Trois points relais de la Poste ont été installés dans des exploitations agricoles de l'Eure, situées dans des zones géographiques défavorisées. Une expérimentation qui se révèle profitable pour les deux parties. Les agriculteurs bénéficient d'une nouvelle clientèle, et les usagers du retour d'un service public.
Chambois est une petite commune rurale de l'Eure, au carrefour de l'axe Evreux, Nonancourt, et Damville. Une zone géographique que l'on peut considérer à plus d'un titre comme une zone blanche, désertée par les médecins et les services publics. Poster son courrier ou récupérer un colis peut s'avérer une mission laborieuse.
Alors quand le Groupe la Poste a sollicité la Chambre d'agriculture de l'Eure pour un partenariat, la connexion s'est faite rapidement. L'idée, qui a germé depuis, était d'implanter des points relais de la Poste dans des exploitations agricoles installées sur des territoires ruraux délaissés.
Un partenariat a été signé en février 2024 pour développer conjointement commerce de proximité et services postaux. Dix points relais sont à présent expérimentés dans sept départements français, dont trois dans l'Eure : à Vexin-sur-Epte, à Bâlines et à Chambois, où nous retrouvons Gatienne Lethrones, une agricultrice qui a trouvé son compte dans cette association.
Bienvenue à la ferme !
"Ici, au départ, on a un commerce de pommes de terre et on a élargi la gamme de la boutique aux fruits et légumes de saison, et également à l'épicerie, pour faire vivre les agriculteurs autour de chez nous. C'est dans ce cadre-là, de "Bienvenue à la ferme", qu'on nous a proposé ce partenariat avec la Poste pour faire du service supplémentaire auprès des clients, et avoir un flux de clients plus important pour faire tourner la boutique", explique ainsi Gatienne, agricultrice à la ferme du Plessis Grohan à Chambois.
Trois fermes ont ainsi été choisies pour cette expérimentation, car elles correspondent aux critères exigés : situées à plus de 15 kilomètres d'un bureau de poste, elles proposent toutes des produits locaux à la vente.
"Quand la Poste m'a contactée, ils m'ont envoyé une carte avec les zones blanches sur le département de l'Eure, et là j'ai ciblé les agriculteurs adhérents à la marque "Bienvenue à la ferme" qui correspondaient sur ces zones" explique Marie-Louise Lara, représentante de la Chambre d'agriculture de l'Eure.
On habite à Corneuil, c'est à côté, pour une fois qu'on a quelque chose à côté de la maison, c'est pratique, surtout qu'à la Poste de Damville ils ne sont pas sympas !
Une cliente de la ferme et du point relais de la Poste
L'expérimentation fonctionne bien. "Ça fait deux mois qu'on a commencé ! Au début c'est allé progressivement, maintenant on a beaucoup de clients qui viennent quotidiennement récupérer des recommandés, ou acheter des timbres, faire de l'affranchissement ou du retrait et dépôt de colis et lettres", poursuit Gatienne Lethrosne.
Même son de cloche pour cette cliente qui attend sagement d'être servie. "C'est très bien, c'est pratique le relais poste, on n’a pas besoin de se déplacer à la Madeleine, à Evreux. En plus ils sont très gentils et très aimables" s'épanche Bernadette Lelièvre, cliente venue en voisine.
Un service de proximité
Les exploitants agricoles ont été formés par la Poste. Il ne s'agit pas seulement de faire du dépôt ou du retrait de colis, mais d'effectuer des services de base, tel que l'affranchissement.
On a que des retours positifs, la proximité c'est la première chose dont on nous parle. On a élargi nos amplitudes horaires qui permettent même de venir après la sortie du travail. On ferme à 19 heures trois jours par semaine et on est ouvert cinq jours sur sept. Les habitués sont contents de venir déposer leur courrier et faire leurs courses.
Gatienne Lethrosne, la Ferme du Plessis Grohan, à Chambois (27)
Des personnes de la Poste sont également disponibles, via une ligne téléphonique dédiée, pour répondre à toutes les questions que se poserait l'agriculteur ou l'agricultrice.
Échange de bons procédés
"Ça permet aux adhérents de Bienvenue à la ferme de cibler une nouvelle clientèle, des gens qui ignoraient qu'ils avaient tout près de chez eux des magasins de produits locaux. Une cliente nous disait la semaine dernière qu'avant, pour aller chercher un recommandé ou envoyer un colis, elle devait faire 30 kilomètres aller-retour. Maintenant, c'est dans son village, à 5 minutes, et ça lui permet aussi d'acheter ses pommes de terre ou des produits locaux", conclut Marie-Louise Lara.
Avec la disparition de nombreux services publics dans les campagnes, ce dispositif ancre les agriculteurs comme des acteurs indispensables des territoires ruraux. Deux autres points relais devraient être testés, toujours dans l'Eure, d'ici quelques semaines.