Des peines de six mois de prison avec sursis ont été requises, vendredi 20 décembre 2024, contre neuf militants écologistes, jugés à Evreux pour avoir commis des dégradations et séquestré un gardien sur un site industriel de Lafarge (groupe Holcim) de l'Eure en 2023.
"Nous n'avons pas affaire à des délinquants mais à des personnes engagées, avec un engagement qui a franchi les limites de la loi", a estimé dans son réquisitoire le procureur Rémi Coutin, qui a récusé le terme "d'écoterroriste" pour ce genre d'action.
Le 10 décembre 2023, une centaine de militants écologistes "cagoulés et masqués" s'étaient introduits sur le site industriel de Lafarge à Val-de-Reuil, lors d'une opération "commando" au cours de laquelle ils avaient provoqué des dégradations estimées à plus de 450 000 euros par Lafarge, a rappelé le procureur, lors de leur procès à Évreux, vendredi 20 décembre 2024.
Retrouvez nos journalistes Arthur Deshayes et Bruno Belamri sur place :
Les réquisitions du procureur
Selon l'accusation, ils ont séquestré un vigile dans son bureau pendant une dizaine de minutes. Jugés depuis jeudi devant le tribunal correctionnel d'Evreux pour association de malfaiteurs, dégradations et séquestration, ils encourent une peine maximum de 10 ans d'emprisonnement.
"Ce serait malhonnête de dire que la cause pour laquelle ils militent n'est pas légitime et parfaitement respectable", a poursuivi le magistrat, se disant "convaincu en tant que citoyen et procureur qu'on n'en fait pas assez en matière de lutte contre le réchauffement climatique".
Il a toutefois souligné que l'"action commando" chez Lafarge et la séquestration du vigile, "contraint de rester 10 à 12 minutes dans son bureau", justifiait une "réponse pénale". "Le combat en la matière est légitime mais pas par des actions qui vont causer d'importants dégâts aux biens", a-t-il dit.
La défense plaide la relaxe
Me Chloé Chalot, avocate de deux des neuf prévenus, a comme plusieurs de ses confrères, dénoncé de "très nombreuses irrégularités de procédures".
"Vous n'avez pas de faits précis. On n'est que dans le registre de la suspicion. Sur la base de quelques éléments matériels, on écrit une histoire. Les photographies sont de piètre qualité, elles ne permettent pas d'identifier mes deux clients", a-t-elle plaidé.
La défense a dénoncé tout au long du procès la saisie de la SDAT (Sous-direction anti-terroriste), et les prévenus ont tous décrit hier des interpellations musclées et choquantes ainsi que des gardes à vues éprouvantes.
Ces prévenus sont pour la plupart des professeurs ou des retraités. L’un d’eux a 77 ans. Des militants pacifistes traités comme des terroristes selon leurs avocats, qui attendent une relaxe.
De son côté, Lafarge souhaite être indemnisé du préjudice financier, il est estimé à plus de 450 000 euros. Mais concernant les dommages et intérêts, Lafarge demande un euro symbolique.
Le jugement est attendu dans les prochaines heures.