Plus gros, plus jeunes. Voilà qui résumerait la tendance propre au surpoids des enfants et des adolescents. Mais comme perdre du poids n’est pas si simple, Normandie Pédiatrie est chargée d’aider les familles et de les accompagner.
Pour saisir le phénomène, un détour par quelques chiffres s’impose. Les statistiques sur l'obésité infantile sont peu nombreuses. Pourtant, elle permettent de prendre la mesure du surpoids qui frappe une partie de la jeunesse.
La corpulence des moins de 18 ans enfin étudiée
Une étude d’Obépi-Roche demandée par la ligue contre l’obésité établit enfin clairement ce constat : en France, en 2020, 34% des enfants de 2 à 7 ans et 21% des enfants/jeunes de 8 à 17 ans sont en situation de surpoids ou d’obésité.
La plupart de ces enfants en surpoids sont des garçons, et sont issus des classes populaires.
Des enfants de 4 ans en surpoids avancé
Ce constat est validé par Pauline Vallois, pédiatre à Flers (61) et collaboratrice auprès de Normandie Pédiatrie. « Dans la pratique, on voit que les enfants sont de plus en plus gros, de plus en plus jeunes. Il n’est pas rare de recevoir en consultation des enfants de 3 à 4 ans, déjà en surpoids avancé » note-t-elle.
Ce qui n’est pas nouveau c’est que les raisons du surpoids et de l’obésité sont multiples. Environnement familial où sont instaurées de mauvaises habitudes alimentaires dès le plus jeune âge, manque d’activité physique et/ou besoin d’aide psychologique.
le facteur génétique, la programmation du corps d’un enfant à devenir obèse existe bel et bien, mais ce n’est pas le cas le plus répandu lors des consultations
Pauline Vallois
On parle d’environnement « obésogène », qui incite à nous rendre plus gros. « Une tendance plus installée dans les milieux sociaux défavorisés où la notion d’aliment-santé existe moins » précise Pauline Vallois.
Les différents outils pour lutter contre le surpoids :
- Bannir l’idée de régime
Evidemment, la lutte contre le surpoids est immédiatement associée à la notion de « manger mieux ». Qui ne signifie pas « manger moins ».
Je suis formellement opposé à la notion de régime et de centre d’amaigrissement
Jean-Christophe Paon
Le pédiatre bayeusain Jean-Christophe Paon précise : « pour que la perte de poids soit efficace, il faut que ce soit durable ce qui nécessite de modifier les habitudes alimentaires. Ceux chez qui ça marche le mieux sont ceux dont les parents me disent qu’ils ont eux aussi perdu du poids. »
Pauline Vallois évoque « un enfant dont les parents avaient divorcé. Toute communication entre eux était impossible, mais quand leur enfant leur a demandé d’être avec lui lors des séances, ils ont répondu présent. Cette mobilisation autour de l’enfant est déjà une victoire dans le processus de prise en charge. »
- L’indispensable soutien de la famille
Le soutien des parents, grands-parents, et même des nounous parfois est un élément essentiel. Mais il faut aussi que l’enfant lui-même ait la volonté de perdre du poids.
La diététicienne Emilie Leconte, membre de la Ligue contre l’obésité du Calvados le remarque lors de ses rendez-vous avec les petits normands : « Il faut que l’ensemble de la famille soit prête à changer ses habitudes mais la volonté de l’enfant concerné est essentielle aussi. Les plus jeunes, ne souffrent pas forcément du regard des autres, avant l’entrée au collège. Ensuite, il peut y avoir un déclic, l’adolescent a envie de plaire. Là, il est vraiment prêt à être acteur dans sa prise en charge. »
- De l'exercice
Autre élément dans le parcours de prise en charge de l’obésité infantile : l’activité physique. « Et on ne parle pas de sport ! » précise la pédiatre Pauline Vallois.
On incite plutôt à jouer à cache-cache, aux jeux de ballons, et aller à pied à l’école ou au square. Il faut une heure par jour d’activité pour un enfant. Cela nécessite donc de lutter contre la sédentarité induite par les écrans, et rééquilibrer le sommeil.
