Deux dauphins se sont échoués sur les côtes normandes, à Saint-Vaast-la-Hougue (Manche) et à Trouville (Calvados), en fin de semaine dernière. Un chiffre qui gonfle dans la Manche depuis une dizaine d'années, en raison de la migration des espèces, remarque l'Observatoire Pélagis.
Le dauphin gisait sur la plage des roches noires, entre Trouville-sur-Mer et Villerville (Calvados), quand des promeneurs l'ont aperçu agonisant, jeudi 4 janvier 2024. Malgré la mobilisation des sauveteurs en mer et de vétérinaires en début d'après-midi, l'animal n'a pas survécu.
Plusieurs échouages ces derniers jours
Le maire de la commune voisine de Villerville aurait voulu voir le dauphin de ses propres yeux. Le lendemain, Michel Marescot s'est déplacé sur la bande de sable à la recherche de l'animal mais celui-ci avait déjà été emporté par la ville de Trouville pour réaliser son autopsie.
C'est toujours une nouvelle dramatique. Et le phénomène semble s'accuentuer...
Michel Marescot, maire de Villerville
En juillet 2019, le corps coupé en deux d'un dauphin avait également été trouvé sur la plage de Villerville. "Avant cela, le dernier fait de la sorte remonte au siècle dernier. Une baleine échouée sur la plage avait été dépecée et transformé en théâtre, c'était l'événement", raconte l'élu.
Bien loin de l'activité touristique que suscitaient les échouages au début du XXè siècle, leur multiplication soulève plutôt des interrogations. Vendredi 5 janvier, une autre alerte a été donnée à Saint-Vaast-la-Hougue, dans la Manche, où un cétacé a été retrouvé mort.
"Je pense qu'il y a une relation de cause à effet entre le réchauffement climatique et leur échouage, avance Michel Marescot. Les recherches des experts convergent dans ce sens en tout cas".
Le nombre d'échouages à la hausse
Du côté des scientifiques justement, on suit de près les échouages de mammifères marins. Rien qu'en 2022, le Réseau National Echouages (RNE), mis en place par l'Observatoire Pelagis, en a enregistré 1 676, soit 71% de cétacés pour 29% de pinnipèdes.
Ils se produisent en grande majorité sur la façade Atlantique, où les chiffres sont particulièrement élevés depuis 2016. Sur les côtes de la Manche, le phénomène reste stable avec 300 échouages en 2022.
Le marsouin – l'une des espèces de cétacés la plus répandue avec le grand dauphin et le dauphin commun – demeure le plus vulnérable (56%) en Manche-Mer du Nord.
La première cause de mortalité des marsouins reste la capture en mer dans les engins de pêche. C'est une espèce abondante et saisonnière que l'on voit peu depuis les côtes.
Olivier Van Canneyt, ingénieur d'études à Pélagis
L'espèce connaît son pic de densité au printemps dans la Baie de Seine, entre la pointe de Barfleur au nord-est du Cotentin et le cap de la Hève au nord du Havre.
Des dauphins communs plus nombreux
Pourtant, c'est bien le dauphin commun que l'on retrouve sur les plages normandes ces dernières années. Et particulièrement durant l'hiver.
"C'était une espèce totalement absente des échouages en Manche et qui apparaît depuis une dizaine d'années", explique Olivier Van Canneyt, ingénieur d'études et coordinateur des dispositifs à Pélagis.
L'année dernière, nous avons recensé 12 échouages de dauphin commun dans l'Est de la Manche. Ce n'est pas beaucoup mais avant, c'était presque zéro.
Olivier Van Canneyt, ingénieur d'études à Pélagis
Long de deux mètres en moyenne, le dauphin commun s'échoue souvent "accidentellement" sur les côtes de la Manche Est, du Contentin à la frontière belge.
Par opposition aux grands dauphins – une population côtière habituée des activités humaines et installée à longueur d'année dans la Manche – les dauphins communs se retrouvent pris au piège dans des baies peu profondes ou dans les parcs ostréicoles.
"Leur distribution a tendance à s'étendre à l'est de la Manche et vers les côtes", explique l'ingénieur. Néanmoins, difficile d'expliquer le phénomène de migration. Les chercheurs ont leurs hypothèses, mais rien de certain pour l'heure.