Une rentrée incertaine dans le monde de l’insertion professionnelle

Les chantiers d’insertion aident à franchir une première marche vers l’emploi. Dans le contexte de crise actuelle, les dirigeants de ces chantiers ont l’impression de naviguer à vue, en redoutant l’écueil d’une forte précarisation sociale.
 

C’est un peu la double peine à la Chiffo de Caen avec la crise sanitaire. L’association chargée de réinsérer les personnes très éloignées de l’emploi a perdu 150 000 euros lors du confinement.

La responsable Christine Juillet constate, un brin désabusée : « nous devons autofinancer 30% de notre budget total, et avec cette perte de chiffre d’affaire des boutiques, il va falloir vendre énormément jusqu’en décembre. En plus, nous attendons toujours une enveloppe départementale de subventions, que nous aurions dû toucher il y a plusieurs mois. Si on la reçoit en décembre, ça sera trop tard ! »

Des finances en berne à cause du Covid, mais pas seulement

Ajoutez à cela un orage et une inondation qui ont fait perdre la semaine dernière 20% des vêtements qui auraient dû être proposés au public. De quoi agacer les nerfs les plus solides.

Pourtant, Christine Juillet préfère s’attacher à un projet à l’arrêt par manque de financement. « Nous devons nous lancer dans une nouvelle activité : l’up-cycling. On va transformer des vêtements de marques de luxe invendus, travailler cette matière d’une qualité incroyable et créer notre propre collection ».  
De quoi valoriser le curriculum vitae des couturières qui passeront par là. Mais les travaux d’agrandissement de l’atelier de couture sont eux aussi à l’arrêt.  

Christine Juillet s’attend à ce que plus de petites mains viennent frapper aux portes de son chantier de réinsertion dès septembre.
« Nous pouvons accueillir au total environ 80 salariés. Le seul avantage du confinement, c’est qu’en ne faisant pas travailler à 100% tout le personnel, on va pouvoir embaucher 12 salariés de plus jusqu’en décembre. Mais pas de quoi répondre à la demande plus forte qu’on attend en raison des conséquences de la crise sanitaire », note-t-elle.

Des chantiers repoussés

Du côté des agences d’intérim solidaires, c’est encore l’expectative. Catherine Pigeon, conseillère d’insertion pour Actif & dynamic située à Caen, attend avant tout des échéances. « De nombreux chantiers ont été décalés dans le temps. Celui de la construction du centre pénitencier à Ifs, en périphérie caennaise, aurait dû débuter en mai, on ignore encore quand les travaux seront lancés. On ne peut donc pas caler de formations ni proposer de postes pour le moment. »

Inquiétude aux Jardins de l'espoir

A Alençon, dans les rangées de fruits et légumes des Jardins de l’espoir souffle une légère inquiétude. Sur 5 hectares, le maraîchage permet à 70% des salariés un retour à l’emploi ou à la formation.
Jean-Luc est un ancien maçon qui n’a pas travaillé pendant de longues années. Son passage par les Jardins de l’espoir lui apporte « de l’autonomie, d’être à l’heure au travail, de l’indépendance et surtout de l’écoute » assure-t-il.

Ils sont 18 comme lui à être formés et à reprendre contact avec le monde professionnel après être passés par une très grande précarité.
« On redoute une forte augmentation à partir de septembre des cas de précarité sociale, souligne Thierry Leroyer à la tête des Jardins de l’espoir. La situation de l’emploi dans l’Orne n’était déjà pas très bonne, là, on craint que plus de gens encore doivent se tourner vers nous et des structures similaires à l’avenir ».

La précarisation de personnes déjà fragiles, qu’elles soient accidentées de la vie, sans aucune expérience professionnelle, ou même étudiantes privées de petit boulot, c’est la menace tant redoutée des acteurs de l’insertion sociale.
 
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