Les moulins à eau risquent de disparaître, voici pourquoi

Dans l'Orne, les moulins à eau sont-ils en danger ? C'est ce que laissent entendre plusieurs propriétaires de moulins. Ils craignent qu'un décret paru fin juin pour favoriser la continuité écologique n'engendre la disparition de nombreux édifices du département.

Il y a 20 ans, au lendemain de la tempête de 1999, Marcel Ory fait l'acquisition d'une bâtisse et du moulin qui y est accolé, tombé en ruine à cause des bourrasques. Depuis, il retape l'édifice avec pour finalité l'autonomie énergétique de son foyer, via la force de l'eau. Mais on lui impose aujourd'hui de réaliser des travaux en amont, pour rediriger l'eau vers l'ancien lit de la rivière. 

 

La totalité de l'eau repassera en fond de vallée, donc nous, on n'aura plus d'eau. Vous vous rendez compte, ça détruit tout l'environnement qui est en place depuis 700 ou 800 ans. Et on réduit la faune et la flore. On réduit tout le milieu aquatique.

Marcel Ory, propriétaire de moulin à eau

Protéger le milieu aquatique... en détruisant les barrages

La protection du milieu aquatique, la continuité écologique, c'est l'argument utilisé par l'Etat pour justifier le décret n° 2020-828 du 30 juin 2020 modifiant la nomenclature et la procédure en matière de police de l'eau, un décret qui facilite la destruction des constructions obstruant le cours des rivières.

Selon nos confères du Figaro, les services de l’État systématiseraient, au nom de la lutte contre la pollution, la destruction des barrages des moulins à eau. "Ils (les services de l'Etat) sont accusés de surinterpréter une directive européenne datant de 2000. 
 

Nulle part, dans les textes européens, il n'est indiqué qu’il faille détruire des barrages pour restaurer la qualité de l’eau. Il s’agit d’un abus de pouvoir de l’administration

André Quiblier, président de l’Association des amis des moulins de l’Orne


Au cours de l’été, (le) décret a relancé la colère des propriétaires d’ouvrages hydrauliques plus que centenaires." Ce décret de simplification permet à l'Agence de l'eau de se passer d'enquête publique ou d'enquête d'impact avant d'araser un barrage. "Ce décret déclare qu'il n'y aura plus aucun contrôle pour démolir un moulin, pour démolir un vannage, pour démolir un étang" explique André Quiblier, Président de l'association "Les Amis des moulins 61".

Les moulins, dangereux pour les poissons ?

Le principal grief à l'encontre des moulins, c'est la non-conformité de certaines installations et leur dangerosité pour les poissons. Or, la préservation de la faune doit être garantie par les propriétaires. "Les obligations, c'est d'assurer la libre circulation des sédiments, des poissons, des espèces, en tout temps en montée et dévalaison. On ne peut pas sacrifier la biodiversité sur l'autel des moulins. Ca n'est pas audible et ce n'est pas entendable" selon Jean-Paul Doron, Président de la Fédération de l'Orne pour la pêche et la protection du milieu aquatique.

Les trois fédérations nationales de sauvegarde des moulins ont déposé un recours contre le décret du 30 juin. Selon ces associations, citées par le journal Le Moniteur dans son article intitulé "un décret estival met le feu aux moulins", "le décret méconnaît le principe de soumission à autorisation environnementale des opérations susceptibles de réduire la ressource en eau ou de présenter des risques pour la santé publique, surtout quand les ouvrages à détruire retiennent des sédiments pollués".

Mais l'affaire n'est pas nouvelle. "Depuis une vingtaine d’années, le ministère de l’Écologie et des associations de protection de l’environnement poussent à la roue afin que les propriétaires de moulins effacent les barrages et déversoirs pour rendre aux rivières leurs lits naturels. Une aberration selon la Fédération française des associations de sauvegarde des moulins, qui lançait déjà, en mai 2018, ce SOS relayé par Le télégramme de Brest.

Il reste encore à ce jour près de 600 moulins à eau dans l'Orne, suspendus à ce recours.

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