Les commentaires haineux sont-ils normaux sur les réseaux sociaux ? Comment les influenceuses peuvent-elle le supporter ? Est-ce le jeu, finalement, d'encaisser les critiques ? Malika Ménard est partie en quête de réponses auprès de jeunes femmes très suivies sur les réseaux sociaux et Instagram.
Malika Ménard, une Miss complexée, vraiment ?
" Difficile de me concevoir complexée" admet-elle. D'emblée, Malika Menard se livre dans "#Fuck les complexes". Difficile de demander aux gens de se confier sur leurs complexes sans démarrer par les siens, dit en substance la Miss France 2010. La jeune femme explique ainsi que le but de sa participation au concours Miss France était de se convaincre de sa propre beauté.La Normande l'avoue : "il faut reconnaître que je suis un vaste chantier". Elle évoque avoir cherché des réponses à ses questions existentielles via "deux psychothérapies classiques".
L’ancienne Miss France annonce ainsi être "en début de guérison". Malika Menard évoque ses traumas : l'absence du père durant 10 ans, le manque de dialogue avec sa mère, des moqueries débutées chez la nourrice par son fils, "J'étais juste bonne à être tournée en ridicule", puis le comportement du même fils trentenaire lorsqu'ils étaient seuls "ses gestes étaient déplacés". Une fois les faits révélés à sa mère, elle la change illico de nourrice et d’école mais n'en parlera jamais avec sa fille.
Pour s'accepter, quelques années plus tard, Malika se dirige vers la lumière. Concours de Miss, chronique télé, école de journalisme, elle poursuit son chemin sous le feu médiatique, avec toujours son lot de critiques. Mais c'est son frère qui lui fait réaliser la violence qu'elle subit sur les réseaux sociaux. Tout part d'une photo d'eux deux, en bord de mer. Parmi les commentaires sympathiques (70 % de ce qu'elle reçoit, assure-t-elle) des messages loin d'être bienveillants : "tu as le cul flasque", "tu n'as jamais pensé à te faire une chirurgie du nez ?", "tu as pris un sacré coup de vieux". Des messages blessants que son frère est stupéfait de lire mais qui ne semblent pas la toucher. Vraiment ? "En vérité il est absurde de considérer que ce genre de messages ne nous destabilisent pas". De là naît le début d'une réflexion.
La question est posée : peut-on supporter ce genre de choses sur les réseaux sociaux ? Malika Menard est partie en quête de réponses auprès d'influenceuses et de jeunes femmes très suivies sur les réseaux sociaux et en particulier Instagram.En vérité il est absurde de considérer que ce genre de messages ne nous déstabilisent pas
Les commentaires haineux sont-ils normaux sur Instagram et les réseaux sociaux, usines à complexes ?
Instagram permet de contrôler sa communication, explique Malika Ménard. Puis c'est la course à la photo parfaite, à la comparaison avec les autres influenceurs présents sur les réseaux. Si on n'y prend pas garde, la vie peut vite tourner autour de son smartphone. L'outil, qui permet de maîtriser la communication et aux influenceurs d'obtenir une rémunération via la publicité, peut se retourner contre eux.Aurélie Dotremont, l'explique cash : "je gagne essentiellement ma vie grâce aux placements de produits. C'est plus rémunérateur que la télévision." L'influenceuse a participé à L'Ile des Vérités 2 et tire donc ses revenus de son travail sur Instagram. Elle assure prendre beaucoup de recul sur les critiques et les haters :
Je prends tout au dixième degré et heureusement pour moi parce que sinon cela ferait depuis longtemps que je me serais suicidée. Quand je croise les gens dans la rue, ils sont gentils, alors que sur les réseaux sociaux, ils m'insultent.
Lorsque son arrière-grand-mère est décédée, la jeune femme poste une photo hommage. Jusqu'où peut aller la violence des commentaires ? Jusqu'à répondre "Va la rejoindre" sous cette photo. Pour elle, "les débiles de services font partie du jeu".
La plupart des jeunes femmes interrogées dans "Fuck les complexes" semblent trouver normal d'être confrontées aux commentaires haineux et assurent ne pas s'y attarder. Ce serait alors une sorte de rançon de gloire. La rémunération viendrait avec des désagréments... qui peuvent tout de même laisser perplexes tant les commentaires sont parfois loin d'être anodins.
"Les commentaires les plus méchants sont ceux des 7/10 ans", précise Clara Marz, qui a débuté toute jeune sur Youtube, quand elle était encore au collège. La jalousie entrerait-elle en compte dans le rapport qu'entretiennent les internautes avec les personnalités qu'ils suivent ?
Julie Bourges affirme n'avoir "que très rarement des haters. 99,9% de ma communauté, c'est de la bienveillance. Je sais que j'ai de la chance et que c'est extrêmement rare". L'influenceuse a créé son compte DouzeFevrier pour se "réapproprier son corps de grande brûlée".
"Trouver des gens qui nous ressemblent nous donne le courage de nous assumer" explique Camille Cerf. La Miss France 2015 préfère tirer un bilan positif des réseaux sociaux : "Il faut être dans une démarche, regardez-moi je m'assume, plutôt que "aimez-moi, likez moi" qui elle, peut être compliquée pour l'égo".
Le livre de Malika Menard "#Fuck les complexes" est paru au éditions Amphora le 13 octobre 2020