Présidentielle 2022 : ce que les élus normands retiennent des résultats du second tour

Avec 55,84% des voix, la Normandie place Emmanuel Macron en tête face à Marine Le Pen. Mais dans notre région comme ailleurs en France, le vote pour le Rassemblement national progresse en nombre de voix notamment dans les zones rurales.

Si le président sortant, réélu hier soir, arrive premier sur l'ensemble de la Normandie, Marine Le Pen parvient à réduire l’écart par rapport à 2017. Dans l'Eure, comme au premier tour, elle arrive même en tête avec 51,38% des votes contre 48,62% pour Emmanuel Macron.

Du côté de l'abstention, près d'un Normand sur quatre n'est pas allé voter hier (24,18 %), en légère hausse par rapport au second tour de la présidentielle de 2017.

Guillaume Pennelle, président du groupe Rassemblement National à la Région Normandie : "Nous avons su démontrer que nous sommes puissants dans les zones rurales"

Avec 6 points de plus dans la région par rapport au scrutin de 2017 (38,04% pour Marine Le Pen lors de la précédente élection présidentielle), Guillaume Pennelle se félicite de la dynamique engagée. "Certes nous ne l’avons pas emporté mais nous avons su démontrer que dans les zones rurales nous sommes puissants. Et c’est une fierté pour moi en politique d’être toujours présent aux côtés de ceux qui souffrent, les petits, les sans grades. "

Pour le président du groupe RN à la Région, le résultat du second tour montre l'opposition entre deux France : "entre les deux tours, les curés, les évêques, le show-biz, les medias ont fait campagne ouvertement pour Emmanuel Macron. Ceux qui l’emportent aujourd’hui, c’est la France du show-biz, des grandes villes, la France islamiste. Vous verrez qu’à Trappes ou dans les cités islamistes, nous apprendrons qu’ils ont voté pour Emmanuel Macron. C’est la France du baby-boom qui l’emporte alors que les jeunes et les actifs ont davantage voté pour Marine. C’est dommage que les jeunes se fassent dicter leur avenir par ceux qui ont vécu déjà."

Quant à l'échec systématique de son parti au soir du second tour, l'élu veut croire que dans les années à venir la situation s'inversera. "On a tout promis à Marine Le Pen, qu’elle allait disparaître avec Eric Zemmour ou avec ceux qui nous ont trahis. Alors cette fois-ci, on n’y est pas encore mais on se rapproche. Dans les années qui viennent avec les nouvelles générations qui arrivent comme un Jordan Bardella qui n’a que 26 ans, et moi je l’espère personnellement avec Marine Le Pen, on va y arriver."

Désormais, Guillaume Pennelle vise les élections législatives et espère réussir à constituer un groupe à l'Assemblée. "Quand on obtient 42% des voix, on va se battre sur le terrain pour construire à l'Assemblée nationale une opposition constructive mais forte à Emmanuel Macron. Car il a les mains libres maintenant. Les premières semaines, il va faire son beau, son gentil mais dès septembre, les gens, toujours les mêmes, vont souffrir. Ce sera un quinquennat de casse sociale. Mais on sera là pour le combattre."

Le paysage politique a un peu explosé et tout nous est permis

Philippe Chapron, responsable RN du Calvados

Le responsable du Rassemblement National dans le Calvados, Philippe Chapron croit lui aussi en les chances de son parti sur ce qu'il appelle "la troisième manche" et ce sans répondre aux appels du pied d'Eric Zemmour. "On arrive quand même en bonne position au deuxième tour. Pourquoi allons-nous nous attacher des alliances de partis ? Nous, nous allons aller sous nos couleurs au combat pour gagner des députés au nom du Rassemblement national.

"Pour autant, la partie s'annonce compliquée. Mais pas impossible", estime le responsable calvadosien. "Le plafond de verre n’est pas encore crevé mais on s’en rapproche. C’est vrai que pour les législatives, on n’arrive jamais en excellente position parce que c’est une élection qui ne nous favorise pas. Je fustige au passage l’absence de parole du candidat réélu hier qui avait promis de donner de la proportionnelle, ce qu’il n’a pas fait. Donc forcément, nous sommes toujours un petit peu handicapés", affirme Philippe Chapron, "mais les temps ont changé. Le paysage politique a un peu explosé et tout nous est permis."    

Joël Bruneau, maire LR de Caen : "le grand enjeu c’est comment aujourd’hui on reparle au peuple"

Les temps ont changé. Joël Bruneau, le maire LR de Caen, en a bien conscience. "Les deux grands partis qui ont structuré la vie politique française depuis 1958, le mouvement gaulliste d'un côté et le parti socialiste de l'autre, sont des partis qui sont en bout de course en quelque sorte. Nous sommes dans un autre système où on a malheureusement trois tiers : un tiers plutôt extrême droite, un tiers central – dont je fais partie- et un tiers plus extrême gauche."