Pauline Vallois
Emilie Leconte, diététicienne, estime aussi que l’activité physique est « essentielle non pour perdre du poids mais pour un mieux-être chez l’enfant et l’adolescent. C’est un véritable soutien. »
- Accompagnement psychologique
Ce soutien peut aussi être psychologique, c’est le dernier volet de l’accompagnement des enfants qui ont des kilos à perdre.
Ce n’est pas un choix d’être gros
Jean-Christophe Paon
La démarche du docteur Jean-Christophe Paon est directe : « Je commence en les déculpabilisant : ce n’est pas un choix d’être gros. Et je leur rappelle la définition de la santé : c’est d’être bien dans son corps, dans sa tête et dans un tissu social. On n’est pas seulement une silhouette que l’on a envie d’avoir. D’ailleurs la perte de poids n’est envisageable que si les enfants que l’on suit vont bien dans leur tête. »
Une manière de parler, en creux, des souffrances traversées par les enfants et adolescents en surpoids, souvent victimes de ce que l’on qualifie de grossophobie.
Rendez-vous psy, diététicien… qui paye les factures ?
Ça en fait des leviers à actionner afin de guider un enfant sur le chemin de la perte de poids… Mais à quel prix ? La question se pose parce qu’un rendez-vous chez une diététicienne ou un psychologue n’est en général pas remboursé.
C’est là qu’intervient l’aide de Normandie Pédiatrie. Cet organisme est missionné par l’Agence Régionale de Santé pour accompagner les familles dont les enfants sont en surpoids.
Et cela signifie payer les factures des rendez-vous. « La prise en charge est souvent longue. Rien que l’établissement d’un bilan psychologique peut varier de 180 à 300 euros selon les régions. C’est l’ARS qui finance ces coûts, en prenant en compte le quotient familial » précise Marine Erard directrice adjointe de Normandie Pédiatrie.
Autre exemple : un rendez-vous chez une diététicienne coûte entre 35 et 50 euros, et peut être intégré au parcours de prise en charge par Normandie Pédiatrie.
La structure contribue aussi à former les professionnels de santé, et coordonner les parcours de santé pour permettre aux familles d’accéder aux soins – gratuitement quand c’est possible.
Planeth patient basée à Hérouville-Saint-Clair (14) propose un autre soutien en permettant aux jeunes obèses de participer gratuitement à des ateliers en groupe ou individuels, organisés dans toute la Normandie.
Mieux vaut prévenir le surpoids
Mais comment procéder ? Tous les praticiens sont d’accord sur un fait : un outil existe bel et bien, et il est en possession de chaque parent (et de chaque médecin) : ce sont les courbes de croissance et de poids qui figurent dans le carnet de santé des bambins.
La meilleure façon de perdre du poids est de ne pas en prendre
Émilie Lecontediététicienne pour la ligue contre l'obésité
« Et ça concerne tous les enfants, quel que soit leur gabarit : il est essentiel de tracer ces courbes, afin d’avoir un tracé de référence, une courbe témoin qui permet ensuite de détecter le plus tôt possible un changement, même minime. Et ce, avant même que l’IMC ou indice de masse corporelle ne révèle un début de surpoids» , affirme la pédiatre Pauline Vallois.
Le docteur Jean-Christophe Paon insiste : « peser et mesurer les bébés et les enfants, c’est le premier degré du dépistage. Un début de surpoids n’est pas toujours vu, détecté par les parents, ce n’est pas simple de voir les changements. » Pour lui, la prévention devrait même toucher les parents d’enfants âgés de 0 à 2 ans.
Un autre outil est simple à utiliser : c’est le calcul de l’IMC (ou indice de masse corporelle). La formule permet de savoir si d’un point de vue de la santé, on est en surpoids, en obésité, ou pas (voire en sous-poids) Le calcul correspond au poids (en kilos) divisé par la taille (en mètres).
Les médecins, pédiatres maitrisent cette donnée et de nombreux calculateurs existent pour vérifier l’IMC de votre enfant.