La Mona Rigolet a effectué son tout dernier voyage entre Cherbourg et Saint-Malo ce jeudi 2 janvier. Le canot tous temps de la station SNSM de Goury (Manche) prend sa retraite après 35 ans de services. Les membres de l'équipage ont la gorge serrée : "C'est un vieille dame. Elle a sauvé des vies"
Comme de bien entendu, la mer était formée quand la Mona Rigolet a franchi le cap de la Hague. L'endroit n'est pas connu pour être des plus paisibles, surtout en plein hiver. "Il en a vu. C'est quand même un bateau qui a navigué dans des mers difficiles. Par chez nous, c'est souvent le cas", raconte Yoann Sanson, le patron de la station SNSM de Goury.
Sur sa page Facebook, l'équipage écrit : "Dernier appareillage de Cherbourg, dernier appel VHF à la vigie, dernier salut à notre délégué départemental… Dernier coup de VHF à l’abeille Liberté… Dernier passe à terre du phare. Route Saint-Malo pour le dernier transit pour la station. Une page se tourne… Ça restera un fabuleux bateau". Les vedettes SNS de Dielette et de Fermanville l'ont escorté pour lui adresser un dernier salut.
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"J'ai pleuré quand il est parti", reconnaît Yoann Sanson. "Ce n'est pas juste un numéro de coque. Cela fait 26 ans que je navigue dessus". Après 35 ans de services, la Mona Rigolet a été convoyée jusqu'à Saint-Malo. Le bateau va être remis en état dans les ateliers de la SNSM pour servir de navire de réserve, pour dépanner les stations situées en Bretagne et en Normandie. "Ce sera notre mulet. J'étais content quand j'ai su qu'il n'allait pas être détruit".
562 sauvetages au compteur
Au moment de se dire au revoir, les souvenirs se bousculent. "En 1999, le bateau d'Alain Gautier et Michel Desjoyaux s'était retourné. On l'avait remorqué pendant 28 heures dans le gros temps. Ce n'était que ma troisième mission, raconte Yoann Sanson. Dans le feu de l'action, on se concentre sur le job. Parfois, une fois à quai, on se disait qu'on avait pris cher".
La station de Goury a fait ses comptes. Le canot a réalisé 562 sauvetages, du simple remorquage de plaisanciers jusqu'à l'assistance de chalutiers en difficulté. C'est un bateau qui a sauvé bien des vies.
Reportage tourné en 2007 à l'occasion du 40ᵉ anniversaire de la station de Goury :
La Mona Rigolet était l'un des 33 canots tous temps de la SNSM. "Le cahier des charges, c'était un bateau insubmersible, auto-redressable et costaud. Il avait bien toutes ces qualités, mais l'ergonomie est nulle. C'est un bateau bruyant, qui vibre de partout. Il faut faire le grand écart à la barre. C'est un bateau vaillant mais sa limite, c'est le bonhomme".
55 nœuds, 6 mètres de creux
Un nouveau bateau équipe la station située à la pointe de la Hague. La Mona Rigolet 2 est arrivée en juin. Elle est entrée en service actif en décembre. C'est un canot de nouvelle génération silencieux qui impressionne les équipiers par son confort et son comportement en mer. Les premières sorties par gros temps rassurent.
"C'est important pour nous de faire ce genre de test aussi pour essayer le nouveau matériel dans des conditions réelles. L'autre jour, nous avions 55 nœuds, 6 mètres de creux. Le bateau nous a bluffé. C'est important de tester ses limites".
La Mona Rigolet 1 était une vieille dame un peu rude. "C'était un bateau techniquement dépassé. Il faisait 13°C à bord quand on est parti pour Saint-Malo alors que le nouveau a la climatisation et le chauffage". Mais les équipiers le connaissaient par cœur. La Mona inspirait confiance. Pour un sauveteur en mer, cela n'a pas de prix : "C'est un bateau à qui on confie nos vies."
