Le Millénaire de Caen se prépare, avec un événement phare "La parade opératique". En 2025, cette cavalcade artistique va rassembler plus de 1000 artistes pour évoquer, pendant 5 heures, l'histoire de Caen. Rencontre dans les coulisses avec la compagnie caennaise le "Ballon vert", cheffe d'orchestre de ce projet qui "doit marquer les mémoires".
L'ancienne usine de métallurgie de la SMN revit. C'est émouvant d'entendre les soudeurs, au rez-de-chaussée de la grande halle.
D'ailleurs, ça scintille à tous les étages. Au deuxième, les costumières s'extasient devant une nouvelle étoffe, dénichée le week-end dernier " C'est lumineux. On va s'amuser avec les reflets. Ce tissus sera idéal pour le tableau final", précise Laëtitia Pasquet, qui doit coordonner la fabrication de 870 costumes.
Un an de recherches historiques pour évoquer 1000 ans d'Histoire
Rien que les chiffres donnent le vertige. Musiciens, choristes, comédiens, danseurs, circassiens, sans compter les participants libres, environ mille artistes s'apprêtent à parader, pendant 5 heures, sur 5 kilomètres.
""La parade opératique "' va ressembler aux caravanes, commes les nomades. Nous allons avoir 5 modules roulants de 13 mètres de long et 7 mètres de haut. Ce n'est pas des chars en papier crépon, comme on a l'habitude de voir. On travaille le métal, le bois, la peinture décor, comme sur un plateau de théâtre.
La caravane va circuler dans la ville et passer par des sites liés à notre histoire et notre patrimoine. Je pense à l'Université par exemple. C'est un symbole fort, après la guerre, de la résilience de la population, qui va se serrer les coudes pour refonder la société.
Cette caravane, il faut l'imaginer comme un allumeur de réverbère. Elle arrive sur un site, elle allume une mémoire, qui s'active. Nous jouons une scène et elle repart vers un autre lieu
Amélie Clément, directrice artistique de "La parade opératique"
La parade s'annonce donc poétique. Ce n'est pas une reconstitution historique mais plutôt "une évocation", qui repose néanmoins sur tout un travail de recherches et de documentation menées par Amélie Clément, depuis un an.
Une aventure qui embarque tout un territoire
La compagnie du "Ballon vert" a pris possession des lieux, en novembre et depuis toute une fourmillière s'active pour donner vie à cette scénographie, qui réunit une quarantaine de métiers différents.
Des costumières, mais aussi des peintres, des soudeurs, des ébénistes, des scénographistes, des spécialistes de la lumière, "le comptable, très important le comptable", sourit Amélie Clément avant d'insister sur ce qui lui tient particulièrement à coeur : transmettre et tisser des liens entre les générations.
Le Jour-J, les habitants de l'agglomération sont invités à prendre part à la parade, en s'inscrivant au préalable, sur le site du Millénaire. Mais le chantier participatif a déjà commencé. Cette semaine, les soudeurs étaient accompagnés de deux jeunes stagiaires de la Métal Académy, qui mettent en pratique leur savoir-faire, appris sur les bancs de leur école, à Colombelles.
Même esprit à l'atelier "costumes". "Nous avons noué un partenariat avec le lycée Victor Lépine, qui forme des élèves aux métiers de la mode. Nous allons concevoir les modèles ici et charge à eux de fabriquer les pièces", explique l'une des deux cheffes costumières, Laëtitia Pasquet.
Les Esat (Établissement et service d’accompagnement par le travail), les centres de loisirs, le pôle senior de la ville de Caen et les écoles sont également de la partie.
Une fresque vivante et populaire, qui doit faire date
Compte tenu de sa longueur, l'oeuvre pourra difficilement être vue dans son ensemble. "C'est important de le dire au public. La parade fait 5 kms et nous avons dû fixer une jauge de 150 000 personnes. Nous sommes bien conscients de cette frustration et donc extrêmement vigilants à ce que chaque séquence soit de même durée. Les spectateurs ne vont donc pas découvrir la même chose.
J'adore cette idée qu'ensuite les spectateurs auront toutes les raisons du monde de se réunir , d'échanger sur ce qu'ils auront vu et de reconstituer un spectacle. Surtout que nous commençons en plein jour et nous terminons la nuit. C'est donc une performance pour les artistes et une première dans le centre ville de Caen.
Amélie Clément, directrice artistique de la "Parade opératique"
Le 9 mai 2025 doit s'apparenter à une grande fête populaire et marquer la mémoire collective. C'est en tout cas l'intention des porteurs du projet, regroupés au sein du GIP* "Millénaire".
*Groupement Intérêt public
" C'est un énorme investissement, à plusieurs titres. Un événement comme celui-ci doit marquer les mémoires pour des années et constituer un héritage. C'est aussi un investissement économique.
On en attend des retombées touristiques, en espérant aussi que cela donne une image positive de la ville de Caen. Nous avons à coeur de valoriser le tissus local. Ce n'est pas la peine de faire venir de l'extérieur des événéments. Nous aussi, on sait les créer ici." , conclut Gabin Maugard, l'élu de la ville de Caen, chargé du Millénaire.