Histoires de la peine de mort dans l'Eure et la Seine-Maritime

En Seine-Maritime et dans l'Eure, le couperet de la guillotine est tombé pour la dernière fois très longtemps avant l'abolition de la peine de mort le 9 octobre 1981. Il faut remonter au-delà des années 1950 pour se replonger dans ces histoires.

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Il y a 40 ans : l'abolition de la peine de mort en France 

Le 18 septembre 1981, Robert Badinter garde des Sceaux faisait face aux députés de l'Assemblée nationale pour y présenter son projet de loi sur l'abolition de la peine de mort. Quelques semaines plus tard, le 9 octobre 1981, la loi était promulguée. 

La promesse de campagne de François Mitterrand, devient une réalité. La France est alors le 36 ème état du monde à abolir la peine de mort mais le dernier pays de la Communauté économique européenne.

La loi s'impose dans un climat pourtant défavorable. Un sondage du Figaro publié le 17 septembre 1981 indique que 62 % des Français sont pour le maintien de la peine de mort.

Une guillotine rangée depuis plusieurs années avant son abolition

Lorsque la loi sur l’abolition de la peine de mort est promulguée, il y a 40 ans, la guillotine n’a pas été utilisée en France depuis plusieurs années. Peu à peu, la peine de mort a été mise au ban.

Depuis la mort du Général De Gaulle en 1970, on fait de moins en moins appel au bourreau. Valéry Giscard d'Estaing et Georges Pompidou maintiendront la peine capitale tout en se disant peu enclins à celle-ci. A l’inverse de Charles De Gaulle qui était plus favorable.

39 décapitations ont eu lieu sous la présidence de ce dernier entre 1959 et 1969. Deux exécutions ont eu lieu sous Pompidou en 1972 et 1973. Trois sous la présidence de Giscard d’Estaing entre 1976 et 1977.

A plusieurs reprises, les deux Présidents ont utilisé leur droit de grâce, sauvant ainsi la tête de nombreux prisonniers. Les peines capitales ont souvent été commuées en réclusion criminelle à perpétuité. Certains condamnés sont morts en prison. D’autres en sont sortis après de plus ou moins longues années de réclusion.

1977 : dernière utilisation de la guillotine  en France

Le 10 septembre 1977, à la prison des Baumettes à Marseille, Hamida Djandoubi, se présente devant la guillotine. Il sera le dernier condamné à mort exécuté par la lame tranchante de cet instrument inventé sous la Révolution.

Il avait été jugé et reconnu coupable d’actes de barbarie, de l’assassinat avec viol de son ex-compagne, de séquestration et de viol sur mineur de quinze ans.

Dans notre région, de nombreuses condamnations à mort ont aussi été prononcées. Beaucoup n’ont pas été exécutées. Transformées elles aussi la plupart du temps en réclusion criminelle à perpétuité. De ce fait, il faut rechercher loin dans les archives pour trouver le nom des derniers prisonniers condamnés à mort et exécutés dans ces deux départements normands. 

La "Bijou" et la "Parisienne"

Deux guillotines étaient utilisées pour les exécutions en France, comme l'indique l'historien Jean-Pierre Machain, dans son ouvrage "Histoire de la prison de Rouen Bonne Nouvelle" aux éditions L'écho des vagues.

La première était utilisée pour les décapitations en région parisienne. La deuxième (la "Parisienne") était démontable. Elle venait de Paris, et était destinée aux exécutions dans les prisons de province. Elle reposait sur 5 points d'appui et était fixée au sol avec des boulons. 

"Depuis 1836 et jusqu'en 1939, la "Parisienne" était montée sur la place Bonne Nouvelle, là où s'érige l'actuelle prison Bonne Nouvelle de Rouen. Les exécutions étaient publiques jusqu'en 1939 et la décision de les reléguer dans les cours des prisons, hors de la vue des habitants... Jusqu'au début des années 1990, on pouvait encore voir les traces des appuis de la guillotine dans la cour de la prison et sur l'ancienne place. Elles ont disparues lors de la construction de l'actuel boulevard de l'Europe" (Jean-Pierre Machain). 

Le plus jeune condamné à mort à Rouen 

Le procès d'André Vitel, le 17 février 1939 à la Cour d'assises de la Seine-Inférieure a marqué l'histoire judiciaire rouennaise car il a donné lieu à la condamnation à la peine de mort du plus jeune accusé de France.

