INFOGRAPHIES. 10 ans du Mariage pour tous : unions célébrées, homophobie persistante... Le bilan en Normandie

331 voix pour, 225 voix contre, 10 abstentions. Le 23 avril 2013, l’Assemblée nationale adoptait le projet de loi historique ouvrant le mariage aux couples de même sexe. La France allait alors devenir, quelques semaines plus tard, le 14e pays du monde à autoriser le mariage homosexuel. Dix ans après, on dresse le bilan.

La loi Taubira aura changé la vie de nombreux couples. Selon l’INSEE, plus de 70 000 mariages ont été célébrés en France depuis mai 2013, date de l’entrée en vigueur de la loi. Avec un boom en 2014 (10 500 unions), et une baisse en 2020 (4 600), liée à la pandémie de Covid-19 et aux nombreux événements ajournés.

Plus de 3200 mariages célébrés en Normandie

En Normandie, l’INSEE dispose de données précises jusqu’en 2021. Ces dernières révèlent toutefois une tendance : près de 350 mariages entre personnes du même sexe sont célébrés chaque année en Normandie, un chiffre relativement stable. On observe cependant, comme à l’échelle nationale, un boom en 2014 (504 mariages) et un effondrement en 2020, Covid oblige (220).

De 2013 à 2021, 3 248 couples de même sexe se sont dits "oui" en Normandie. Le tout premier "oui" avait résonné dans une mairie du Calvados. Cyrille et Éric avaient officialisé leur union le 8 juin 2013, à Hérouville Saint-Clair, près de Caen.

Le département qui a célébré le plus d’unions entre personnes de même sexe est la Seine-Maritime (1 202 unions). Viennent ensuite le Calvados (813 mariages), l’Eure (569), la Manche (401) et enfin, l’Orne, avec 263 mariages célébrés. Des chiffres qui s’expliquent en partie par les écarts de population, la Seine-Maritime étant le département le plus peuplé.

Les mariages LGBTQ+ représentent moins de 3,3% de la totalité des mariages célébrés en 2021 en Seine-Maritime. Mais ce taux est néanmoins plus élevé que la moyenne nationale : la même année, sur les 219 000 mariages célébrés en France, seuls 2,93% concernaient des couples de personnes du même sexe.

"Pis-aller juridique" pour les familles homoparentales

Mais tout n'est pas encore rose, dix ans plus tard, et l’égalité est loin d’être atteinte, rappelle Nicolas Faget, porte-parole de la branche normande de l’APGL (Association des parents gays et lesbiens). Depuis 2013, l’association comptabilise environ 2 000 adhérents – 40 en Normandie – avec un turn-over important : "on en perd 500 et on en regagne 500 chaque année", au fur et à mesure que les familles accèdent à la parentalité.

Nicolas Faget se réjouit tout de même de belles avancées en dix ans. "Les techniques sont de plus en plus accessibles, la légalisation du mariage a permis la reconnaissance et la sécurisation des familles. Il n’y a plus de séparations, de drames suite à un décès, de successions qui se passent mal, puisque les deux parents peuvent être reconnus."

Mais les couples homosexuels, mariés ou non, qui se tournent vers la parentalité, se heurtent encore à de nombreuses barrières administratives. "A partir de 2013, on a conseillé aux gens de se marier et d’adopter, ce n’était pas toujours de bon cœur. On a forcé les familles homoparentales à se marier, et à adopter leurs propres enfants… Ce qu’on ne fait pas avec les couples hétérosexuels !", dénonce Nicolas Faget, soulignant : "C’est une grande discrimination, un pis-aller juridique pour protéger les familles. Mais aujourd’hui, on aimerait pouvoir établir notre filiation comme les autres."

On souhaite pouvoir établir la filiation de la même manière que les couples hétérosexuels : un enfant arrive dans une famille, et l’autre parent va le déclarer en mairie, comme un père à qui l’on ne demande ni test génétique, ni preuve de la conception !

Nicolas Faget, porte-parole de l'APGL Normandie

En 2018, l'ancienne responsable du service adoption au département de Seine-Maritime avait suscité une vive polémique en déclarant que les couples homosexuels n’étaient "pas exclus", mais "pas prioritaires" dans le processus d’adoption, et qu’ils devaient, étant "eux-mêmes un peu atypiques par rapport à la norme sociale mais aussi la norme biologique", s’ouvrir à "des profils d’enfants atypiques, un enfant dont personne ne veut".

"De son homophobie professionnelle, elle a fait énormément avancer les choses", estime aujourd'hui Nicolas Faget, la remerciant "ironiquement". "Elle a permis de verbaliser ce genre de pratiques et a déclenché l’enquête qu’on attendait depuis longtemps. Et aujourd’hui, on n’a plus besoin d’être marié pour adopter, c’est valable pour tout le monde. On avance, mais on n’est pas encore arrivé à l’égalité qui était scandée à l’époque à l'Assemblée nationale."

L’homophobie et la transphobie encore trop ancrées

A l'image de ces déclarations polémiques, l'homophobie demeure une problématique majeure depuis une vingtaine d'années et les statistiques de violences "LGBTIphobes" (actes ou paroles offensantes pour les personnes lesbiennes, gays, trans ou intersexes) restent inquiétantes. 

Chaque année, SOS Homophobie publie un rapport, à l’aube de la journée mondiale de lutte contre l'homophobie et transphobie, le 17 mai, recensant le nombre de témoignages faisant état de ce type de violences. Dans son rapport de 2022, l’association annonce avoir collecté plus de 1 500 témoignages reçus via ses pôles d’écoute et de soutien aux victimes de LGBTIphobies.

Si le chiffre est en baisse de 16,5% par rapport à 2020, l'association pointe une migration des violences, avec notamment une forte augmentation des cas de transphobie, deuxième type de LGBTIphobie relevé par leurs pôles d’écoute. Les lesbiennes, en particulier celles qui vivent en couple, auraient également été plus stigmatisées.

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