Début juillet, Emmanuel Macron s'est engagé à financer une bourse pour poursuivre les recherches sur les fusillés de la prison de Caen (Calvados). Elles pourraient aboutir à la découverte des corps de résistants tués par les nazis le 6 juin 1944. Une "source d'espoir" pour les familles marquées par ce drame.
Une bourse pour reprendre les recherches, 80 ans après le massacre. Le président de la République l'a promise aux familles dans un courrier adressé début juillet à l'ancien député du Calvados, Fabrice Le Vigoureux. "Nous nous devons de poursuivre cet indispensable travail de mémoire", écrit Emmanuel Macron qui a présidé la cérémonie d'hommage aux fusillés de la prison de Caen (Calvados), le 5 juin.
Qui mènera les recherches ?
Financée par le ministère des Armées, la bourse de recherche aura pour objectif "d'approfondir la connaissance de cet événement tragique et d'en améliorer les conditions de transmissions". Elle était réclamée depuis plusieurs années par les descendant.es et associations des proches de victimes, toujours à la recherche des dépouilles des 73 résistants, dont deux femmes, assassinés le 6 juin 1944.
Le jour du Débarquement en Normandie, les nazis ont fusillé les résistants emprisonnés à la prison de Caen. Leurs corps ont été enterrés sur place le jour même. Mais face à l'avancée des armées de la libération, à la fin juin 1944, le service de renseignement des SS les a fait déterrer pour masquer les preuves du crime de guerre. Depuis, les cadavres n'ont jamais été retrouvés.
Nous ne connaissons pas encore le cahier des charges précis de cette bourse de recherche.
Fabrice Le Vigoureux, ancien député du Calvados
"On estime qu’il faudrait un profil germanique pour mener ce travail de recherche sur les archives allemandes. Nous avons besoin de quelqu'un avec un bon bagage académique, qui s’intéresse à cette période de l'Histoire et qui a une double culture franco-allemande", estime Fabrice Le Vigoureux, le destinataire du courrier.
À ce stade, l'ancien député ne connaît ni "le cahier des charges" de cette bourse, ni les critères de sélection du chercheur, à laquelle il souhaiterait s'associer. "Il pourrait s'agir d'un contrat doctoral financé sur trois ans", avance celui qui travaille de concert avec Gérard Fournier, le président de l'association des Mémoires de la Résistance et de la Déportation normandes.
Une sépulture pour les victimes
Le 5 juin dernier, lors de l'hommage aux fusillés, l'émotion des proches était immense dans la cour de l'ancienne prison de Caen. Certaines familles n'ont jamais pu faire leur deuil, faute d'un lieu consacré au recueillement.
Cette bourse est une source d'espoir pour nous. Nous pourrions enfin leur offrir une sépulture.
Catherine Marie-Germain, petite-nièce de Colbert Marie
"Nous voudrions leur offrir une sépulture et dire qu'on les a retrouvés, même si cela va être compliqué 80 ans après. C'est déjà ce qu'attendaient ma famille, mon père, ses frères et ses soeurs. Ils en ont parlé jusqu'à la fin de leur vie", explique Catherine Marie-Germain, la petite-nièce de Colbert Marie, le plus jeune des fusillés de la prison de Caen.
Sur un mouchoir, l'adolescent de 17 ans avait fait parvenir à sa famille un message écrit de son sang. Sa disparition brutale a laissé un manque ineffaçable au sein de la fratrie de neuf enfants. "Il est important qu'il ne soit pas oublié. Il fait partie de notre histoire à tous", ajoute Catherine.
Une bourse porteuse d'espoir
La reprise des recherches, promise par Emmanuel Macron, est attendue par les familles. Les dernières en date, menées en avril 2023 au sud de Caen, n'avaient pas permis de retrouver les corps. Véronique de Touchet, petite-fille du résistant Antoine de Touchet, "ne perd pas espoir".
"Je trouve que c’est une excellente nouvelle. Mais je voudrais qu’on mène ce travail de recherche ailleurs que dans les archives allemandes. Peut-être qu’il y a encore des choses qu’on n'a pas trouvé en France. Qu’est-ce que les Allemands ont fait entre le 6 juin et la fin du mois de juin ?", s'interroge-t-elle.
Avec les moyens dont on dispose aujourd’hui, on va parvenir à retrouver les corps. Un jour, on trouvera. Moi, je ne lâcherai pas.
Véronique de Touchet, petite-fille du résistant fusillé
Plus encore que les archives, Véronique aimerait désormais "que la terre puisse parler" : "Il faut mener des fouilles pour trouver les corps. Il existe maintenant des moyens techniques modernes, des drones, qui pourraient permettre de repérer les charnier, même dans les zones boisées".
Le ministère des Armées, que nous avons contacté, n'a pas encore communiqué le montant et les modalités d'attribution de la bourse.