Un bonus pour rapiécer ses vêtements ou réparer ses chaussures, une fausse bonne idée ?

Sa mise en place a été annoncée pour octobre mais le bonus réparation textile ne séduit pas les artisans normands. Les couturiers et cordonniers estiment en effet ne pas avoir de temps pour ces démarches administratives et craignent des délais trop importants pour se faire rembourser par l’Éitat.

Une remise de huit euros pour faire recoller ses chaussures ou réparer la fermeture de son manteau : un coup de pouce intéressant pour préparer l’hiver de manière économique et écologique.

Le bonus réparation textile, une bonne idée sur le papier

Annoncé en juillet par le gouvernement, le bonus réparation textile doit être effectif en octobre. Mais il ne semble pas déchaîner les foules.

S’il a de quoi séduire le consommateur, le bonus réparation textile donne plutôt des boutons aux artisans. En effet, le dispositif repose sur la labellisation des couturiers et cordonniers auprès de l’éco organisme Refashion.

À l’annonce du bonus, les craintes de voir peu d’artisans entamer cette démarche existaient déjà. Résultat : difficile de trouver un commerçant labellisé en Normandie. Les couturiers et cordonniers estiment que ce dispositif ne leur amène que des contraintes sans aucune contrepartie.

Bonus réparation textile : «Il faut avoir une trésorerie énorme !»

Les couturières Isabelle Vallée à Caen et Valérie Rogron à Alençon ont le même argument : «  Il faut avoir une trésorerie énorme ! » La remise est en effet appliquée par le commerçant, qui se fera rembourser ensuite par l’État. « Dans quels délais vont-ils nous rembourser ? Ça sera plusieurs semaines, donc il faut avancer l’argent », explique Isabelle Vallée.

Une avance de frais doublée d’une procédure administrative fastidieuse : l’artisan doit envoyer une photo du vêtement ou de la chaussure avant réparation, puis une autre après, pour justifier son travail. «Il me faudrait donc investir dans une imprimante, et puis je ne peux pas passer mon temps à faire de la paperasse, j’ai déjà ma comptabilité à gérer seule !» poursuit Isabelle Vallée. Et la couturière caennaise conclut que si elle veut aider des personnes en difficulté, des étudiants, elle pratique elle-même des réductions.

Argument partagé par Guy Lefèvre, cordonnier à Rouen depuis 45 ans. « J’ai 72 ans et 65 ans de métier, si je veux faire une remise à mes clients, je la fais moi-même. J’ai été sollicité plusieurs fois par Refashion pour me faire labelliser mais la réponse est non: c’est encore nous qui allons être les dindons de la farce : combien de temps après allons-nous être remboursés, si on est remboursés! »

Bonus Réparation textile : un dispositif cousu à l’envers ?

Même les enseignes plus importantes sont sceptiques. Mickaël Ripoll possède deux boutiques multiservices à Caen et Hérouville Saint Clair. Il hésite encore à se faire labelliser : « Si je le fais, c’est uniquement pour des travaux de couture, pas pour la cordonnerie. Ça va être un bazar au niveau paperasse, je n’ai pas le temps d’envoyer 20 ou 30 photos par jour ! Il faudrait que ce soit au client de faire les photos, et de se faire rembourser.»

Le professionnel affirme ne pas connaître de confrères qui se soient fait labelliser à Caen et aux alentours. « Ceux qui vont le faire vont augmenter leurs prix, pour compenser. Alors que si c’est le client qui faisait les démarches pour se faire rembourser, ce serait beaucoup plus transparent.»

Prévu pour l’automne, le dispositif est censé inciter à faire réparer ses vêtements et ses chaussures dans un souci économique et écologique. À défaut de se faire labelliser « bonus textile », de plus en plus d’artisans proposent des cours de couture. Une autre solution pour réparer soi-même et recycler sa garde-robe.

L'actualité "Économie" vous intéresse ? Continuez votre exploration et découvrez d'autres thématiques dans notre newsletter quotidienne.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
choisir une région
Normandie
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité