Le frelon asiatique, redoutable prédateur : "une seule colonie prélève 11 kilos d'insectes dans la nature"

Cette espèce invasive ne cesse de proliférer. Ces nids se comptent par milliers. Or, le frelon asiatique n'est pas seulement gourmand d'abeilles. Chaque année, il dévore des tonnes d'insectes. Ce n'est pas une bonne nouvelle pour la biodiversité.

Les spécialistes sont circonspects devant le phénomène : le frelon asiatique, qui est supposé préférer un climat doux et humide, semble adorer cet été chaud et sec. Dans le département de la Manche où la végétation meurt de soif, plus de 3000 nids ont déjà été détruits depuis le mois de mars, soit trois fois plus que l'année dernière. "Jamais de résultats aussi élevés n’ont été relevés à cette période, depuis l’arrivée du frelon asiatique dans le département de la Manche", explique le Conseil départemental.

Faut-il vraiment continuer à lutter face à cette espèce invasive que rien ne semble contenir ? Le combat a en effet un coût pour les collectivités qui, pour la plupart, financent la destruction des nids. Dans la Manche, la destruction des colonies ne coûte rien aux particuliers. La lutte contre le frelon est confiée à la FDGDON. le conseil départemental lui alloue 100 000 euros par an. Le département soutient aussi un programme de recherche "afin de réduire l'impact du frelon asiatique à défaut de pouvoir l'éradiquer".

Au départ, il s'agissait de venir en aide aux apiculteurs puisque les premiers signes de la présence de cet insecte invasif se sont fait sentir dans les ruches. En été, les ouvrières se mettent en quête d'une nourriture plus riche qu'elles trouvent aisément dans le thorax des abeilles. Les dégâts peuvent être considérables.

Le frelon asiatique est arrivé en France en 2004, probablement dans une cargaison de poteries chinoises. En quelques années, il s'est imposé dans toute la France. Les premiers spécimen ont été repérés dans la Manche en 2011. Une étude publiée l'année dernière par le Museum national d'histoire naturelle permet de mieux apprécier les dégâts commis par cette espèce invasive. "En se postant à l’entrée des nids avec un filet, les chercheurs ont intercepté 12 200 frelons et leur ont dérobé 2 151 proies". Le frelon asiatique ne dévore pas que les abeilles.

Des tonnes d'insectes engloutis

L'inventaire donne une idée plus précise du régime alimentaire de la bête. " Le Vespa velutina (c'est son petit nom scientifique) "chasse des abeilles domestiques (38.1 %), des mouches (29.9 %) et des guêpes sociales (19.7 %), ainsi qu’un large spectre d’autres arthropodes (au moins 159 espèces)". En ville, le frelon asiatique mange principalement des abeilles. À la campagne, il trouve davantage de guêpes.

L'étude a aussi le mérite de donner une idée des quantité ingérées. "Le frelon asiatique capture des insectes pour nourrir ses larves. Il en confectionne une boulette riche en protéines. Aussi, en comparant le poids sec de ces boulettes à celui des larves du frelon asiatique, et en tenant compte de la dynamique de la colonie, les chercheurs ont estimé qu’une seule colonie de frelons asiatiques consomme en moyenne 11,32 kg d’insectes en une saison (de mars à octobre)" affirme le Museum national d'histoire naturelle.

"11 kilos d'insectes ! Et encore, c'est certainement sous estimé", explique Eric Darrouzet. Ce chercheur de l'université de Tours dirige l'institut de recherche sur la biologie de l'insecte (IRBI). Le département de la Manche lui a confié le soin de trouver comment lutter contre cet insecte. 

Dans la Manche, on trouve en moyenne 5000 nids chaque année, mais il y en a des centaines qu'on ne trouve pas. Si on fait un petit calcul, 5000 colonies, cela représente 60 tonnes d'insectes prélevés dans la nature. l'impact écologique est énorme.

Eric Darrouzet, institut de recherche sur la biologie de l'insecte (IRBI)

France 3 Normandie

Cette prédation n'est pas une bonne nouvelle alors que les populations d'insectes s'effondrent . Le frelon asiatique entre en concurrence avec son homologue européen et avec les oiseaux qui ont aussi besoin de protéines en été. C'est la raison pour laquelle Eric Derrouzet préconise de ne pas baisser la garde. "Si on arrête de lutter, on a un risque d'une explosion du nombre de colonies. Dès qu'on repère un nid de fondation, il faut l'éliminer. Retirer une colonie active jusqu'à la période de reproduction qui est début septembre, cela signifie qu'on aura moins de fondatrices libérées dans l'environnement. Ce n'est pas inutile".

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