C’est un artiste fantasque qui fait régulièrement parler de lui. Le mayennais Christian Poincheval a construit un œuf monumental avec des sacs plastiques au milieu de la galerie d’un centre commercial d’Alençon. Une réflexion sur la pollution mais aussi sur le confinement.
Lorsque les clients de ce centre commercial près d’Alençon franchissent la porte automatique, ils restent bouche bée, façon gobage d’œuf ! Car au milieu de la galerie marchande trône une sculpture monumentale de 8 mètres de haut et 7 mètres de diamètre. A l’intérieur, une charpente en bois qui donne à la structure des airs de cathédrale. Deux documentaires du commandant Cousteau et de Yann Arthus Bertrand y sont diffusés en boucle, à côté de sculptures en coquilles d’œufs.
Christian Poincheval a passé trois mois à créer cette œuvre gigantesque qu’il a recouverte de 1 200 sacs plastiques recyclés. Un œuf qui repose sur une mer, là aussi, en plastique. L’artiste observe, amusé, les réactions des clients qui pénètrent dans le supermarché. Même s’il se tient en retrait, difficile de le manquer avec son éternel bleu de travail, ses lunettes rondes, son chapeau melon et sa barbe de Père-Noël.
Mesures barrières obligent, le voici maintenant aussi affublé d’un masque fait-maison sur lequel il a écrit un message d’amour à destination de toutes les personnes qu’il croise. Il n’est pas question que « ce satané coco-virus » – comme il l’appelle – l’empêche d’aller à la rencontre des autres et de les interpeller.
Dans un centre commercial, on peut remplir sa tête en plus de son caddy. Avec cet œuf, je veux que les consommateurs s’interrogent sur l’avenir de notre planète. L’œuf, c’est positif, c’est la fécondité, le ventre de la mère, la nourriture. Plastiquement, ça a quelque chose de magique, c’est une forme parfaite. Salvador Dali a beaucoup travaillé autour de l’œuf.
Christian Poincheval est un artiste hors-norme, à la fois performeur, plasticien et inventeur. On lui doit le café liquide en brique, la pilule qui parfume les flatulences ou encore, dans le même registre, le papier toilette imprimé, « pour lire sur le trône ».
Une famille d’artistes qui aime les oeufs
Les Poincheval sont une famille d'artistes du nord Mayenne qui font régulièrement parler d'eux
Le fils, Abraham, est notamment connu pour ses « happenings ». Le plasticien a justement l’habitude d’interroger le public sur la thématique du confinement, de l’enfermement et du rapport de l’homme à la nature. Après, par exemple, s’être enfermé dans une pierre creuse pendant une semaine, ou dans un ours naturalisé, il a couvé des œufs de poule au Palais de Tokyo à Paris pendant trois semaines et donné naissance à neuf poussins.
Une performance qui a inspiré le père Poincheval qui veut alerter sur l’urgence climatique.
Le coco-virus est le premier boom, mais ce ne sera pas le dernier. Le réchauffement climatique transforme la planète. Nous sommes en train de nous autodétruire, de nous suicider. Nous, citoyens, nous devons être des résistants. Il nous faut conscientiser les pollueurs.
Pendant la durée du confinement, Christian Poincheval a respecté les règles à la lettre et « n’est pas sorti de son œuf », mais il a tout de même poursuivi une autre œuvre, devant chez lui, pour interpeller les gens de passage. Ceux qui ne pouvaient se rendre que d’un point A à un point B sans interaction possible.
Depuis 7-8 ans, je peins la route devant chez moi. J’appelle ça des « vitraux-routaux". Ce sont des fresques avec des messages, des slogans positifs comme « C’est quoi le bonheur ? », « Fraternité, fraternité ». Un peu comme Ben, vous voyez ? Il a des messages basiques mais très puissants. L’objectif est de faire s’arrêter les gens, ou du moins ralentir. De les interpeller. Il faut que l’art résiste, bouge les gens.
L’artiste a prévu de peindre 1km5 de route. Quant à son œuf, il va trôner dans le centre commercial jusqu’au mois de décembre prochain. Plusieurs surprises artistiques vont ponctuer cette exposition, qui comme l’œuf, ne tourne pas tout à fait rond.