'un centre de stockage de pneus
ont plaidé les avocats de GDE, qui ont expliqué qu'il ne s'agissait là que de déchets de broyage. Mais sans convaincre le tribunal.
Ouverte légalement le 22 octobre 2013, la décharge n'a été exploitée que deux jours, avant d'être bloquée par des opposants, qui en barrent toujours l'accès.
La société n'est pas atteinte dans sa détermination à faire la preuve de la qualité de son site, à la fois dans sa conception et sa gestion
a déclaré le président du directoire de GDE, Guillaume Dauphin.
Durant l'audience, Alexandre Faro, l'avocat de France Nature Environnement, l'une des deux organisations qui poursuivaient GDE, a souligné que l'entreprise avait déjà fait, à trois reprises, l'objet de mises en demeure depuis 2009: exactement pour le même problème d'entreposage de déchets de pneus sur ses sites en violation de la législation en vigueur, les pneus devant faire l'objet d'un recyclage séparé.
Des morceaux de pneus, certains mesurant un mètre et récupérés sur place par des huissiers de justice, ont été montrés au tribunal. "Il y a des résidus de pneus sur le site, là-dessus tout le monde est d'accord", a déclaré Me Faro, "La question est de savoir si ce stockage est légal ou illégal".
L'avocat a accusé GDE d'avoir intentionnellement entreposé ces morceaux de pneus pour des raisons économiques: broyer les carcasses d'automobiles sans ôter les pneumatiques au préalable, ce qui entraîne des coûts de main d'oeuvre. En réponse, l'avocat de GDE, Louis-Narito Harada, a reconnu la présence de "quelques résidus de pneumatiques" et expliqué que les techniques actuelles ne permettaient pas de séparer ces déchets des carcasses d'automobiles.
"On n'est pas une installation de traitement de déchets de pneumatiques, on est une installation de stockage de déchets non dangereux, on est autorisés à stocker des déchets non dangereux", a-t-il déclaré devant la presse.
Le rappel des faits:
Ouverte légalement le 22 octobre 2013 sur la commune de Nonant-le-Pin, la décharge n'a été exploitée que deux jours avant d'être bloquée par des opposants, qui en barrent toujours l'accès, disant redouter la pollution de terres de réputation internationale pour l'élevage équin.
En février, le préfet de l'Orne a mis en demeure l'entreprise de retirer les 1.856 tonnes de déchets entreposés pendant ces deux journées. GDE a contesté cet arrêté préfectoral.
La décharge devait recueillir quelque 2,34 millions de tonnes de déchets industriels en 17 années d'exploitation. Basé à Rocquancourt, dans le Calvados, GDE se présente comme un des leaders du recyclage en France, avec plus de 80 sites.
Le reportage d'Alexandra Huctin et Cyril Duponchel
Intervenants:
Noëlle Sandoz, présidente de Nonant Environnement
Michel Tessier, voisin du site
Les réactions:
José Bové, eurodéputé et tête de liste Europe Ecologie pour les élections européennes dans l'eurorégion Sud Ouest, se félicite de cette victoire :
"Elle est due à la forte mobilisation des habitants et des paysans de Nonant-le-Pin, qui ont refusé de voir leur bocage, leur sol et leur santé et leur qualité de vie dégrader par un projet dangereux, couteux et nocif".
Yanic Soubien, vice-président du Conseil régional de Basse Normandie, affirme "c'est l'état de droit qui s'impose à Nonant-le-Pin. C'est une grande victoire pour nous tous et surtout pour le Front de résistance citoyen, qui n'a jamais cédé dans ce combat, comme quoi le pot de terre peut gagner quand la cause est juste".
Hervé Morin, Président de l’Association pour la Réunification de la Normandie, Président du Nouveau Centre: « J’avais déclaré qu’il fallait résister et sortir les fourches et les faux. Je suis heureux que le combat mené avec pugnacité face à la bêtise et l’injustice l’ait emporté. Comment pouvait-on inscrire l’idée du développement durable et de long terme dans une région avec une telle décharge ! »