Municipales 2020 : "Si j'étais maire"... Ce que nous disent les jeunes Normands

Quand on a vingt ans, les études et le devenir professionnel préoccupent bien davantage que les élections municipales. Pourtant, ce scrutin à part intrigue : "ce sont des gens qu'on connaît. C'est concret. C'est palpable. J'ai l'impression que la vraie démocratie, c'est ça" explique Hugo.

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  • Loin des yeux, loin du coeur : comment s'intéresser au sort d'une commune quand on n'y habite plus ? 


Le bac n'est peut-être plus ce qu'il était (et demain, qui sait, encore moins ?). Mais la proclamation des résultats dans le préau des lycées au mois de juin demeure un rite de passage, un premier tournant dans l'existence. C'est le moment où une génération quitte le cocon familial... et se coupe de la ville natale. À la rentrée de septembre 2018, Axelle est allée étudier à Rennes. Cette année, pour changer de voie, elle s'est inscrite à l'IUT d'Alençon. "J'ai un studio en ville. J'ai des amis ici. Et un job. C'est vrai que je ne rentre pas souvent chez moi le week-end." Dès lors, comment se sentir concernée par la campagne électorale qui s'ouvre à Caen, la ville où elle a été inscrite le jour de ses 18 ans ?
 

Si Axelle était maire...

 

Si j'étais maire, je m'intéresserais aux problèmes de l'accès au logement. Et puis j'insisterais sur la jeunesse et l'éducation. Surtout, je n'aurais pas d'étiquette politique ! Les habitants doivent pouvoir se reconnaître à travers leur maire. Or, une étiquette, c'est la première chose qu'on voit.



Clara, "bientôt 20 ans", a pris son envol l'année dernière. "Parcoursup" l'a orientée vers Blois. Elle est actuellement en stage dans une agence de voyages. Si tout va bien, elle décrochera un BTS tourisme en juin qui lui permettra de poursuivre ses études à Caen. Elle croque la vie. Elle regarde devant. Alors les municipales dans son village natal de la Hoguette, près de Falaise... "Je n'y prête pas vraiment attention. Pourtant, mes grands-parents sont à la mairie. Mes parents vont m'en parler, c'est certain, mais je pense que je n'irai pas voter."

"À la rigueur, l'élection à Alençon m'intéresserait davantage, renchérit Axelle. Mais quel sens cela aurait de voter ici, alors que dans deux ans j'aurai quitté la ville ?" Par civisme, elle participera à l'élection. "Mais je ne sais même pas qui est candidat. Je vais voter, mais j'ai du mal à me sentir concernée. À la limite, je ferais bien une procuration en disant à mon père de voter pour qui bon lui semble. Au moins, lui, ça le concerne". Au fait, le premier tour des municipales est prévu le 15 mars.

 
  • À bas les étiquettes ! Contre la vieille politique, et les partis "qui ont vocation à disparaître"



"Honnêtement, les municipales, aucun de mes amis ne m'en a encore parlé", admet Emma, 23 ans. La politique, elle baigne dedans. Le sujet occupe bien des conversations à la maison. "On n'est pas toujours d'accord". Elle habite chez ses parents, à Caen. Cette étudiante en psychologie à l'université de Caen ira voter. "C'est certain. Mais j'avoue que je ne suis pas encore renseignée. Une chose est sûre, l'étiquette des candidats, je m'en fous complet !"

"Le politique, ça ne m'intéresse absolument pas, poursuit Clara, jointe au téléphone pendant sa pause. La gauche, la droite, je m'en fous. Les deux extrêmes, c'est non, mais entre les deux, je ne suis rien du tout". "Ce qui m'intéresse, c'est ce que disent les candidats" insiste Emma. Et puis, Axelle croit le savoir, "les partis politiques ont vocation à disparaître". 

Si Hugo était maire...

 

Si j'étais maire, j'aimerais développer la production de nourriture locale, et encourager les artisans et les entreprises proches. C'est un peu utopique, mais il n'y a que comme ça qu'on luttera contre les excès de la société de consommation. C'est un domaine dans lequel j'aimerais agir. Mais heureusement, ça bouge déjà.


"La politique, c'est non, mais il y a plein de choses qui m'intéressent, précise Clara. La place des femmes, la misère, l'environnement. Mais d'ici à écouter un débat pendant une heure..." Se désintéresser de la vie politique ne doit pas être assimilé à un rejet de la chose publique. Emma raconte : "entre nous, on parle des gilets jaunes, des manifestations, des violences policières"...

 

  • Face à l'urgence climatique, ils veulent "du concret"


"Etonnamment, les municipales, ça m'intéresse, sourit Hugo. Avant la politique, les élections, ça ne me concernait pas. Mais je me rends compte que notre vote peut avoir une influence." Est-ce parce que, à 23 ans, ce grand brun sympathique a mis un pied dans la vie active ? Après des études de communication, il a décidé d'effectuer un service civique dans une association culturelle près de Caen. "Par exemple, chez moi, à Lion-sur-mer, si on a un cinéma associatif, c'est parce qu'il y a un soutien financier. Et puis j'ai l'impression que les municipales sont moins politiques. Là, ce sont des gens qu'on connaît. C'est concret. C'est palpable. J'ai l'impression que la vraie démocratie, c'est ça".

Si Emma était maire...

 

Si j'étais maire, ma priorité serait l'écologie. Il faut plus en parler dans les écoles, faire de l'éducation. Il y aurait plus de poubelles, plus de fumoirs. J'organiserais des journées pour nettoyer les plages, les rues. Je voudrais vraiment dynamiser tout cela. 


"Le maire, c'est quand même celui qui va comprendre les populations. Il est au plus proche", insiste Axelle. De là à répondre aux attentes des plus jeunes de leurs électeurs... "Le point primordial pour nous, c'est l'environnement, l'écologie", résume Emma. Et c'est peu dire que la politique menée en France à ce sujet ne la convainc guère.

Hugo y voit l'illustration d'un fossé générationnel : "Ceux qui sont nés dans les années 50/60 ont moins conscience de l'importance du réchauffement climatique. Ils étaient dans la consommation, dans la croissance, dans les oppositions entre la droite et la gauche. Nous on a peut-être une vue plus globale pour aborder les questions comme l'écologie, ou les problèmes migratoires. Quand on s'intéresse aux migrants qui dorment dehors, ça rejoint très vite les problèmes climatiques".


Clara... ne veut pas être maire



Dans ce monde aux contours incertains, l'angoisse du lendemain est un compagnon de route du quotidien. "C'est vrai que parmi mes amis, on est nombreux à ne pas savoir ce qu'on va faire plus tard. On est complètement perdu, se désole Emma. L'étudiante en psychologie observe avec désarroi la génération de son petit frère et de sa petite soeur : "dans les lycées, on leur remplit la tête d'âneries. Avec la réforme du bac, on leur dit qu'il faut avoir de bons résultats partout, sans quoi ce sera l'échec assuré. Ils vivent dans l'obsession de l'orientation et et des études. Ils ont trop de pression". Cela laisse peu de temps pour penser aux municipales.








 
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