De Lyon à Strasbourg en passant par Bordeaux, la vague verte a déferlé en France. Quid de la Normandie ? Aucune grande ville n'a été gagnée dans la région par les écologistes. L’épisode Lubrizol a crée un choc, mais n’a pas bouleversé la donne.
C’est totalement inédit. En France, 15 grandes villes se sont parées de vert. Mais la Normandie reste la grande absente de ce raz-de-marée. Aucune grande ville n’a été gagnée dans la région par les écologistes.
Pourtant, après l’incendie de Lubrizol, Jean-Michel Bérégovoy, candidat Europe Ecologie Les Verts à la mairie de Rouen, s’était senti poussé des ailes. Notre sondage exclusif réalisé avec l’institut Ipsos avec France Bleu Normandie le plaçait en tête du premier tour des municipales avec 24% . L’épisode Lubrizol semblait avoir éveillé la conscience écologiste des rouennais, choqués par l’ampleur de cette catastrophe industrielle, inquiets des retombées sur l’environnement et leur santé.
Pourtant au premier tour, c’est le candidat socialiste Nicolas Mayer-Rossignol qui a remporté la majorité des suffrages avec sa liste "Fiers de Rouen".
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David Cormand n'est pas surpris
David Cormand, député européen EELV, n’a jamais cru que l’épisode Lubrizol allait rebattre les cartes :
"J’ai toujours été très sceptique sur le fait que l’incendie de Lubrizol change le vote des électeurs. Qu’il change les mentalités, oui, qu’il crée un choc, d’accord…Mais vous savez, la Normandie est une terre où le travail d’implantation sur l’écologie reste encore à faire. C’est compliqué car le modèle économique est traditionnel et l’agriculture est encore plutôt intensive. Mais ça bouge ! Ca a progressé !"J’ai toujours été très sceptique sur le fait que l’incendie de Lubrizol change le vote des électeurs.
"Il n’y a pas que la flamboyance de la victoire, il y a les progrès de l’implantation"
"C'est loin d’être un échec", précise le député européen. "Il n'y a pas que la flamboyance de la victoire, nous avons vraiment progressé. Plusieurs villes ont été gagnées grâce à des listes d’union de la gauche. Les alliances ont payé. A commencer par Rouen, bien sûr ! Avec 23,15 % des voix au premier tour, nous avons doublé notre score par rapport à 2014. La mairie a été gagnée grâce à la fusion, et nous allons représenter une force majeure au sein du conseil municipal. Il n’y aurait pas de majorité municipale sans les verts d’ailleurs ! Les listes d'union de la gauche ont aussi fonctionné à Sotteville-lès-Rouen, ou à Bois-Guillaume."
"Il faut aussi regarder les villes où nous avons réalisé des bonds en avant"
Au Havre, il y a eu une percée écologiste au premier tour, et nous regrettons évidemment qu'il n'y ait pas eu d'alliance avec la liste de Jean-Paul Lecoq. Ca aurait pu changer la donne. A Elbeuf, nous avons réalisé 11 % au premier tour, et nous n'avions jamais eu de liste écologiste auparavant. C'est très positif. Et puis nous pouvons également cité Caen, où la liste EELV a également obtenu un score inédit."En effet, le maire sortant divers droite Joël Bruneau a été réelu dès le premier tour, mais la liste de l’écologiste Rudy L'Orphelin a obtenu huit sièges, avec 25,56 % des voix exprimées.
Laetitia Sanchez, seule élue verte en Normandie
"Une mairie a été remportée dès le 15 mars dans l'Eure, par une élue écologiste.", indique David Cormand. "C'est une petite commune, mais c'est un signe que notre implantation progresse."Cette élue, c'est Laetitia Sanchez, étiquetée EELV, arrivée en tête du premier tour aux municipales de Saint-Pierre-du-Vauvray avec 53,85 % des suffrages. Pour la nouvelle élue, le fait qu'il n'y ait pas eu de vague écologiste en Normandie reste "une déception", mais elle aussi souligne les avancées écologiques, notamment à Rouen. Elle est persuadée que l'alliance des verts avec Nicolas Mayer-Rossignol va "changer le visage de la métropole", pour en faire une "métropole verte"
Nicolas Mayer-Rossignol s'est emparé dès le premier tour du thème de l'écologie. Je pense qu'il est sincère.
"Je suis évidemment heureuse, mais je relativise . Nous sommes un petit village de 1200 habitants. L'écologie apparaît dans nos projets quotidiens, sur les espaces verts, la circulation ou les économies d'énergie. Mais ça n'a rien à voir avec les grandes villes."
"Depuis que je suis élue, plusieurs administrés viennent me voir, et me parlent de pollution, de produits chimiques. Les gens sont de plus en plus sensibles à cela. A notre modeste niveau, nous enclenchons des projets comme une réhabilitation de friches industrielles. Nous avons peu de moyens, contrairement aux grandes villes où les projets d'ordre écologiques peuvent vraiment changer les choses."Ce qui est intéressant, c'est de montrer que dans les petits villages, on peut changer le regard des gens sur la question environnementale.
Il est certain que sur le plan national, Europe Ecologie Les Verts devient, grâce à ces élections, une formation incontournable au sein de la gauche. Avec ce succès historique, les écologistes ont enclenché un virage qui change la donne au sein du paysage politique français.