Sollicités par de nouveaux consommateurs pendant le confinement, des producteurs normands locaux ont vu cette clientèle disparaître lors du déconfinement. Un peu amères, certains préviennent toutefois : "On va être ouvert tous les jours" pendant le reconfinement.
"Bien sûr que nous seront ouvert, tous les jours au niveau de la boutique", prévient Eric Robert producteur de fromage de chèvre et président du magasin Cotentin Terroir. Cette association de producteurs propose des viandes, poissons, produits laitiers, pain et gâteaux locaux dans ses boutiques de Cherbourg et de Carentan (Manche). Même son de cloche du côté de la Ferme des Tertres à la Chapelle Près Sées, dans l’Orne. "On va continuer à travailler, on va vendre en respectant les gestes barrières", souffle Vincent Besniard, co-gérant de la Ferme. Tous deux avaient déjà confirmés en juin dernier, pour France 3 Normandie, la perte d'une clientèle gagnée pendant le confinement lié à l'épidémie de coronavirus."Nous avions connu une baisse de notre chiffre d'affaire hebdomadaire les deux premières semaines du confinement puis on l'a récupéré en plein confinement, avec de nouvelles têtes, alors qu'on été ouvert que trois jours par semaine. Au moment du déconfinement, pendant trois semaines on a continué sur une augmentation de notre chiffre d’affaire puis il y a eu une diminution", regrette Eric Robert. "J’ai bien compris comment ca fonctionne, souligne Vincent Besniard, cette nouvelle clientèle ce n'est pas quelque chose qui dure. Lors de la crise du lait en 2010 les gens s'étaient retournés vers les agriculteurs et après c’était fini", remarque-t-il.
Et si les anciens clients sont toujours fidèles, l'espoir de voir de nouvelles manières d'acheter était bien présente. "On voudrait tellement que les gens changent leur réflexion sur la manière de consommer", explique Eric Robert alors que beaucoup de leurs clients étaient "contents de retrouver le vrai goût des produits, du beurre, du porc", se rappelle celui qui est aussi agriculteur.
"C’est très dur de casser les routines"
Et si l'amertume de ces producteurs normands est palpable, ils ont conscience de la reprise d'un quotidien encadré par le travail.Interrogé en juin dernier, Frédérick Lemarchand, professeur de sociologie à l’université de Caen, travaille sur la question du changement des modes de vie. Il associe le déconfinement à un retour à la normale et donc à un "retour aux habitudes de consommation".Les gens ont repris le rythme de leur vie avec le travail et les grosses courses du samedi aux supermarchés. Matériellement c’est plus facile de faire comme ils font
"C’est très dur de casser les routines", souligne le sociologue Jean-Pierre Poulain, spécialiste des pratiques et cultures alimentaires. "Au supermarché, on y trouve tout et on gagne du temps", relève-t-il. Pour l’auteur du Dictionnaire des cultures alimentaires, "la force des habitudes c’est économique d’un point de vue financier, économique en temps et en charge mentale".