Pour l'élu local normand, le président fraichement réélu "aurait intérêt à considérer avec beaucoup de relativité cette victoire" et faire "preuve d’humilité". Et de faire part de son inquiétude quant à une fracture au sein de la société française. "On ne peut pas durablement avoir ces deux France avec d'un côté un vote élitaire, des bacs +5 qui gagnent bien leur vie ou des gens qui n’ont plus de soucis dans la vie parce que retraités et de l’autre la France des travailleurs de première ligne qu’on a un peu oubliés depuis le covid, des gens en difficulté, des zones rurales, des quartiers les plus pauvres."

Très clairement, nous sommes dans un pays qui s’est appauvri par rapport à d’autres

Joël Bruneau, maire LR de Caen  

Joël Bruneau est inquiet et estime que ses collègues politiques, pas uniquement sa propre formation, doivent se remettre en question. "Le grand enjeu c’est comment aujourd’hui on reparle au peuple - dont je suis issu - comment on arrive à avoir un personnel politique qui sache parler au peuple sans lui raconter de bêtises." Et le maire de Caen de dénoncer certaines promesses de campagne : "C’est facile de promettre qu'on va mettre un tel à la retraite à 60 ans alors même que bientôt il y aura autant de retraités, voire plus, que d’actifs, ou de dire à un autre qu’on va lui doubler son salaire. Mais au final, le vrai sujet c’est globalement comment ce pays se remet en route pour permettre à chacun d’avoir un meilleur niveau de vie et le niveau de vie individuel, il passe par un niveau de vie collectif. Très clairement, nous sommes dans un pays qui s’est appauvri par rapport à d’autres depuis une trentaine d’années, notamment à cause de la désindustrialisation. C’est l’un des sujets de base."  

Les élus LREM conscients des défis qui les attendent

Pour Damien Adam, député LREM de Seine-Maritime, avec la réélection d'Emmanuel Macron, l'objectif est atteint même s'il faut se remettre en cause. "La participation est trop basse. Et Marine Le Pen fait 40% au deuxième tour d’une élection présidentielle, c’est inédit. On doit trouver les clés pour qu’en 2027 ce ne soit pas 50%. Il nous faut mettre en place des mesures concrètes pour améliorer le pouvoir d’achat, la sécurité, la  santé, le quotidien des français."

Dans la Manche, son collègue Bertrand Sorre lance un appel à "beaucoup d'humilité" et rappelle que "cette victoire est aussi le fruit d’une certaine partie de la population qui n’est pas en faveur d’Emmanuel Macron mais pour qui le sens républicain est prioritaire." 

Outre la nécessité "d'améliorer le pouvoir d'achat", le député de la deuxième circonscription de la Manche pointe deux autres enjeux de ce second quinquennat. "Le climat n’attendra pas. Nous avons un énorme challenge à relever : accélérer les mesures et faire en sorte que notre planète soit préservée. Nous avons tous un rôle à jouer dans cette action."

On a besoin, de façon démocratique, que le pouvoir soit plus exercé localement

Bertrand Sorre, député LREM de la Manche

Pour l'élu manchois, le rétablissement d'un dialogue avec les citoyens passe par la décentralisation. "La gestion du pouvoir est aujourd’hui très parisienne, ressentie comme telle à la fois par les élus et nos concitoyens. On a besoin, de façon démocratique, que le pouvoir soit plus exercé localement et ressenti moins en silo, moins comme étant des décisions systématiquement parisiennes."  

Dès hier soir, et avec les élections législatives à venir en juin, Damien Adam, quant à lui, soutient qu'il faut modifier le système politique actuel : "il faut instaurer la proportionnelle et réformer notre système politique pour que les français puissent avoir des rendez-vous plus réguliers pour dire à leurs dirigeants s’ils sont d’accord avec ce qui est fait. Il faut aussi que l’Assemblée Nationale soit plus représentative des français."

Face aux discours de Jean-Luc Mélenchon qui appelle à voter pour l'élire Premier ministre, Damien Adam se montre peu inquiet : "le discours de Jean-Luc Mélenchon vise comme au premier tour de la présidentielle à arriver au vote utile pour lui. Mais 2017 a bien prouvé que ça ne marchait pas forcément comme ça. A nous de convaincre pour que nos candidats aux législatives soient présents au deuxième tour" 

Pour lui d'ailleurs, l'union de la gauche semble peu probable "C’est une petite musique qu’on a entendu pendant toute la campagne présidentielle. Ils ne peuvent pas le faire car il y a des désaccords idéologiques majeurs tels qui les empêchent d’avoir des accords au-delà de sauver ce qui peut l’être. Ça ne change rien à notre stratégie : nous présenterons des candidats dans toutes les circonscriptions du pays. J’espère que les français donneront une majorité à Emmanuel Macron."

