"L'hippodrome de la Touques a sauvé Deauville" : ce berceau des courses de chevaux fête ses 160 ans

Sa construction est intimement liée à celle de la ville. Il a été inauguré le 14 août 1864, avant même l'église de la ville. Retour sur plusieurs moments marquants de son histoire.

À Deauville, "l'hippodrome a été inauguré avant l'église de la ville". Un fait rare et hautement symbolique qui permet de comprendre "la construction de la ville, très liée à celle de l'hippodrome et des chevaux ", déclare Yves Aublet, historien de Deauville. Cet édifice emblématique des courses de chevaux, inauguré le 14 août 1864, fête cette année ses 160 ans. Retour, sur les moments marquants de son histoire avec Yves Aublet qui a dédié un livre à la ville : Deauville passion cheval. 

  • Le duc de Morny : "un homme de chevaux"

Derrière la création de Deauville et de l'hippodrome, il y a un homme : le duc de Morny, demi-frère de l'empereur Napoléon III. "Lors de villégiatures avec son médecin, ils ont l'idée de créer une ville juste à côté de Trouville. À l’époque, c'est la mode des bains de mer, des jeux de casino et des courses de chevaux qui viennent d'Angleterre." Ils concrétisent leur projet et des travaux commencent pour assécher les marais, dans les années 1860.

Plus qu'une mode équestre de l'époque, le duc de Morny est un véritable " homme de chevaux", ajoute l'historien. Il a un lien important avec l'Angleterre par le biais de son père et il côtoie des gens du milieu hippique et adhère à la "Société d'Encouragement".

Son service militaire, il l'effectue dans la cavalerie et il achète même ses propres chevaux. Passionné par les courses, il est aussi à l'origine, quelques années plus tôt, en 1857, de l'édification de l'hippodrome de Longchamps à Paris. 

Avec son goût pour les chevaux, c'était évident pour lui de prévoir un hippodrome dans Deauville

Yves Aublet

Historien de Deauville

L'objectif du duc de Morny est aussi d'exporter de la capitale, sur la période estivale dans un premier temps, des courses hippiques près de la mer. Dès son ouverture, l'hippodrome connaît un grand succès. Il est transdisciplinaire, il y a du galop, du saut d'obstacles et du trot attelé.

  • L'édifice qui a "sauvé" Deauville 

À ses débuts, la station balnéaire de Deauville connaît des années fastueuses. Mais cela ne dure pas, elle perd soudainement en popularité au moment de la chute du Second Empire en 1870. " Beaucoup de personnes liées au Second Empire venaient en villégiature à Deauville. Désormais la ville est délaissée, assimilée au régime déchu", raconte Yves Aublet. À l’inverse, Trouville, retrouve son succès avec ses bains de mer.

Le casino qui ne reçoit plus de joueurs est par exemple détruit mais les courses hippiques elles continuent. Elles vont perdurer pendant toute cette période d'impopularité qui va durer pas moins de 40 ans, jusqu'en 1912.

"On peut dire que l'hippodrome a vraiment sauvé Deauville". Puisque les courses ont tout de même permis d'attirer des gens de différentes catégories sociales. L'historien ajoute : "grâce à cela, il y a une petite économie locale qui subsistait, des trains continuaient à venir de Paris".

  

  • Une période de renouveau

Les courses connaissent cependant un petit essoufflement avant la Première Guerre mondiale. Eugène Cornuché, propriétaire du célèbre restaurant Maxim's et gérant du casino de Touville, impulse un nouveau souffle à Deauville. Contrarié de ne pas pouvoir mener à bien le projet d'extension du casino à Trouville, il se tourne vers la ville du cheval. Il souhaite la redynamiser. 

On lui confie en 1910 le soin de reconstruire un casino et de l'exploiter. Ce dernier ouvrira en 1912. Il fait aussi ériger l'hôtel Normandy, et l'hôtel Royal. C'est dans ce contexte que les tribunes en bois de l'hippodrome sont démolies. "Elles sont complètement rénovées et reconstruites en 1913 en béton armé et en briques et les courses redémarrent de plus belle", atteste Yves Aublet.

En l'espace de deux ans, la fréquentation redouble et Deauville redevient une station balnéaire de premier plan. Les courses hippiques s'imposent aussi de plus en plus.

  • À la mode de Deauville

L'hippodrome a aussi été un véritable cadre d'inspiration pour la mode. Pendant la période d'entre-deux-guerres, durant les années folle il a été le lieu de ce qu'on pourrait appeler une "Fashion Week", selon Yves Aublet. En 1913, plusieurs grandes couturières comme Jeanne Lanvin ou Jeanne Paquin et plus tard Elsa Shiaparelli ont fait poser des mannequins dans l'hippodrome de Deauville-La Touques. 

Elles étaient appelées les élégantes. "Elles se baladaient et parlaient en portant les plus belles créations. Ces photos servaient pour les book, pour montrer leurs créations à Paris", continue l'historien. 

  • L'hippodrome des 4 saisons

A leurs débuts, les courses se déroulaient sur deux jours dans l'hippodrome, puis sur quatre, avant d'être étendue sur un mois à partir de l'entre deux guerres. Dans les années 1980, la société propriétaire de l'hippodrome connaît des difficultés financières. Pour pallier ces difficultés, Deauville fait le pari de retenir les chevaux.

L'objectif est qu'ils soient présents toute l'année. "La politique, c'est d'accueillir les chevaux et cavalier toute l'année, un centre d'entraînement est inauguré en 1984", mentionne l'historien. Cette omniprésence du cheval toute l'année explique que l'édifice soit parfois surnommé "l'hippodrome des 4 saisons".

Pour poursuivre dans cette direction, Deauville-La Touques, s'équipe en 2003 d'une piste en sable fibré, ce qui lui permet d'effectuer des courses également pendant l'hiver. C'est le premier hippodrome à utiliser cet équipement. Il dispose aussi aujourd'hui d'un éclairage spécial pour effectuer des courses en nocturne. 

Aujourd'hui, on peut y voir une quarantaine de courses de plat à l'année avec un meeting phare, celui de Deauville Barrière qui se déroule du 28 juillet au 25 août cette année.

Parmi les courses emblématiques, il y a aussi le Prix Rothschild, ARC Prix Maurice de Gheest, ou encore celui de Lucien Barrière Grand Prix de Deauville. 

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