En Normandie, les projets de parcs éoliens braquent de plus en plus les habitants

De nombreux projets d'implantation de parcs éoliens soulèvent l'opposition de riverains en Normandie. Une crispation encore accentuée par les divisions politiques sur le sujet à quelques mois de l'élection présidentielle.

Sur la carte des projets de parcs éoliens en Normandie, c'est le dernier point qui s'est allumé. Fin janvier, le maire de la commune de Fontenay-le-Marmion au sud de Caen dans le Calvados a présenté à ses administrés un projet de parc éolien qui pourrait être construit à l'horizon 2025 avec une particularité : certaines turbines géantes atteindraient 230 mètres de haut. Un record dans la région.

Au cours d'une réunion publique, le maire de Fontenay-le-Marmion, David Guesnon, s'est engagé à consulter ses concitoyens avant l'été. Selon le journal Ouest-France, l'élu a expliqué qu'en cas de majorité défavorable il ne donnerait pas son aval au préfet qui a le dernier mot pour valider l'implantation de ce type d'aménagement. Au milieu des champs de betterave qui entourent la commune, un mât pour mesurer la force du vent a déjà été installé en toute discrétion par l'entreprise Neonen, qui porte le projet. Plusieurs habitants ont confié leur forte inquiétude au micro de France 3 Normandie. Ce qu'ils craignent le plus ? Les nuisances sonores et la pollution visuelle. "Ce qui m'embête le plus c'est la hauteur", "ça gâche le paysage", disent-ils. 

Un projet de parc éolien provoque la colère des habitants de plusieurs communes au sud de Caen. ©France 3 Normandie

Comme dans le sud de Caen, les citoyens de nombreuses communes normandes concernées par des projets de parc éolien font part de leur colère depuis quelques mois. À Soumon-Saint-Quentin dans le Calvados, des élus et des citoyens ont manifesté dans la rue leur opposition à un projet d'éoliennes le 27 janvier. Le lendemain, c'est à Port-en-Bessin qu'un débat public organisé par les services de l'Etat a été couvert par les huées de pêcheurs opposés à la création d'un quatrième site éolien dans les eaux de la Manche. 

"On voit que les gens sont plus réactifs aujourd'hui"

Au Tréport, ville côtière de Seine-Maritime concernée par un méga-projet de parc éolien offshore au large, Carmen Bilon préside l'association " Sans offshore à l'horizon". Depuis 2009, cette structure s'oppose à l'implantation de 62 éoliennes à une quinzaine de kilomètres du littoral du Tréport et de Dieppe, la grande ville voisine. Depuis qu'elle a commencé à lutter contre ce projet avec Gérard, son mari décédé en 2020, Carmen Bilon explique avoir vu les mentalités changer. "En 2009, on prêchait dans le désert. Cela n'avait rien à voir avec maintenant. On voit que les gens sont plus réactifs aujourd'hui. Dès qu'il y a un nouveau projet d'implantation dans la campagne, un collectif d'opposants se monte. Il y a un rejet de la population, mais l'Etat ne veut pas le voir", juge t-elle. 

Le député de la sixième circonscription du Calvados, Alain Tourret, assiste à la même crispation du débat. "Les projets d'éoliennes sont vus différemment aujourd'hui, qu'il y a 10 ans. Il y a de la démesure dans les nouvelles installations et progressivement des élus, des habitants se sont prononcés contre les projets", dit cet élu La République en Marche.

Les trois départements de Normandie les plus concernés par les éoliennes sont, dans l'ordre, la Seine-Maritime, le Calvados et La Manche. En décembre 2021, la  direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (Dreal), indiquait que la puissance du parc éolien terrestre de Seine-Maritime était de 438 mégawatts (MW), contre 159 dans le Calvados et 131 dans La Manche. Au total, 83 parcs terrestres représentant 393 mats étaient en fonctionnement en Normandie à la fin de l'année 2021, pour une puissance totale de 840 MW. Le projet offshore du Tréport-Dieppe représenterait à lui seul 496 MW. 

Un comité d'experts pour répondre aux questions des citoyens

Pour répondre aux très nombreuses questions d'habitants concernant les parcs éoliens, les promoteurs ou les autorités jouent la carte de la pédagogie. Depuis 2018, le comité de pilotage COME3T réunit par exemple un ensemble d’acteurs nationaux (industriels, universités, bureaux d'études) de la filière des énergies renouvelables marines (EMR) afin d’adresser des questions d’ordre environnemental à un comité d’experts neutres et indépendants. C'est France marine énergies, un institut pour la transition énergétique dédié aux EMR, qui est derrière cette structure. "Nos experts sont là pour répondre aux questions qui émergent lors des débats ou les consultations publiques", nous indique le service de communication. 

Deux bulletins explicatifs ont déjà été publiés sur le site web de France énergie marine. L'institut a notamment répondu à la question : "l es parcs éoliens posés peuvent‐ils générer des vagues dangereuses ?", en expliquant qu'aucun problème environnemental de ce type n'avait été identifié. 

"Quand on entend des candidats à l'élection présidentielle dire qu'ils vont démonter toutes les éoliennes s'ils sont élus, ça peut déboussoler les gens"

Un promoteur de parcs éoliens

Mais ce type d'initiative ne suffit pas à apaiser les collectifs de citoyens vent debout contre les moulins à vent modernes. Directeur associé de l'entreprise Terre et lac conseil, Damien Vacalus a vu les habitants de Meuvaines, située dans le Bessin au nord de Bayeux dans le Calvados, voter en masse en novembre 2021 contre son projet d'implantation d'un parc éolien. Pourtant, quelques mois plus tôt la municipalité avait dans un premier temps donné son accord. Avant de faire marche arrière, au vu des nombreuses contestations exprimées.

"Quand on entend des candidats à l'élection présidentielle dire qu'ils vont démonter toutes les éoliennes s'ils sont élus, ça peut déboussoler les gens, regrette Damien Vacalus. Je pense qu'il faut faire de la pédagogie à tous les niveaux sur cette question" Je ne sais pas comment ça va tourner à Meauvaines, mais c'est vrai que c'est de plus en plus compliqué à trouver des sites pour s'y implanter", suggère-t-il.  

Le député du Calvados, Alain Tourret, appelle lui à ouvrir davantage le débat sur l'acceptation des énergies renouvelables. "On ne peut pas faire des éoliennes contre la population"

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