André Vitel, 17 ans était jugé pour le double meurtre de la rue Frédérick Lemaître au Havre (Seine-Maritime). Il fut le dernier mineur guillotiné publiquement en France. 

Les deux dernières exécutions dans l'Eure et de la Seine-Maritime ont eu lieu avant 1950

En Seine-Maritime, le dernier condamné à mort, exécuté s’appelle Piotr Piskorski, un jeune Polonais de 25 ans, ancien militaire au service de la Russie puis des Etats Unis. 

Lors de son procès à la cour d’assises de Seine Inférieure, à Rouen, le 10 mars 1948, Piskorski avait été reconnu coupable du meurtre d’une femme au Havre, à coups de barre de fer et de la  nièce de celle-ci, âgée de 8 ans. Les faits s'étaient produits le le 25 septembre 1947. 

Jean-Pierre Machain, dans son livre sur l’histoire de la prison Bonne Nouvelle de Rouen, rappelle que Piskorski a été présenté comme « un monstre slave, une force de la nature » et que les meurtres d’enfants ont toujours profondément marqué l’opinion publique. Une opinion relayée par la presse locale.

 L’assassinat d’un enfant sans défense est particulièrement révoltant…. Il s’agit d’une cause indéfendable.

Extrait d’un article de Paris-Normandie du 11 mars 1948, repris dans l’ouvrage de JP Machain.

Il est exécuté le 24 août 1948, dans la cour de la prison Bonne Nouvelle de Rouen.

A cette date, personne ne se doute que cette exécution serait la dernière à Rouen. A tel point que le journal Paris-Normandie n’en fait écho qu’à travers quelques lignes rapportées par Jean Pierre Machin dans son livre.

Les voitures arrivent transportant les avocats, le président de la cour d’assises, le docteur… A 5h15 exactement, le couteau tombait. Le condamné est mort courageusement, sans prononcer une parole.

Dans l'Eure, le dernier condamné guillotiné s’appelle Charles Grenier. Il a été exécuté le 4 juillet 1947. 

L'homme âgé de 56 ans, bûcheron à Baux-Sainte-Croix, avait tué ses victimes à coups de fusil le 31 octobre 1945. Sa femme Pauline dont il était séparé, et sa fille Christiane, 20 ans, avaient reçu une décharge de chevrotines dans la tête.

Le destin "tragique" du dernier condamné à mort gracié dans la région 

Jacques Lerouge est le dernier condamné à mort dans l’Eure. Sa condamnation a eu lieu il y a 50 ans mais son exécution n'a jamais eu lieu. 

Le 5 juillet 1968, lors de sa fuite après le hold-up d’une banque à Vaux sur Eure, Jacques Lerouge, 28 ans, tue un industriel de 57 ans.

Reconnu coupable et condamné à mort le 1er décembre 1971, Jacques Lerouge qui devait être guillotiné dans la cour de la prison Bonne Nouvelle de Rouen a finalement bénéficié de la grâce présidentielle de Georges Pompidou. Il passera 17 années en prison et racontera son histoire dans un livre publié en 1996

A sa sortie, l'homme œuvre pour la réinsertion des anciens prisonniers au sein de l’Aperi, une association qui vient en aide aux personnes en voie de réinsertion, dans les Vosges. Des anciens détenus de longues peines. C’est l’un d’eux qui le 16 avril 2006, le tuera de 9 coups de couteau

 

 

Coupable ou non coupable ? Histoires criminelles de la Seine-Maritime

Coupable ou non coupable ? Histoires criminelles de la Seine-Maritime

A noter la sortie le 15 octobre prochain du dernier livre de Jean-Pierre Machain. L'auteur propose une compilation de dossiers judiciaires, du simple cambriolage au meurtre, parmi les plus emblématiques de la Seine-Maritime. Du meurtre d’Élise et Julien place du Vieux-Marché à Rouen, en passant par l’affaire du « Bon Dieu du Mont-Riboudet » accusé d’avoir immolé sa maîtresse en 1932, le carnage de Petit-Couronne, l’affaire des policiers collaborationnistes Alie et Madelaine, le meurtre de l’étudiant norvégien en 1976, l’agression mortelle du surveillant de la maison d’arrêt de Rouen en 1994 ou encore la boucherie de Saint-Jacques-sur-Darnétal en 2001. 

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