De son côté Bertrand Bellanger, président LREM du département de Seine-Maritime, renouvelle sa confiance à Emmanuel Macron.

Le parti Horizons, fondé par Edouard Philippe, félicite Emmanuel Macron

Le tweet pouvait difficilement être plus laconique. Dès hier soir, l’ancien Premier ministre d’Emmanuel Macron a félicité le président réélu. Et n’a pas manqué de rappeler les 63% obtenu au Havre par le gagnant alors qu’au premier tour, c’est Jean-Luc Mélenchon qui était arrivé en tête avec 30,17% des voix.   

Même tonalité pour Agnès Firmin Le Bodo, porte-parole du parti Horizons. « Une bonne nouvelle pour la France ». La député de Seine-maritime remercie les français pour leur choix.   

Pour Catherine Morin-Desailly, « la tâche du Président de la République est immense pour restaurer la Concorde »

 « Soulagée » par la réélection du président de la République, elle sait qu’un travail important de réforme attend Emmanuel Macron pour restaurer l’entente en France.                                                                                 

La sénatrice Union centriste de Seine-maritime assure qu’elle poursuivra son travail au Sénat avec « la même exigence vis-à-vis du gouvernement et volonté de construire ».

Pour le PS, place au troisième tour

Contraint de reconnaître une sévère défaite pour toute la gauche au soir du premier tour de l’élection présidentielle, le maire socialiste de Rouen, proche soutien d’Anne Hidalgo, se félicite que la République ait su se défendre et l’emporter à l’issue du second tour. Mais il reste vigilant face à la montée du Rassemblement National et de l’abstention   

Comme il y a quinze jours, il en appelle désormais aux élections législatives pour faire valoir les idées et les projets de la gauche.  

Marc Antoine Jamet, maire socialiste du Val-de-Reuil, se veut plus offensif. Dans sa ville où cohabitent 73 nationalités, Emmanuel Macron l’emporte avec 55,13% des voix. Le premier édile salue « la résistance » et « la cohérence » de ses administrés sur tweeter. Mais, le conseiller départemental s’interroge également sur le choix des candidats pour les élections législatives à l’heure où la gauche espère se réunir pour représenter « le camp du progrès ».   

 

Sébastien Jumel, député PCF de Seine-Maritime : "La vie du président de la République mal élu ne sera pas un long fleuve tranquille"

L'union de la gauche, le député communiste Sébastien Jumel veut y croire, lui qui a fait le choix il y a plusieurs mois de soutenir Jean-Luc Mélenchon malgré "des approches différentes sur certains sujets", plutôt que Fabien Roussel, le candidat désigné par son parti. "Si à gauche certains n’avaient pas choisi le chemin de l’extrême brillante solitude nous aurions eu un deuxième tour différent et même un résultat de deuxième tour différent", estime l'élu dieppois.

"Rassemblés, nous sommes plus forts. Il faut que les écolos, les cocos, les socialistes qui sont de gauche prennent le sens de ce mouvement (...) Il faut que la gauche dans sa diversité retrouve la raison, acte le fait que l’Union populaire a enclenché une dynamique forte de mobilisation, qu’elle constitue un bloc désormais incontournable et que chacun va amener sa richesse, sa force, son originalité." Pour sa part, Sébastien Jumel veut "réconcilier les métropoles avec la France rurale, défendre l'école comme ascenseur social" et "le monde rural avec la pêche et les agriculteurs qui sont les éléments de la souveraineté alimentaire". 

L’Assemblée doit être l’endroit où on fait la politique

Sébastien Jumel, député PCF de Seine-Maritime  

Fustigeant les "playmobil" de la majorité, le parlementaire normand plaide pour "une assemblée en résistance et une assemblée en construction d’alternative". Et pour Sébastien Jumel, cet objectif est nécessaire et possible. "J’ai vu hier soir sur les visages que les corps abimés n’avaient pas envie de travailler plus longtemps. Que la question du pouvoir d’achat, pour les classes populaires, pour les classes moyennes, était évidemment dans toutes les têtes. J’ai vu les jeunes faire barrage mais considérer que les questions d’urgence sociale et d’urgence climatique devaient être réglées. Tout ça me conduit à dire que la vie du président de la République mal élu ne sera pas un long fleuve tranquille. Il y a possibilité de faire en sorte qu’un homme ne décide pas de tout et de rien tout seul. L’assemblée doit être l’endroit où on fait la politique."

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