Pour l'épiphanie cette année, les artisans normands font face à une explosion du prix des matières premières, des frais de personnel et de l'énergie. Des coûts qui ne se répercutent qu'à la marge sur le prix de vente de la galette des rois.
On savait déjà la galette un mets de rois. En 2023, le dicton n'a jamais été aussi vrai. Alors que les coûts de l'énergie augmentent drastiquement pour les boulangers-pâtissiers et que les matières premières s'envolent, il vous en coûtera quelques galons de plus pour déguster une galette à l'occasion de l'épiphanie, le 6 janvier 2023. Des tarifs qui demeurent pourtant loin des coûts réels entraînés par l'inflation. Derrière les fourneaux, chacun s'adapte comme il le peut, et espère que la saison ne sonnera pas le glas de leur commerce.
Le beurre et l'argent du beurre : les matières premières en hausse
Dans la boulangerie pâtisserie Persigny, à Caen, la part de galette des rois coûte 80 centimes de plus que l’an dernier. "Il y a une hausse du prix des œufs, du sucre et du beurre. Pour le beurre, la hausse s’est un peu calmée, mais les œufs ont quasiment doublé de prix. Le prix de l’amande n’a pas trop bougé."
"Certains pâtissiers ont révisé leurs recettes pour réduire les coûts, en utilisant par exemple de la margarine au lieu du beurre. De notre côté, nous avons fait le choix de garder la même composition. Je préfère en fabriquer moins, accumuler les factures, mais maintenir la qualité de mes produits."
Boulangerie Au fil de l'éclair - Les PieuxFrance 3
Pas question cependant de changer la recette de galette des rois pour cette boulangerie : "On met autant de frangipane, autant de beurre, autant de sucre et nous la cuisons aussi longtemps que d'ordinaire. Simplement, on en cuit un peu moins le matin pour être sûr de réduire au maximum les pertes", ajoute la propriétaire.
"60 euros la galette pour faire face au coût de l'énergie"
Mais les vrais postes de dépenses qui font s'envoler le prix de la galette se passent du côté des frais de personnel et du prix de l’énergie. La recette de galette des rois nécessite beaucoup de manipulation et a fortiori du personnel. À la boulangerie Persigny, on a fait une croix sur un pâtissier supplémentaire, qui serait pourtant bienvenu. Autre caillou dans la chaussure des artisans, la galette est un produit qui cuit longtemps, près de 45 minutes au four.
"Nous faisons la chasse à la moindre dépense énergétique, au moindre gaspillage."
Boulangerie La Licorne - Saint-Lô
La dépense en énergie qui en découle est conséquente. Pas anodin lorsque tous les boulangers expliquent faire la chasse à la moindre économie. À la boulangerie Au fil de l'éclair, dans la ville de Les Pieux, on ne rallume plus le four l'après-midi pour les galettes. Il faut profiter de la dernière fournée de baguettes pour mutualiser la cuisson. "Si je vendais ma galette à sa juste valeur, elle coûterait peut-être trois ou quatre fois plus, c'est-à-dire presque 60 euros pour faire face au coût de l'énergie. Je ne peux pas m'aligner sur ces tarifs. Nous avons augmenté de un à deux euros nos galettes pour 4 à 8 personnes. On est donc loin du compte. Nous sommes inquiets, mais nous n'avons pas le choix de continuer pour nos salariés", explique la gérante.
Un produit toujours autant plébiscité
Côté clients, le prix ne freine pas l'achat. À Saint-Lô, à la boulangerie de La Licorne, le carnet de commande fait le plein pour ce week-end : "Comme pour les fêtes, les gens font attention, mais comprennent bien cette hausse de coût et veulent tout de même tirer les rois. Les carnets de commandes sont plutôt bons pour l'épiphanie. On verra ensuite si la dynamique tient."
Tous les artisans interrogés demeurent cependant inquiets. Si la période de l'épiphanie est d'ordinaire un temps fort de vente, ce dernier se déroule à perte cette année. De leur côté, les grandes surfaces ont également impacté la hausse des coûts sur les galettes. Comptez 25% de plus sur le prix de vente.